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L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes

L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes

Titel: L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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ignoraient tout cela, ce qui aggravait les conditions de ces expériences. »
    — Chaque expérience effectuée au Block 46 de Buchenwald était rédigée d’une façon très exacte : les notes prises, les courbes de température, les données cliniques et les résultats, servaient à établir un rapport destiné au chef du Service d’hygiène des S.S. Des copies étaient également adressées à tout service s’intéressant aux expériences, les usines Behring, l’Académie de médecine militaire, etc. En ce qui concerne les contacts avec l’Académie de médecine militaire à Berlin, je me rappelle la troisième réunion de l’Académie, au cours de laquelle Ding fit un rapport sur les expériences du typhus. Il m’en parla en juin 1943, à l’occasion de la protestation du professeur Rose. Il fut dans un état de fureur extrême pendant plusieurs jours. À trois ou quatre reprises il me dit en blasphémant ce qu’il pensait du professeur Rose, qui avait osé s’opposer en public aux expériences ; je ne désire pas répéter les expressions qu’il utilisa. Il me dit qu’il y a des situations que même un professeur devrait respecter, et qu’il devait garder le secret sur ces questions. J’ai eu l’impression que les objections du professeur Rose étaient aussi bien scientifiques qu’humaines. Environ un an plus tard, Ding me montra triomphalement un ordre du professeur Mrugowsky, au sujet de nouvelles expériences à effectuer au Block 46, avec le vaccin d’Ibsen obtenu à Copenhague, et provenant du foie de souris. Ce vaccin avait été fourni à des fins expérimentales au camp de Buchenwald par le professeur Rose, qui l’avait demandé à Mrugowsky. Le docteur Ding me dit en riant : « Vous voyez, Kogon, il y vient lui aussi. » Je dois dire que j’étais abasourdi, car la résistance du professeur Rose en mai 1943, m’avait paru constituer un bon symptôme de la survivance de l’éthique des médecins, et des hommes de science allemands…
    — À la fin de ces expériences, il y eut six morts sur trente, ou plutôt vingt-six, car quatre des sujets furent retirés pour d’autres maladies. Lorsque ce résultat nous fut connu, au Block 50, avec un certain nombre de camarades médecins et savants, nous discutâmes longuement de cette affaire ; cela nous déprima considérablement, en raison de leur rapport avec un savant aussi considérable que le professeur Rose.
    McH. – Pouvez-vous dire au tribunal le total approximatif des détenus soumis aux expériences du typhus ?
    K. – Près de mille personnes, dont plus de la moitié étaient des sujets de passage ; le pourcentage des morts variant avec chaque expérience. Je me rappelle que dans une expérience de thérapeutique chimique, plus de 53 % des sujets moururent ; si on ne compte pas les personnes de passage, le nombre total des morts des expériences du typhus à Buchenwald est compris entre cent cinquante et cent soixante… »
    — Ding était un homme doué, un téméraire sans aucun principe moral, sans convictions religieuses, sans aucune croyance métaphysique. À ma connaissance, il avait rallié les S.S. par ambition et pour faire une carrière rapide. Ses connaissances médicales étaient relativement faibles, mais il avait une certaine aptitude à résoudre les problèmes médicaux, lorsqu’il pensait en retirer des avantages personnels. Il désirait se faire connaître dans le monde médical, se faire rattacher à une université, et il utilisait tous les moyens d’agrandir sa réputation personnelle. Pendant qu’il était médecin du camp de Buchenwald, il commit quelques actions horribles ; d’autre part, comme médecin du camp, il améliorait les conditions d’hygiène, et il se montra parfois très bienveillant et agréable avec les prisonniers ; mais je suis sûr, d’autre part, que Ding aurait sacrifié n’importe qui, si sa carrière avait été en jeu. Il était accessible à la persuasion, et à certains arguments. Au Block 50, il se sentait un peu chez lui, car il y avait là plusieurs hommes de science, et des universitaires ; il parlait du Block 50 comme d’un enclos de la science, dans un camp de concentration, et il nous traitait, nous les détenus du Block 50, avec une grande bienveillance ; il fit presque tout ce qui, parmi mes suggestions, lui paraissait raisonnable, mais il avait peur de prendre une responsabilité sérieuse. En même temps, il maintenait un contact

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