L'Impératrice indomptée
d’être libre à tout jamais !
1 - La Hongrie est moins que jamais disposée à la réconciliation avec la Couronne en échange d’un simulacre de liberté. François-Joseph n’est pas pour elle un souverain légitime tant qu’il n’aura pas été couronné à Budapest. Pour les pays de droit historique, comme la Hongrie et la Bohême, le couronnement est plus qu’une cérémonie. Le souverain y prête serment de respecter les droits historiques du royaume. C’est un constat bilatéral qui consacre ces droits et le loyalisme corrélatif du peuple.
2 - Lors de sa rencontre avec l’impératrice Eugénie, à Hellbrunn, ces dames passèrent leur temps à mesurer leurs mollets avec un double centimètre. Le comte Wilczek a laissé ce témoignage : « J’ouvris doucement les portes, et dus traverser deux pièces vides de la suite, et même la chambre à coucher, jusqu’au cabinet de toilette, dont la porte était entrouverte. En face se trouvait un grand miroir et, tournant le dos à la porte derrière laquelle je me trouvais, les deux impératrices étaient occupées à mesurer avec des mètres-rubans les plus beaux mollets que l’on pût sans doute alors trouver à travers l’Europe entière. C’était un spectacle indescriptible, que je n’oublierai jamais. »
VI
LUBIES D’IMPÉRATRICE
D ÈS 1856 , l’impératrice a trouvé sa voie ; elle reste en rapports suivis avec François-Joseph et correspond avec lui en termes affectueux, tandis qu’elle en profite pour échapper complètement aux nécessités de son état d’impératrice. Elle n’en fait qu’à sa tête ; elle se refuse aux cérémonies officielles, invente des excuses pour ne pas assister aux services d’apparat.
En 1867, la Hongrie semble désormais accaparer sa vie. Elle désire organiser méthodiquement son existence. Elle veut avoir des raisons d’aller là-bas. Elle rêve d’acheter le château de Gödöllö, situé à une trentaine de kilomètres de Budapest. François-Joseph refuse en invoquant des raisons budgétaires ! Elle s’en ouvre à ceux pour qui elle a de l’affection et, en mars 1867, grâce à l’intervention magnanime d’Esterhazy et d’Andrassy, le palais est offert aux souverains d’Autriche-Hongrie.
Élisabeth va y vivre selon les voeux de son coeur. La Hongrie est véritablement le pays où elle se sent libre. Chaque jour, elle y monte à cheval et galope des heures entières. Elle est heureuse comme elle ne l’a jamais été. Tout est pour le mieux. La jeune mère de quatre enfants sourit maintenant au printemps et à la vie. Elle adore sa petite fille, Marie-Valérie, pour qui elle a des attendrissements et des gâteries excessives. En décembre, elle renvoie la dernière dame d’honneur qui ne soit pas hongroise et l’archiduchesse Sophie intervient catégoriquement auprès de son fils pour protester contre pareil scandale.
Toutefois, François-Joseph est devenu indulgent ! Il se rend compte que les conceptions vétustes de sa mère ont appauvri l’héritage de ses aïeux et il est, malgré tout, reconnaissant à sa femme d’avoir rendu la Hongrie à sa fidélité séculaire. Et puis, l’usure des années aidant, une sorte de compromis est intervenu entre les deux époux où chacun vit à sa guise à condition que l’un et l’autre se gardent une mutuelle affection qui donne le change aux peuples de l’empire. Et pourtant, à Vienne, où on lui reproche de plus en plus son entourage, uniquement magyar, du dernier des valets à son premier chambellan, le comte Nopcsa, on ragote, on cancane, on médit sur son nom. Les destins de ses frères et soeurs ne cessent aussi d’alimenter les critiques. La cour se plaint également de l’« enthousiasme » de l’impératrice pour Possenhofen : se sachant surveillée dans la capitale, Élisabeth s’accorde de plus en plus souvent des pauses familiales en Bavière, même si ses parents y font semblant de cohabiter.
C’est dans ces années 1860-1870 qu’Élisabeth entretient les rapports les plus étroits avec ses soeurs. Elle leur vient en aide dès que possible, se rendant ainsi à l’accouchement de Mathilde à Zurich en 1867, puis à celui de Marie à Rome en 1870 ; elle prend bien davantage soin d’elles que de ses enfants, Gisèle et Rodolphe. Les gens de sa suite la trouvent, dans son cercle familial bavarois, « si gentille avec ses frères et soeurs que c’était une joie de la voir ainsi ». De fait, ses deux premiers
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