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L'Hôtel Saint-Pol

L'Hôtel Saint-Pol

Titel: L'Hôtel Saint-Pol Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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illuminant la nuit où il se débattait : Roselys…
    Et Roselys !… Qu’avaient-ils fait de Roselys ?…
    D’un coin d’ombre épaisse le guettait Saïtano… Sans doute il crut le moment favorable. Assurant son poignard dans sa main, il marcha à l’enfant… À ce moment, il y eut un bruit d’armures entrechoquées, des lueurs de torches éclairèrent le carrefour, et une voix cria :
    – Holà ! Halte ! Ici !…
    Saïtano, froid et calme, maître de lui, obtempéra à l’ordre et, de la rue des Marmousets, vit déboucher une forte patrouille qui venait de faire une rafle dans le Val d’Amour.
    – Que fais-tu dehors à pareille heure ? interrogea rudement la voix.
    Saïtano jeta un coup d’œil sur Hardy arrêté à dix pas de là et songea : Il faut qu’il se taise !… Un éclair, soudain, brilla dans ses yeux, pour s’éteindre aussitôt. Il allongea la main, et du bout du doigt toucha la poitrine du chef de patrouille.
    – Mort de Satan ! grogna l’homme d’armes en se reculant. Est-ce là répondre ? Que veut dire ce suppôt du diable ? Parleras-tu ?
    – Vous portez la croix de Saint-André, fit Saïtano.
    – Oui bien ! Et après ?
    – C’est l’insigne de la maison de Bourgogne, reprit Saïtano.
    – Bourgogne est mon maître !…
    – Et Nevers est fils de Bourgogne, continua Saïtano.
    – Ça, truand fieffé, te moques-tu ?…
    – Non. Si vous voulez rendre service au noble comte de Nevers, conduisez-lui cet enfant… Si vous voulez être pendu, laissez-le s’en aller.
    Le chef de la patrouille fit un signe. En un clin d’œil, Hardy fut entouré, saisi malgré sa résistance, placé entre deux soldats qui le tenaient chacun par un bras.
    – Je vais faire ce que tu dis, grogna l’homme d’armes. Mais, nombril du pape ! si tu m’as trompé… en route ! À l’hôtel de Bourgogne ! Et toi, suis-nous.
    – Je vous suis, dit Saïtano. Mais si vous voulez m’en croire, ce n’est pas à l’hôtel de Bourgogne qu’il faut chercher Mgr de Nevers.
    – Et où, damné ruffian ?
    – À l’Hôtel Saint-Pol !
    On se mit en route. Saïtano, encadré par deux des gens d’armes, marchait en méditant : l’enfant se taira, Jean sans Peur le fera taire… Hardy s’avançait au milieu de la troupe avec cette sorte de bonne volonté du désespéré qui a reconnu inutile sa lutte contre le destin.
    On s’arrêta devant un pont-levis.
    Hardy leva les yeux, vit deux grosses tours massives, gardiennes immuables d’une porte hérissée de pointes de fer ; il reconnut l’une des entrées de l’Hôtel Saint-Pol, et se rappelant alors tout ce qu’il avait entendu murmurer lorsqu’on prononçait ce nom, il frissonna… Pourquoi, ah ! pourquoi le conduisait-on à l’Hôtel Saint-Pol ?… Le chef de patrouille appela, se nomma, cria un mot de passe, et bientôt toute la troupe s’engouffra sous une voûte dont une torche éclairait faiblement les profondeurs. Hardy eut l’impression d’entrer dans une tombe, et que jamais plus ne se rouvrirait pour lui l’énorme porte qui venait de se fermer en grinçant. Alors il sentit tomber sur ses épaules le froid de la peur, il voulut résister, se débattre… Il fut violemment entraîné.

VI – ENTRÉE EN SCÈNE D’IMPÉRIA
    Jean sans Peur avait escorté la reine Isabeau jusqu’à l’Hôtel Saint-Pol et traversé avec elle cours et jardins, jusqu’à son palais. Dans la grande galerie à double colonnade, elle marchait devant lui, onduleuse et souple, et de sa capuche retombée sur les épaules émergeait la masse d’or de ses cheveux. Comme elle allait atteindre sa chambre à coucher, elle se retourna tout à coup, ses yeux resplendissants jetaient les effluves qui d’un fauve font une bête soumise… Nevers frémit.
    – Donc, fit-elle, il n’y a « presque » plus rien de vivant entre nous. Laurence d’Ambrun est morte. Et quant à sa fille… votre fille !… Gérande s’en est chargée…
    – Plus rien, dit Jean sans Peur. Rien. Je le jure. Laissez-moi donc, maintenant, vous parler de mon cœur. Vous ne savez pas, vous ne pouvez savoir… Je croyais vous aimer… Lorsque je vous ai vue dans cette galerie, lorsque je vous ai entendue, j’ai cru vous comprendre, j’ai cru que d’un coup d’aile vous m’aviez porté aux sommets de la passion. Je me mentais, reine ! C’est depuis l’oratoire seulement que j’ai senti la frénésie de l’amour se glisser dans mes veines.

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