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L’Inconnue de Birobidjan

L’Inconnue de Birobidjan

Titel: L’Inconnue de Birobidjan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: MAREK HALTER
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les claviers des sténos cessèrent de cliqueter. La voix de Cohn était aussi plate que s’il annonçait la météo.
    â€” L’agent Apron n’est jamais rentré de mission. Les dossiers de l’OSS ont enregistré un dernier contact à l’été 1944. Depuis, plus rien… Plus rien jusqu’à ce que cette personne donne au FBI ce passeport et prétende se nommer Maria Magdalena Apron.
    Lorsque Cohn se tut, les épaules de la Russe se voûtèrent. Une veine battait à toute vitesse sur sa tempe. Sa poitrine gonflait à petits coups le tissu noir de sa robe, faisant scintiller la broche en argent. Je n’ai jamais su si c’était un effet de sa maîtrise d’actrice ou de la panique, mais sa bouche ne s’entrouvrit même pas. Wood et McCarthy aboyèrent enrythme. Pendant quelques secondes, ce ne furent que des hurlements :
    â€” Avez-vous tué l’agent Apron, Miss Nobody ?
    â€” Non !
    â€” Qui êtes-vous ?
    â€” Depuis quand nous espionnez-vous ?
    â€” Je ne suis pas une espionne !
    â€” Vous mentez !
    â€” Qui travaille dans votre réseau ?
    â€” Personne ! Je ne…
    â€” Vous mentez !
    â€” Non !
    Elle était debout. Plus grande qu’on ne l’aurait cru.
    â€” Je ne suis pas une espionne et je n’ai pas tué Michael ! Vous ne savez rien ! J’ai tout fait pour le sauver.
    Ã€ présent, on savait d’où venait son accent. Son regard glissa sur les sénateurs, vers la table de presse. Je devais arborer le même air de fauve affamé que les autres. Il se pouvait que Cohn ait décroché le gros lot. Je commençais à avoir une idée de la prochaine une du Post . Des pensées qui devaient se lire comme des néons sur nos visages. Elle se rassit.
    â€” En effet, Apron n’est pas mon nom. C’est Michael qui me l’a donné. Ce passeport aussi, c’est lui qui me l’a donné.
    â€” Il vous l’a donné ou vous l’avez tué pour le lui prendre ?
    C’était Nixon. On ne l’avait pas encore entendu. Chaque fois qu’il ouvrait la bouche, il me semblait entendre du gravier tomber sur le sol.
    â€” Non ! Non, ce n’est pas ça !
    Wood leva la main pour l’interrompre.
    â€” Vous devriez reprendre l’interrogatoire, monsieur Cohn.
    La Russe nous dévisageait les uns après les autres. Nos yeux se croisèrent pour la première fois. Le bleu des siens aussi sombre qu’un abysse. J’ai pensé : sombre comme la peur. Ses paupières se fermèrent le temps d’une respiration. Je pouvais compter les rides autour de sa bouche.
    Cohn reprit l’interrogatoire de sa voix d’écolier modèle. Il fit ce qu’il savait le mieux faire : il afficha cette morgue nonchalante qui laissait entendre qu’on ne le convaincrait pas de sitôt qu’un être humain lui faisait face.
    â€” Votre nom ?
    â€” Marina Andreïeva Gousseïev 1 .
    â€” Date et lieu de naissance ?
    â€” Le 10 octobre 1912 à Koplino. Une ville au sud de Leningrad.
    â€” Quand êtes-vous entrée sur le territoire des États-Unis ?
    â€” En janvier 1946.
    â€” Pourquoi êtes-vous entrée aux États-Unis avec un faux passeport ?
    â€” Michael me l’a donné. Il…
    â€” Vous êtes un agent soviétique ?
    â€” Non !
    â€” Êtes-vous membre du Parti communiste ?
    â€” Non !
    â€” Vous n’avez jamais été membre du Parti communiste ?
    â€” Non ! Jamais, jamais !
    â€” Vous êtes soviétique et pas communiste ?
    â€” J’ai fui mon pays parce que je ne pouvais plus y vivre. Parce que Michael devait fuir, lui aussi.
    â€” Vous avez fui avec Michael Apron ?
    â€” Oui, il le fallait.
    â€” Vous l’avez tué ?
    â€” Non ! Pourquoi l’aurais-je tué ? Je l’aimais. Jamais je n’ai aimé quelqu’un comme Michael.
    â€” Les prisons sont pleines de meurtriers qui ont aimé ceux qu’ils ont tués, Miss. Comment avez-vous obtenu ce passeport ?
    â€” C’est Michael… Je ne l’ai pas tué. Je vous le jure.
    La voix de Wood résonna dans les

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