L'Héritage des Templiers
celle des hommes non plus. En le promouvant au rang de maréchal, le défunt maître avait tenté de mettre un frein à son ambition, il en était conscient ; peut-être lui tendait-il même un piège en espérant qu’il se ferait une multitude d’ennemis, ce qui aurait rendu toute promotion ultérieure impossible. Mais il avait usé de sa position avec sagesse en multipliant les amitiés, les alliances et les faveurs rendues. La vie monastique lui convenait. Ces dix dernières années, il avait épluché les chroniques de l’ordre, et les moindres détails – positifs ou négatifs – de son histoire n’avaient plus aujourd’hui aucun secret pour lui. Il ne répéterait pas les erreurs du passé. Il était intimement persuadé que l’isolement auquel s’était elle-même contrainte la confrérie avait précipité sa chute. Le secret engendrait à la fois mystère et suspicion, et, de là, il n’y avait qu’un pas vers la diffamation. Il fallait que cela cesse. Il fallait rompre ce silence de sept cents ans.
Son heure était venue.
La règle était claire.
« Lorsqu’une chose sera commandée par le maître, qu’elle soit faite sans aucune réserve, comme si c’était Dieu qui l’avait commandée. »
La sonnerie du téléphone placé sur son bureau retentit et il décrocha le combiné.
« Les deux frères qui se trouvent à Rennes-le-Château nous signalent l’arrivée de Stéphanie Nelle et de Malone, lui annonça son second. Comme vous l’aviez prédit, elle s’est rendue directement au cimetière et a découvert la tombe d’Ernst Scoville. »
Il était bon de connaître son ennemi. « Que nos frères se contentent d’observer, mais qu’ils soient prêts à agir.
— Au sujet de l’autre problème sur lequel vous nous avez demandé d’enquêter, nous ignorons toujours qui a agressé nos frères à Copenhague. »
Le maréchal détestait entendre parler d’échec. « Les préparatifs sont-ils achevés pour ce soir ?
— Nous serons prêts.
— Combien de frères ont-ils rejoint le sénéchal au panthéon ?
— Trente-quatre.
— Les avez-vous tous identifiés ?
— Tous sans exception.
— Offrons-leur la possibilité de se joindre à nous. S’ils refusent, occupez-vous d’eux. Assurons-nous cependant que la majorité d’entre eux s’engage à nos côtés. Cela ne devrait pas poser de problème. Personne n’aime soutenir une cause perdue d’avance.
— Le chapitre se réunit à dix-huit heures. »
Au moins, le sénéchal renonçait à ses fonctions en appelant les frères à se réunir avant la tombée de la nuit. La seule inconnue dans l’équation, c’était le chapitre, assemblée censée prévenir toute manipulation ; mais il avait longuement étudié les principes qui en régissaient le fonctionnement et avait hâte qu’il se tienne.
« Soyez prêts, ordonna de Rochefort. Le sénéchal agira vite pour créer la confusion. C’est ainsi que son maître gérait les élections.
— Il ne se laissera pas vaincre aisément.
— Ce serait étonnant de sa part, en effet. Voilà pourquoi je lui réserve une surprise. »
18
Rennes-le-Château
13 h 30
Malone et Stéphanie traversèrent le village aux rues grouillantes de monde. Un car cahota le long de la grand-rue, se dirigeant prudemment vers le parking. À mi-côte, Stéphanie entra dans un restaurant pour parler au patron. Malone jeta un coup d’œil concupiscent aux assiettes appétissantes des clients attablés, tout en comprenant que le déjeuner devrait attendre.
Il en voulait à Stéphanie de lui avoir menti. Elle n’avait pas l’air de se rendre compte de la gravité de la situation. Des hommes déterminés, prêts à mourir et à tuer, poursuivaient une quête. Malone avait maintes fois eu affaire à ce genre d’individus, et c’est en rassemblant le maximum d’informations qu’il multiplierait ses chances de succès. Il était déjà difficile de s’occuper de ses ennemis, mais s’il devait en prime s’inquiéter pour ses amis, la tâche devenait impossible.
« Ernst Scoville a été percuté par une voiture la semaine dernière pendant sa promenade quotidienne à l’extérieur des remparts, annonça Stéphanie en sortant du restaurant. Les villageois l’appréciaient. Il vivait ici depuis longtemps.
— Des pistes concernant la voiture ?
— Aucun témoin. Rien de concret à exploiter.
— Vous connaissiez Scoville personnellement ?
— Oui,
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