L'histoire secrète des dalaï-lamas

par des jouets, des outils, des spiritueux, de la bière chinoise, le tout à des prix défiant toute concurrence – la main-d’oeuvre étant quasi gratuite. Des produits qui inondent les marchés occidentaux.
    Dans les années 1960 et 1970, les médecins chinois venaient régulièrement dans les laogaïs et autres camps réaliser toutes sortes d’expériences. Ils disséquaient, coupaient les têtes, les bras, ouvraient la cage thoracique, pour étudier au plus près la race tibétaine, que les communistes considéraient comme composée de sous-hommes. Ces expériences comprenaient aussi l’étude des cerveaux. Déjà à l’époque, pour les trafics d’organes – foie, coeur, reins... –, ils utilisaient des boîtes hermétiquement closes, chacune contenant plusieurs récipients, dans lesquels ils glissaient les organes. Lorsque le corps d’un prisonnier était trop abîmé, il était disséqué et servait à l’instruction des jeunes médecins chinois et tibétains.
    Un demi-siècle plus tard, les trafics d’organes sont devenus un commerce lucratif pour les autorités chinoises puisque huit à dix millions de prisonniers sont susceptibles d’être tués à tout instant pour répondre aux besoins de greffes dans le monde. Amnesty International affirme par exemple qu’en Chine et au Tibet, 90 % des organes transplantés proviennent de prisonniers exécutés.
    Plusieurs sites vous proposent leurs services. Il en coûte soixante-deux mille dollars pour la greffe d’un rein vivant à Shenyang, premier hôpital à avoir été affilié en 2003 à l’université de médecine de Chine. Le site se félicite d’avoir de nombreux amis étrangers et d’assurer « la fonction rénale du donneur ».
    Durée d’attente pour un rein : huit jours. Ce même site se réjouit de pouvoir effectuer au moins « cinq mille greffes de reins par an en Chine, grâce au soutien du gouvernement », ajoutant sur sa page : « La Cour suprême du peuple, l’officier de la loi suprême du peuple, la police, le pouvoir judiciaire, le service de santé et l’administration civile ont conjointement émis une loi pour s’assurer que les dons d’organes soient soutenus par le gouvernement. Ceci est unique au monde. »
    À Shengyang, l’hôpital affilié à l’université de médecine de Chine se dit capable de « trouver immédiatement des fournisseurs de poumons – pour 150 000 dollars –, de coeurs – pour 30 000 dollars –, de cornées – pour 30 000 dollars également ». Les foies coûtent 100 000 dollars. Il va de soi que le prix varie selon la qualité de l’hôpital.
    Comme la corruption est présente partout en Chine, les intermédiaires touchent une commission, depuis le directeur de l’hôpital, en passant par la cour de justice, jusqu’aux directeurs et personnels pénitentiaires. Des commissions pouvant atteindre un tiers du coût total de l’opération. Les rapports publics annuels estiment à 30 000 le nombre de greffes avant 1999 et à 18 500 celles sur la seule période de 1994 à 1999 ! Et 90 000 jusqu’en 2005.
     
    Menaces de mort
     
    Été 1998. À Tsurphu, le danger est partout aussi. La présence de fonctionnaires et de militaires chinois, la menace sournoise des lamas rouges, ramènent à la dure réalité ce pays sous occupation depuis quarante ans. Urgyen Trinley Dordjé s’apprête à célébrer son treizième anniversaire le 25 juin.
    Une foule de pèlerins est venue à Tsurphu. L’événement prend une importance singulière : l’enfant est le seul grand maître spirituel encore présent au Tibet, tous les autres s’étant enfuis. Il y a bien sûr Norbu, le onzième panchen-lama chinois, mais la majorité des bouddhistes tibétains ne semble pas vouloir le reconnaître, lui préférant Guendun Choekyi Nyima, désigné par le quatorzième dalaï-lama.
    Le 25 juin, les drapeaux à prières battent au gré des vents. Les célébrations commencent par des offrandes d’encens de genévrier. Les parents du jeune karmapa sont venus de Lhassa et se sont directement rendus dans la résidence de leur fils pour lui présenter leurs voeux.
    Ses précepteurs lui offrent des pilules de longue vie et lui souhaitent de rester longtemps dans ce monde. Des instants magiques gâchés par les rumeurs ! Un complot vient, en effet, d’être démasqué. Comme tous les enfants et adolescents tibétains, Urgyen Trinley Dordjé adore participer aux pique-niques organisés en son honneur. Des