L'Insoumise du Roi-Soleil
je voulais maintenant lui offrir. Il m’attira alors au creux de son lit, et mon corps s’y baigna, épousant l’onde sucrée de sa voix qui entrait au plus profond de moi. Il me dévêtit lentement, en inventant des répits, des caresses, des baisers que je vins à lui offrir pareillement. Bientôt, nous fûmes tremblants, émus et nus. Il prit aussi le temps de murmurer ces mots d’amour qui lui ouvraient mon corps et me décidaient. Il voulut me regarder encore et j’en fis autant jusqu’à ne plus résister à l’envie de toucher sa peau et de boire à ses lèvres et de le laisser boire aux miennes et d’y baigner à son tour. Nous allions sur un chemin harmonieux et, puisqu’il était le nôtre, nous l’empruntions ensemble, enlacés et mêlés.
Je sentis ses muscles se tendre et son désir grandir pour rejoindre le mien. Quand nos corps se soudèrent, et que je devins sa femme, nous étions à l’unisson, et nos voix s’appelèrent dans un unique éclat. Il supplia, je répondis en gémissant. L’onde devint une houle chaude. Sa puissance me poussait vers l’extase et bouleversait mes sens. Nos corps battirent la mesure. Je me donnai à lui ; il me rendit son pareil en jouissance.
Puis il me demanda encore, il était assoiffé, il ne me quittait plus et pendant qu’il me couvrait de baisers, je m’offris une nouvelle fois, l’adjurant que ne cessent jamais ces plaisirs éblouissants. Nous nous voulions infatigables. Nous nous voulions amants à jamais.
Lorsque vint la nuit, nous revînmes sur la terre. Nos corps se démêlèrent, nos cœurs, eux, restèrent unis. Et ce jour fut le premier d’une nouvelle vie.
Je ne peux parler davantage de ces émotions et de ces moments dont le simple souvenir m’émeut à foison. Ceux qui attendent l’amour doivent savoir qu’il n’y a rien à en redouter. Mon vœu est qu’ils connaissent un jour ce que j’avais partagé et qui se prolongeait, pour moi, avec des regards tendres, de doux silences, des caresses apaisantes. Après, soutient-on, c’est autre chose. Dans notre cas, nous étions comme deux jeunes animaux serrés l’un contre l’autre, et si je voulais bouger, François me rattrapait. Il aurait désiré que nous restions ainsi pour un temps qui se conjuguait avec l’éternité, mais j’avais faim. De tout le jour, je n’avais que picoré dans le civet du dîner. J’étais comme les poussins de la cour. Je réclamais ma pitance. Je me suis arrachée de lui. Le menuisier ne chantait plus. Et, en tendant l’oreille, j’entendais le brouhaha de la rue Mouffetard. La soirée commençait.
— Aurais-tu oublié le spectacle ? lui demandai-je, en me levant.
— Je préfère celui que tu m’offres. Reviens, Hélène...
— J’ai envie de bouger, de chanter, d’applaudir, le suppliai-je, renonçant à une si belle tentation.
François se jeta hors du lit et s’avança vers moi. J’admirai son corps fin et ambré qui s’harmonisait avec la couleur de ses yeux. Il me prit dans ses bras. Son désir revenait.
— Il faut que je te parle encore, dis-je en embrassant son épaule.
Il sembla se souvenir d’où nous venions :
— Est-ce à propos de tes projets ?
— Demain, je verrai le roi.
Il s’écarta de moi, les yeux écarquillés :
— Tu as obtenu une audience ?
— Je vais la provoquer...
François s’assit sur le lit et chercha ses vêtements.
— Pardonne-moi, j’avais oublié. Tu parleras au roi de ton père ?
L’Eden s’éloignait et il voulait savoir vers quoi il se dirigeait. Je me suis expliquée :
— Demain matin, je me trouverai sur le chemin du roi lorsqu’il se rendra à la messe. Je m’avancerai vers lui et je lui demanderai d’exercer son pardon. Je ne ferai que cela.
— Et tu penses qu’il va s’arrêter et t’écouter !
— C’est ici que le revenant de Versailles entre en scène...
Il m’écouta pendant que nous finissions de nous préparer. Il ne dit pas un mot. De temps à autre, il me regardait fixement. Il hochait la tête. Il me sourit aussi. À la fin, il se leva et se dirigea vers la porte :
— Es-tu prête ?
— Tu ne trouves rien d’autre à me dire ?
Il se posta, les mains sur les hanches :
— Si je dis qu’il s’agit d’une folie, tu te fâcheras. Si j’applaudis, tu penseras que je mens.
— Parle-moi sincèrement.
— Je t’aime à la folie !
— François ! Je t’en prie...
— Bon ! Pour commencer, tu as persuadé ton père de te laisser partir. Puis
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