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L'inconnu de l'Élysée

L'inconnu de l'Élysée

Titel: L'inconnu de l'Élysée Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Péan
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réforme des retraites (grâce à François Fillon), poursuite de la décentralisation, réforme de l'assurance-maladie –, il a échoué dans son combat contre le chômage. La suppression des contrats aidés a en effet abouti, de 2002 à 2004, à une remontée mécanique du chômage grosso modo équivalente au nombre de contrats supprimés.
    Aux vœux de janvier 2004, Jacques Chirac siffle la fin de la récréation libérale. Il demande au gouvernement de lancer immédiatement « les concertations avec les partenaires sociaux en vue de faire voter par le Parlement une grande loi de mobilisation pour l'emploi ». Les médications prescrites par le docteur Raffarin et approuvées par François Fillon ne soulagent pas le corps social, le président décide alors un changement de cap et impose au gouvernement de mettre l'emploi au centre de ses préoccupations tout en conciliant deux objectifs : la réduction des inégalités et la réforme du code du travail.
    L'échec de la droite aux élections régionales (22 régions passent alors à gauche) entraîne un remaniement ministériel le 30 mars 2004. Raffarin est reconduit, mais sa feuille de route modifiée. Il doit s'engager prioritairement dans la bataille pour l'emploi. Pour qu'il ait des chances de gagner, le président lui adjoint Jean-Louis Borloo, un général ébouriffé, combatif et imaginatif, qui a fait ses preuves en mettant au point le Plan de rénovation urbaine. Le chef de l'État et ses collaborateurs avaient appris à le mieux connaître, l'été précédent, quand l'Élysée avait dû peser de tout son poids pour imposer ledit plan, en dépit de l'opposition des technostructures du ministère du Logement et de Bercy.
    Borloo remplace donc François Fillon mais se voit attribuer un ministère aux compétences beaucoup plus larges englobant l'Emploi, le Travail et la Cohésion sociale. Claude Chirac, qui s'impatientait depuis 2002 de constater la remontée de la courbe du chômage, a, dans cette affaire, dépassé son rôle habituel en poussant un homme qui lui semblait être capable de mettre enfin en œuvre les réformes sociales promises et espérées par le président depuis 1995.
    En avril-mai 2004, Borloo met donc au point un ambitieux projet destiné à réduire les inégalités, notamment dans les banlieues défavorisées, par des mesures portant sur l'emploi, l'insertion des jeunes, le logement, l'égalité des chances. Un projet qu'il surévalue pour aborder en position de force des arbitrages qu'il sait inéluctables. Prétextant une situation financière tendue, le cabinet du Premier ministre s'y oppose. Une même opposition émane des différentes administrations directement concernées : Finances, Travail, Affaires sociales. Frédéric Salat-Baroux, secrétaire général adjoint de la présidence, s'attache à jouer les arbitres, mais a le plus grand mal à maîtriser une situation explosive, avec un Borloo qui brandit sa menace de démission s'il n'obtient pas gain de cause. Salat-Baroux se souvient : « Nous avons vécu des moments très difficiles. Une vraie révolte à l'intérieur de l'État : révolte sur le plan des principes, révolte sur le plan budgétaire, révolte contre l'autorité de l'Élysée. Une violence inimaginable !… » Le président s'est alors beaucoup attaché à concilier les points de vue contradictoires du Premier ministre et de son ministre. Plusieurs week-ends durant, il a rencontré successivement Jean-Pierre Raffarin et Jean-Louis Borloo. Le week-end le plus tendu a été celui des 12 et 13 juin 2004, le chef de l'État recevant Borloo le samedi à 19 heures, puis le Premier ministre et des membres de son cabinet le dimanche après-midi à 17 heures 30.
    Le dimanche 4 juillet, après encore quelques transactions, Jacques Chirac réussit finalement à imposer le Plan de cohésion sociale, quelque peu rogné par rapport aux ambitions initiales de Borloo, mais doté d'une enveloppe financière suffisamment substantielle pour être crédible. Mais si Borloo a apporté à Chirac la bonne « boîte à outils », il a en revanche traîné les pieds pour lancer les mesures d'assouplissement du code du travail qui constituaient le second volet du plan emploi souhaité par le président pour les petites entreprises. Si bien que lorsque Dominique de Villepin débarqua à Matignon le 31 mai 2005, dans le difficile contexte du non au référendum sur le projet de Traité constitutionnel européen, il

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