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L'inconnu de l'Élysée

L'inconnu de l'Élysée

Titel: L'inconnu de l'Élysée Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Péan
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tous deux clients de l'agence de l'avenue de la Grande Armée. Potez d'abord, puis Bloch vont, conseillés par Chirac, « faire leur marché », acheter des actions à très bas prix de la Générale d'aéronautique qui regroupe alors l'essentiel des industriels du secteur, et en devenir ainsi les numéros un, sur lesquels Cot va s'appuyer jusqu'à son départ en 1934. L'homme fort du tandem est Potez, devenu président du Syndicat de l'aéronautique. C'est une forte personnalité, à l'autorité courtoise et directe, qui n'a pas sa pareille pour bousculer les chefs de bureau des ministères, tandis que son ami Marcel, timide, parle peu et pas très bien.
    Abel Chirac va poursuivre encore quelques années sa carrière bancaire. Il prend la direction de l'agence de la BNCI de Saint-Lazare-Haussmann de septembre 1934 à mai 1935, avant de devenir patron de la succursale de Clermont-Ferrand du 1 er  septembre 1935 jusqu'au 15 novembre 1937. Henry Potez, qui n'a pas oublié l'homme qui l'a aidé, quelques années plus tôt, à devenir le plus grand avionneur français, demande alors à Chirac de prendre la direction de ses affaires privées tandis que lui-même dirige la Société nationale de constructions aéronautiques du Nord (SNCAN), société nationalisée regroupant les anciens actifs des sociétés Potez…
    Depuis le départ de Chirac de l'agence de l'avenue de la Grande Armée, il s'est passé beaucoup de choses dans le domaine de l'aéronautique. La plus importante a été, sous le gouvernement du Front populaire, le retour de Pierre Cot au ministère de l'Air, lequel a aussitôt demandé à Potez de l'aider à faire « avaler la pilule » des nationalisations à ses collègues 5 . Marcel était évidemment sur la même ligne que son ami Henry. Les nationalisations furent pour tous deux une affaire en or, ainsi que l'écrit Emmanuel Chadeau : « C'étaient à la fois des industriels actifs, poussant leurs bureaux d'études et leurs usines, mais aussi des esprits avisés sachant utiliser avec un art consommé les contradictions et les hésitations de leurs partenaires pour étendre leur influence et leur puissance, et la nationalisation fut pour eux une affaire en or. Ayant racheté des usines plus ou moins bancales, ils les firent exproprier ou les louèrent aux nationales que Cot leur confia libéralement. En incluant la “nationalisation” si particulière de la Société des moteurs et automobiles Lorraine, ils perçurent 61 % des indemnités versées par l'État, résultat remarquable. Ils restèrent à la tête des entités expropriées, ils y associèrent leurs propres affaires et les agrandirent des dépouilles de leurs concurrents. Ils continuèrent de faire prospérer leurs bureaux d'études et leurs usines de prototypes non nationalisées. »
    Ajoutons que, s'ils ont fait des « affaires en or », Potez et Bloch ont accepté les lois sociales du Front populaire, les augmentations de salaires et les « 40 heures ». Marcel Bloch était d'ailleurs un admirateur inconditionnel de Léon Blum. Plus encore : les deux avionneurs vont permettre à Pierre Cot et à Jean Moulin d'acheminer 144 avions aux Républicains espagnols, malgré les hauts cris de la droite et les articles assassins du Figaro , de L'Écho de Paris et de l'Action française .
    C'est pour diriger tout ce qui n'avait pas été nationalisé parmi les actifs de Potez et gérer les indemnités et royalties perçues par lui que fut donc embauché Abel Chirac. Il devint directeur de la société Henry Potez dont le siège était à Issy-les-Moulineaux, cependant qu'Henry Potez était administrateur-délégué de la « Nord », comme on disait à l'époque. Le principal centre de production d'avions était alors situé, comme avant les nationalisations, à Méaulte, dans la Somme, village natal de Potez. Comme avant les nationalisations, les affaires de Bloch et celles de Potez demeurèrent étroitement imbriquées, ce qui explique qu'Abel et son fils Jacques aient été également liés à la famille Bloch.
    Jusqu'en mai 1940, Henry Potez, Marcel Bloch et Abel Chirac ont mis toute leur énergie à développer la production de leurs usines et à répondre aux besoins de l'état-major. Se fondant sur les récits de son père, Jacques Chirac raconte, comme on l'a vu, que, dès le début de la bataille de France, son père fit déménager l'usine de Méaulte, où l'on fabriquait le Potez 63, avant l'arrivée des Allemands, partit

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