L'histoire secrète des dalaï-lamas
quand l’expédition nazie d’Ernst Schâfer arrive à Lhassa ; il est aussi le patron des opérations CBI, Chine-Birmanie-Inde. Sous son commandement, Milton Miles est le patron de l’OSS pour l’Extrême-Orient et dirige un groupe de renseignement naval à Chongqing, la capitale du Sichuan.
C’est dans ce contexte qu’entrent en scène le capitaine de l'US Air Force Brooke Dolan [389] et Ilya Tolstoï [390] . Les deux hommes appartiennent à l’OSS. Le premier est cet explorateur américain qui a mené, en 1931 et 1934, des explorations au Tibet et en Chine, notamment avec le nazi Ernst Schäfer ; le second est le petit-fils de l’écrivain russe, Léon Tolstoï. Les deux hommes sont porteurs d’une lettre du président Franklin D. Roosevelt pour le dalaï-lama. Celle-ci est datée du 3 juillet 1942. En voici un extrait : « Comme vous le savez, le peuple des États-Unis, associé à celui de vingt-sept autres nations, est engagé dans une guerre qui a été imposée au monde par des pays portés à la conquête et qui cherchent à détruire partout la liberté de pensée, de religion et d’action. Ces Nations unies combattent aujourd’hui pour leur défense et pour la préservation de la liberté ; confiantes qu’elles seront victorieuses parce que leur cause est juste et leur détermination inébranlable. »
Le président Roosevelt veut obtenir un droit de passage au Tibet pour acheminer armes et matériel pour le Guomindang. Aussi, quelques jours plus tard, c’est le départ. Deux cents livres d’équipement, caméras, films, vingt-sept livres d’affaires personnelles, ainsi commencent les aventures de Brooke Dolan et d’Ilya Tolstoï en Asie centrale et au Tibet. Quelques jours encore, et les deux hommes s’embarquent pour l’Inde.
À New-Delhi, une jeep les attend à l’aéroport pour les conduire directement à l’Imperial Hôtel : le quartier général du général Joseph Stillwell se trouve dans une aile du bâtiment.
Le succès de l’opération, au moins jusqu’à Lhassa, dépend essentiellement des prises de contact, qui, pour la plupart, se font par radio : celles-ci se déroulent convenablement avec le gouvernement des Indes britanniques et O.K. Caroe, son secrétaire d’État aux Affaires étrangères. Elles sont plus efficaces avec Basil Gould, leur représentant politique pour le Bhoutan et le Tibet : l’homme connaît le pays et les mentalités tibétaines par coeur. Elles s’avèrent correctes avec Frank Ludlow, chef de leur mission au Tibet, installé à Lhassa. Enfin, elles s’avèrent plus délicates avec les autorités tibétaines, obstinément engluées dans leur refus d’ouverture vers les pays étrangers [391] .
En route pour le Sikkim
Septembre 1942. Dolan et Tolstoï sont prêts. L’ordre tombe. Le général Stillwell leur souhaite le meilleur des voyages. Donovan, lui, leur demande de ne jamais perdre le contact radio : la chaîne himalayenne est hostile et nul ne peut présager du comportement de ses habitants face à un groupe d’étrangers se dirigeant vers Lhassa.
La première étape, New-Delhi – Gangtok, se fait en train. Départ de nuit, un compartiment leur a été réservé. Les bagages sont dans des containers, prêts à être transportés à dos de yacks et de mulets.
Une courte halte à Calcutta, puis une autre à Siliguri. Sandup, un jeune Tibétain d’une trentaine d’années, les rejoint : il s’exprime parfaitement en anglais et sera chargé des contacts radio entre Lhassa et l’Inde.
En route pour Gangtok. Cette fois, le trajet d’une centaine de kilomètres se fait en voiture, une vieille Ford brinquebalante, où sont entassés les bagages et où les deux agents de l’OSS se serrent comme ils peuvent. La route est mauvaise et dangereuse, la région étant infestée de bandits – surtout des Gurkhas.
Enfin, voici l’entrée de Gangtok. Comme dans toutes les villes indiennes qu’ils ont traversées, la capitale du Sikkim est un grouillement d’hommes et de femmes. Des taxis klaxonnent sans discontinuer pour se frayer un passage, entre les gens, les vaches et les rickshaws ! Quels engins ! Les camions Tatas, les bus avec ses montagnes de gens, des scooters, des vélos, les vaches et les singes, un festival de couleurs et de cris, de sonnettes, de klaxons, tout leur est dépaysement, avant le calme du cottage de Basil Gould : « Il préparait un dictionnaire anglais-tibétain, raconte Tolstoï... Brooke
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