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L'homme au ventre de plomb

L'homme au ventre de plomb

Titel: L'homme au ventre de plomb Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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nommer, ces camarades ?

    â€“ Pas tous.
Je n'en connais vraiment qu'un : Truche de La Chaux, un garde du
corps du palais. Ils étaient intimes tous les deux, quoique
Truche soit de petite noblesse.

    Nicolas releva ce
travers si couru des laquais qui leur fait adopter les préjugés
de leurs maîtres. Ainsi, la cascade du mépris
prenait-elle sa source à tous les niveaux de la société,
dans la noblesse comme chez les serviteurs.

    â€“ Quand
avez-vous vu votre maître pour la dernière fois ?

    â€“ Mais ce
soir même !

    Cette réponse
fit bondir le lieutenant de police de son fauteuil ; Lambert recula,
surpris par ce spectre livide qui jaillissait tel un diable de sa
boîte, avec sur la tête une perruque en bataille qui
penchait dangereusement.

    â€“ Tiens
donc, monsieur, veuillez me conter cela par le menu...

    Lambert ne demanda
pas à qui il avait affaire et conta son histoire.

    â€“ Mon maître
était de garde la nuit dernière. Il y avait grand jeu
au cercle de la reine. Son service fait, il a pris quelque repos
jusqu'à midi. Il est ensuite parti errer seul dans le parc du
château, m'ordonnant d'être dans l'avant-cour à
quatre heures avec une voiture. Il voulait, m'a-t-il dit, coucher à
Paris. Nous sommes arrivés sans encombre vers neuf heures, ce
soir. Il m'a alors donné congé, n'ayant plus besoin de
moi. J 'étais fatigué, je suis allé me coucher.

    â€“ Vous
deviez assurer votre service demain matin ?

    â€“ Certainement.
À sept heures, j'aurais monté l'eau chaude à M.
le vicomte.

    â€“ Le temps
était beau à Versailles ? Interrompit Nicolas sous le
regard courroucé de M. de Sartine qui n'entendait rien à
cette digression.

    â€“ Brumeux et
sombre.

    â€“ Pleuvait-il
?

    Il fixait le
valet.

    â€“ Aucunement,
monsieur. Mais peut-être cette question a-t-elle trait à
l'état des habits de mon pauvre maître. Je m'étais
permis de lui recommander de se changer avant de quitter Versailles.
Perdu dans ses tristes pensées, il avait glissé au
cours de sa promenade dans un petit fossé de vidange du grand
canal. C'est ce qu'il m'avait expliqué lorsque je m'étais
inquiété de l'état de son vêtement.

    Nicolas faisait
effort pour ne pas se laisser entraîner par la méfiance
que lui inspirait le valet. Il se répétait que juger
sur la première impression constituait toujours un risque
d'erreur grave. Les propos de l'inspecteur Bourdeau lui revenaient en
mémoire. Dans sa jeunesse, celui-ci se fiait ordinairement au
jugement du premier instant. Il avait cherché à se
corriger, mais en vieillissant, l'expérience lui avait
confirmé la valeur de ce premier moment où seul
l'instinct s'exprimait et il était revenu aux errements 10 de sa jeunesse, comme plus assurés de livrer la vérité
d'un être.

    Ce retour sur
lui-même agaça le jeune homme et il décida de
remettre à plus tard de démêler ce problème.
Rien, dans l'état actuel des choses, ne justifiait qu'il
s'acharnât sur le valet alors que le suicide paraissait avéré.
Il fallait seulement en éclaircir les circonstances pour
comprendre les causes qui avaient conduit le malheureux jeune homme à
cet acte fatal. Avec l'accord de M. de Sartine, Nicolas congédia
donc Lambert, tout en lui recommandant de rester dans le couloir ; il
souhaitait en effet interroger d'abord le majordome. Des exempts
surgirent à cet instant. Il les pria d'attendre la fin de ses
premières investigations et leur enjoignit d'avoir l'œil
sur Lambert, avec interdiction de le laisser parler à
quiconque.

    Quand il rentra
dans la chambre, Sartine s'était à nouveau affalé
dans son fauteuil et paraissait en proie à un débat
intérieur intense. Sans troubler sa réflexion, Nicolas
revint vers le corps.

    Le bougeoir à
la main, il examina les lieux en commençant par le parquet. Il
repéra quelques rayures de fraîche date, dont l'origine
pouvait tout aussi bien provenir du gravier coincé sous la
semelle des bottes que de toute autre cause.

    Le dessus du
bureau attira ensuite son attention. Sous la lampe bouillotte placée
au milieu du maroquin, il trouva une feuille de papier et il lut,
écrits d'une main hâtive en grosses capitales, les mots
« PARDON, ADIEU ». A gauche de cette

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