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L'homme au ventre de plomb

L'homme au ventre de plomb

Titel: L'homme au ventre de plomb Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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famille qu'elle
soutient. Toutefois...

    â€“ Toutefois,
monsieur ?

    â€“ Je pense
tout haut devant vous, Nicolas. Toutefois...

    Le ton avait
repris cette chaleur et cette confiance dont le lieutenant général
de police usait habituellement avec lui.

    â€“ Toutefois,
je suis aussi chargé, au nom du roi, de faire régner
l'ordre et la loi dans Paris, ce qui n'est pas chose aisée.
Trop de rigueur dans l'application de la règle peut conduire à
des ruptures et à des drames. La sagesse serait de rendre
présentable ce cadavre, de faire chercher un prêtre et
une bière et de répandre le bruit qu'en nettoyant son
arme le jeune lieutenant s'est blessé à mort. La messe
serait dite, la princesse obéie, les parents accablés
mais préservés, et moi, sans soucis, j'aurais satisfait
mon monde. Puis-je en toute conscience agir de la sorte ? Quel est
votre sentiment ? Je me fie à votre jugement, même si la
précipitation et la chimère guident quelquefois votre
imagination.

    â€“ Je tiens,
monsieur, que la chose doit être mûrement pensée.
Nous sommes comptables à la fois de l'idéal de la loi
avec la justice et de la sagesse avec la prudence...

    Sartine approuva
de la tête ce prudent exorde.

    â€“ Telle que
se présente cette enquête, poursuivit Nicolas, il me
revient, puisque vous me faites l'honneur de m'interroger, de définir
notre dilemme. Nous savons que le suicide est un acte qui va contre
la morale divine, un malheur dont l'opprobre rejaillit sur une
famille honorable. Le cadavre que nous avons sous les yeux n'est pas
du peuple, ce n'est pas un pauvre que l'excès du malheur a
conduit à cette extrémité. Voilà un
honnête homme, un jeune homme parfaitement éduqué,
qui sait bien ce que son geste va signifier pour ses parents et pour
ses proches et qui, sans réfléchir plus avant, commet
l'irréparable sur lui-même, sans offrir à sa
famille aucun moyen d'échapper à la honte. Ne
trouvez-vous pas étrange qu'il ne vous ait pas écrit
comme beaucoup le font pour éviter toute difficulté
après leur décès 14 ? Il a juste laissé ceci.

    Il ramassa le
papier sur le bureau et le rendit à Sartine.

    â€“ Notez
enfin, monsieur, qu'il sera bien malaisé de taire la nouvelle.
La rumeur court déjà à l'0péra, dans la
ville ; elle sera bientôt à la Cour. La princesse en a
sûrement parlé, chacun va répétant ses
propos. Une dizaine de personnes déjà en sont informées
policiers, domestiques et gens du voisinage. Cette rumeur, personne
ne pourra l'arrêter et elle grossira de ses propres
incertitudes... Cela sera pain bénit pour les colporteurs de
nouvelles à la main.

    Le pied de M. de
Sartine battait la mesure sur le parquet.

    â€“ Où
nous mène ce beau discours, et comment toutes vos
circonvolutions nous feront-elles sortir de ce labyrinthe ? Que me
proposez-vous ?

    â€“ Je pense,
monsieur, que, sans rien divulguer et sans écarter ni la thèse
de l'accident ni la folie passagère, le corps du vicomte doit
être conduit à la Basse-Geôle 15 du Châtelet pour y être ouvert et examiné dans le
plus grand secret. Cette décision, dans un premier mouvement,
nous fera gagner du temps.

    â€“ Et nous
nous retrouverons au même point dans quelques jours avec un
scandale effectivement grossi de mille contes. Et je n'évoque
pas le rôle que sans doute vous me réservez d'annoncer
au comte de Ruissec que je vais livrer le corps de son fils à
la Faculté. De grâce, donnez-moi un argument plus
convaincant.

    â€“ Je ne
crois pas, monsieur, que vous ayez saisi toute la portée de ma
proposition. Si je suggère l'ouverture du corps du vicomte de
Ruissec, c'est justement pour préserver sa mémoire et
l'honneur de sa famille, car, selon moi, cet examen montrera qu'il a
été assassiné.

Chapitre II
    En
enfant perdu 16

    Â«Â La
vérité, peut-être ne la veux-tu pas
entendre ; mais si, moi, je ne
te la dis pas
maintenant, il ne servira de
rien que je te
la révèle une
autre fois. »

    Quinte-Curce

    Ã€ cette
assertion, faite d'un ton posé, M. de Sartine ne répondit
pas tout de suite. Une moue dubitative suivie d'une manière de
grimace furent ses seules réactions. Il prit une inspiration,
joignit les mains et, après

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