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L'Ile du jour d'avant

L'Ile du jour d'avant

Titel: L'Ile du jour d'avant Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Umberto Eco
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monumentale, et destinée à se pérenniser davantage que le bronze, sur le Déluge Universel.
    En homme d’Église, il entendait démontrer que la Bible n’avait pas menti, mais en homme de science il voulait harmoniser la dictée sacrée et les résultats des recherches de son temps. Pour ce faire, il avait recueilli des fossiles, exploré les territoires d’Orient afin de retrouver quelque chose sur la cime du mont Ararat, et fait des calculs de haute précision sur ce que pouvaient être les dimensions d’une Arche qui pût contenir tant d’animaux (et notez bien, sept couples pour chacun) et en même temps avoir une juste proportion entre partie émergée et partie immergée, pour ne pas couler à pic sous tout ce poids ou être renversée par les lames qui, durant le Déluge, ne devaient pas être des coups de fouets d’enfant de chœur.
    Il avait fait une esquisse pour montrer à Roberto la coupe de l’Arche, comme un énorme édifice carré de six étages, les volatiles en haut pour qu’ils reçoivent la lumière du soleil, les mammifères dans des enclos qui puissent accueillir non seulement des chatons mais aussi des éléphants, et les reptiles dans une sorte de sentine où, au milieu de l’eau, les amphibies aussi puissent trouver l’hospitalité. Nul espace pour les Géants, et c’est pour cela que leur espèce s’était éteinte. Enfin, Noé n’avait pas eu le problème des poissons, les seuls qui n’avaient rien à craindre du Déluge.
    Toutefois, en étudiant le Déluge, le père Caspar s’était trouvé confronté à un problème physicus-hydrodynamicus apparemment insoluble. Dieu, c’est la Bible qui le dit, fait pleuvoir sur la terre pendant quarante jours et quarante nuits, et les eaux s’élevèrent au-dessus de la terre jusqu’à recouvrir même les plus hautes montagnes et bien mieux elles s’arrêtèrent à quinze coudées au-dessus des plus hautes d’entre les hautes montagnes, et les eaux couvrirent ainsi la terre pendant cent et cinquante jours. Parfait.
    — Mais as-tu la pluie essayé de recueillir ? Il pleut toute la journée, et tu as recueilli un petit fond de boute ! Et si il pleuvrait pendant une semaine, à grand ’peine tu remplis la boute ! Et imagine donc aussi une ungeheuere pluie, que vraiment tu ne peux pas même résister sous elle, que tout le ciel verse sur ta pauvre tête, une pluie pire que l’ouragan que tu as naufragé… En quarante jours ist das unmoglich, pas possible que tu remplis toute la terre jusqu’aux montagnes plus hautes !
    — Vous voulez dire que la Bible a menti ?
    — Nein ! Certes que non ! Mais je dois démontrer où Dieu toute cette eau a pris, car il n’est pas possible qu’Il l’a fait tomber du ciel ! Cela ne suffit pas !
    — Et alors ?
    — Et alors dumm bin ich nicht, stupide je suis moi pas ! Le père Caspar a une chose pensé que par aucun être humain avant d’aujourd’hui jamais pensée était. In primis, il a bien lu la Bible, qui dit que Dieu a, oui, ouvert toutes les cataractes du ciel mais Il a aussi fait jaillir avec force toutes les Quellen, les Fontes Abyssy Magnae, toutes les fontaines du grosse abysse, Genisis sept onze. Après que le Déluge fini était Il a les fontaines de l’abysse fermées, Genesis huit deux ! Quelles choses elles sont ces fontaines de l’abysse ?
    — Quelles choses elles sont ?
    — Elles sont les eaux qui dans le plus profond de la mer se trouvent ! Dieu n’a pas seulement la pluie pris mais aussi les eaux du plus profond de la mer et Il les a versées sur la terre ! Et Il les a ici prises parce que, si les montagnes les plus hautes de la terre sont autour du premier méridien, entre Jérusalem et l’Île du Fer, certainement doivent les abysses marins les plus profonds être ici, sur l’antiméridien, pour des raisons de symétrie.
    — Oui, mais les eaux de toutes les mers du globe ne suffisent pas à recouvrir les montagnes, autrement elles le feraient toujours. Et si Dieu versait les eaux de la mer sur la terre, il couvrait la terre mais vidait la mer, et la mer devenait un grand trou vide, et Noé tombait dedans avec toute son Arche…
    — Tu dis une très juste chose. Non seulement : si Dieu prenait toute l’eau de la Terra Incognita et icelle versait sur la terre Cognita, sans cette eau dans cet hémisphère la terre changeait tout son Zentrum Cravitatis et se renversait toute, et peut-être sautait dans le ciel comme une balle à quoi tu

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