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L'inconnu de l'Élysée

L'inconnu de l'Élysée

Titel: L'inconnu de l'Élysée Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Péan
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le président se bornant à consulter son fidèle « Ponia ». Journalistes et commentateurs s'accordent à dire qu'il n'a réussi à faire entrer dans son équipe qu'Olivier Stirn au secrétariat d'État aux DOM-TOM, Simone Veil aux Affaires sociales, Pierre Lelong aux PTT, et René Tomasini aux Relations avec le Parlement. Aujourd'hui, Jacques Chirac ne revendique plus que la nomination de Simone Veil : « Après avoir nommé Jean-Jacques Servan-Schreiber – déjà une provocation pour les gaullistes… –, Giscard avait décidé de placer aux Affaires sociales une femme [Mme Anne-Marie Fritsch] qui était député de Lorraine et l'alter ego de Servan-Schreiber. Je suis allé dans le bureau de Giscard. J'avais déjà avalé tout le reste. Je lui ai dit que ce n'était pas possible, que je refusais qu'elle entre au gouvernement. J'ai réussi à faire nommer Simone Veil pour qui j'ai gardé beaucoup d'affection. Pierre Juillet et Marie-France Garaud la détestaient ; Juillet voulait même que Garaud entre au gouvernement, vœu auquel je n'ai pas accédé. »
    Le président se rappelle le commentaire que Giscard lui fit à propos de la nomination de Jean-Pierre Fourcade, qu'il aimait bien, à l'Économie et aux Finances : « “Son père était très intelligent ; il n'a pas hérité de son intelligence, mais il présente un gros avantage : il n'est pas gaulliste.” Ce qui, il faut le dire, était assez vrai ! »
    Dès le début, Giscard lui fait avaler toutes sortes de couleuvres, allant même souvent jusqu'à l'humilier : son propre ego est tel, il a une telle conscience de sa supériorité qu'il tient à affirmer sa prééminence absolue et probablement à tester aussi la fidélité du chef de gouvernement. Lors de la première visite d'Helmut Schmidt, le Chancelier allemand, c'est Jacques Chirac qui va l'accueillir à l'aéroport et le conduit jusqu'à la porte du bureau de Giscard, lequel ne le laisse pas entrer avec son visiteur et ne l'invite même pas, le soir, au dîner officiel. Au cours des premières semaines, Chirac est obligé de donner par deux fois sa démission pour empêcher deux provocations giscardiennes : l'arrêt de la construction du Centre Pompidou et celui des essais nucléaires dans le Pacifique. Surtout, l'Élysée dirige tout, prend toutes les décisions, souvent sans même en informer le Premier ministre, lequel a de plus en plus l'air d'accepter de bonne grâce cette complète présidentialisation du régime. Cette apparente soumission finit par endormir Giscard qui ne voit pas que son « fidèle » Chirac mène au pas de charge une opération qui, à terme, va le priver d'une partie de ses assises, avant de le condamner.
    Où l'on en revient à « Ponia ». Tout un chacun reconnaît à Michel Poniatowski, que l'on appelle alors « le Connétable », une intelligence aussi brillante que machiavélique. Lui qui compte Talleyrand, d'Artagnan, Louvois et quelques autres parmi ses ancêtres, a décidé de ne pas mettre ses talents à son propre service, mais à celui de son ami Valéry Giscard d'Estaing. Sans lui, ce dernier n'aurait sans doute pas connu le même destin. Une fois à l'Élysée, il continue de consulter cet expert en complots et coups fourrés, mais aussi en bons mots, ce qui, en politique, vaut autant sinon mieux qu'une bonne lame. En guise de récompense pour ses bons et loyaux services, « Ponia » avait demandé à s'installer place Beauvau, là où il pourrait surveiller au mieux ses adversaires, déclarés ou non, et disposerait de tous les moyens pour « casser l'UDR, lui faire mettre genou à terre ». Il y déploierait sa machine de guerre contre le plus important parti de la majorité. Croyant qu'après avoir trahi Chaban et les « barons » gaullistes, Chirac continuerait de plus belle sur sa lancée, Giscard et « Ponia » ont commis une lourde erreur. Si l'hôte de Matignon voulait en effet mettre la main sur l'UDR, ce n'était pas pour la placer au service de Giscard, mais au sien propre. Dès lors, « Ponia » et Chirac allaient à l'affrontement.
    D'entrée de jeu, « Ponia » commença à fouiller dans les dossiers du ministère, à faire installer des bretelles téléphoniques, à lancer des enquêtes sur le SAC (Service d'action civique) et diverses « affaires » afin de décrédibiliser et affaiblir le parti gaulliste et ses dirigeants. Mais ce combat-là ne pouvait être effectué du jour au lendemain ; relevant d'un

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