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L'Hôtel Saint-Pol

L'Hôtel Saint-Pol

Titel: L'Hôtel Saint-Pol Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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main s’accrochait convulsivement à la poignée de sa dague.
    Parvenu au palais de Beautreillis, qui était situé dans, la partie méridionale de l’Hôtel Saint-Pol, il put se demander si la reine avait voulu lui montrer le faste de son hospitalité ou bien lui faire comprendre que pour cette nuit-là du moins il était son prisonnier : le palais de Beautreillis était rempli de gardes harnachés de pesantes armures qui firent la haie sur son passage, tandis que six valets porteurs de flambeaux marchaient devant lui pour l’éclairer.
    Jean sans Peur s’arrêta dans la grande salle des armes et, renvoyant l’escorte, se laissa tomber dans un de ces vastes et profonds fauteuils du temps, aux dossiers tout fouillés par la prodigieuse imagination de l’art gothique.
    Les gardes se retirèrent, – mais s’arrêtèrent dans la salle voisine.
    Le front dans la main, Jean sans Peur méditait :
    – Le duc de Bourgogne… mon père ! – Marguerite de Hainaut… ma femme ! – Charles sixième… mon cousin !
    C’est autour de ces trois noms qu’évolua sa méditation… c’est sur des rêves rouges qu’il échafaudait le rêve radieux de la passion qu’il portait maintenant dans sa chair… et le rêve resplendissant au fond duquel étincelait la couronne de l’Empire de Charlemagne restauré !… Cela dura longtemps sans doute, jusqu’à l’heure où un page entra, s’arrêta devant lui, et annonça :
    – Monseigneur, un homme est là qui prétend venir d’un logis de la rue Saint-Martin…
    Jean sans Peur tressaillit violemment. La rue Saint-Martin ! Le logis Passavant ! La morte de l’oratoire, la pauvre et douce amante d’antan sacrifiée, bafouée, assassinée !… Et la fille ! Sa fille !… Il avait oublié tout cela… Fini, écrasé, tué, ce songe du passé !…
    Non, tout n’était pas fini de ce côté-là…
    Les yeux haineux, la parole mauvaise, l’esprit assiégé de vagues terreurs et de pensées de meurtre, il ordonna qu’on introduisît l’homme qui venait de la rue Saint-Martin…
    Saïtano parut…
    – Comment t’appelles-tu ? Qui es-tu ? Que veux-tu ? demanda Jean sans Peur.
    – Mon nom ? dit Saïtano. Il importe peu, monseigneur. Qui je suis ? Demandez à Sa Majesté la reine quel est l’homme à qui, par six fois déjà, elle a fait l’honneur de l’aller voir en la Cité. Ce que je veux ? Vous prévenir qu’il reste un témoin de l’affaire du logis Passavant…
    – De quoi te mêles-tu ! gronda Nevers.
    – De votre réputation, monseigneur, dit froidement Saïtano. Il y a les actes, monseigneur…
    Nevers frissonna. Sa dague, au même instant, fut hors du fourreau.
    – Vous ne pouvez pas me tuer, dit Saïtano en étendant le bras. Vous atteindriez la reine !…
    – Drôle ! grinça Nevers.
    Saïtano se redressa et frémit. Ses yeux eurent un éclair flamboyant… la haine était née dans son âme obscure. Un mot ! Nevers avait dit un mot de trop ! Un mot que Saïtano ne devait jamais pardonner. Devant ce regard de mort, Jean sans Peur recula. Puis, à voix basse :
    – Parle ! Dépêche !
    Saïtano se redressa, et à haute voix prononça :
    – Il y a eu de votre fait ou de par votre complicité, il y a eu, monseigneur, infamie, félonie et forfaiture…
    Nevers devint pourpre.
    – Misérable manant, tu oses insulter ton seigneur !
    En même temps, avant que Saïtano eût pu faire un geste, la main de Nevers se leva. Dans la même seconde, cette main s’abattit sur le visage de Saïtano…
    L’homme de la Cité, livide, n’eut pas un mot, pas un geste. Mais aux mille plis de son front couvert de sueur, on eût pu voir ce qu’il souffrait. Et si Nevers avait pu lire dans son cœur, il l’eût poignardé.
    – Parle, maintenant, reprit Jean sans Peur.
    – Monseigneur, dit froidement Saïtano, les actes de mariage ont été détruits. Vous savez que vous n’avez rien à craindre de ceux qui ont signé avec vous. La fiancée est morte. Les témoins se tairont. C’est votre affaire. Mais je vous dis : il y a un « témoin » qui parlera, lui !…
    – Un témoin ! fit Nevers. Qui cela ?…
    – Celui que messire Amaury de Bois-Redon devait réduire au silence. L’enfant, monseigneur : le chevalier Hardy de Passavant…
    – Il a échappé à Bois-Redon ?…
    – Et à la mort ! dit Saïtano.
    Rudement, talonnant le parquet de chêne, le comte de Nevers fit quelques pas, gronda un furieux juron,

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