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L'Insoumise du Roi-Soleil

L'Insoumise du Roi-Soleil

Titel: L'Insoumise du Roi-Soleil Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Michel Riou
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occasions de nous croiser... Quel est votre programme ?
    — Je resterai avec François de Saint Val. Et ne veillez pas dehors, ce n’est pas nécessaire.
    — M’en pensez-vous capable ?
    — Je passerai la nuit chez lui, ajoutai-je sans relever son air offusqué.
    Il toussa avant de reprendre :
    — Espiègle et sauvage... Ce cœur est-il soumis ?
    — Conquis serait plus juste. Et vous, où irez-vous ?
    — Comment vous surprendre si je vous le dis ! Maintenant, laissez-moi aller... Je veux encore rester ici quelques instants.
    — Pourquoi ?
    — Je suis d’un naturel méfiant, fit-il mystérieusement. Moi, je n’ai pas signé de contrat avec monsieur de La Reynie.
    Je l’interrogeai du regard. Il esquiva ma question :
    — Filez ! Vous avez mieux à faire. Si j’ai des nouvelles, je vous trouverai. Voici la lettre de votre père. Brûlez-la après l’avoir lue. Bonne nuit, madame.
    Et Faillard s’effaça à son tour.
    Jean-Baptiste discutait avec François. Il parlait de son exploit et tenait en main un sifflet.
    — Habilement négocié auprès du subalterne du lieutenant de police, se félicita-t-il. Cela peut servir... Bon, que faisons-nous ?
    — Toi, tu rentres chez la marquise de Sévigné.
    — Votre père se plaindra, gronda-t-il, soudain déçu de ne plus pouvoir fanfaronner dans la troupe.
    — Le carrosse, m’as-tu dit, se trouve en bas de la rue Mouffetard ?
    — Enfin ! Vous n’allez pas me laisser seul après les événements de cette nuit ?
    — Jean-Baptiste, n’as-tu pas un sifflet ? Bonne nuit. Demain matin, je rentrerai à l’hôtel Carnavalet.
    Je l’embrassai sur le front et sur la joue et je dis adieu à sa mine renfrognée. Puis, je pris François par la main et nous partîmes en courant chez lui, refusant d’entendre les jérémiades de Bonnefoix qui menaçait le fantôme de lui faire goûter son ortie si, par malheur, celui-ci se manifestait.
    De cette nuit qui fut merveilleuse, et où nous nous aimâmes à corps perdus, je raconterai ceci : l’eau du bain que nous prîmes à deux était douce et chaude. Quant au reste, il n’appartient qu’à nous.

    Mais la lettre de mon père, qu’en était-il ?
    Il donnait peu de nouvelles sur lui, préférant répondre aux questions que je lui avais posées cinq jours plus tôt sur l’Affaire des Poisons. C’était si proche et déjà si lointain. Quand je lui avais écrit, j’arrivais à Paris. Je cherchais à comprendre le fonctionnement de la cour royale et madame de Sévigné m’avait longuement parlé d’un Versailles gagné par la cause des dévots. Le roi changeait, l’intolérance progressait. Et selon elle, cette transformation ne datait pas de l’installation de la cour dans ce palais. Le drame se consumait depuis les révélations, d’autant plus terribles qu’elles étaient parfois fausses, de sorciers et de chimistes diaboliques sur les pratiques de l’entourage de Louis le Quatorzième. Et je demandais à mon père s’il partageait le point de vue de notre marquise : en établissant un lien entre la montée de l’intolérance et le procès des poisons, pouvait-on alors imaginer que ces terribles accusations aient pu être fomentées, voire inventées dans le cas de Montespan, pour servir les intérêts du parti liberticide ? En somme, cette affaire, aux conséquences terribles pour le droit des hommes à croire selon leurs convictions, s’expliquait-elle par une cause cachée autre que la sorcellerie – une voie sur laquelle La Reynie reconnaissait lui-même qu’il s’était trop vivement précipité ?
    Désormais, ces questions apparaissaient secondaires. Le nouveau sujet était les crimes du fantôme. Et aussi rapide que fût la réponse de mon père, je ne pensais pas qu’elle me permette de comprendre si un complot religieux était à l’origine de la nouvelle affaire qui secouait Versailles. Pourtant, l’opinion du comte de Saint Albert ne pouvait mieux tomber, car ce qu’il m’écrivait éclairait étrangement les deux événements et laissait penser qu’ils pouvaient être liés par une même cause cachée .
    Cette lettre, malgré les recommandations de prudence, par sentiment et fidélité filiale, je ne la détruisis pas. Je l’ai aujourd’hui ressortie d’un coffre en bois où je cache d’autres trésors. Et je la livre ici sans en avoir rien ôté.

    « Ma très chère Hélène,
    « J’ai reçu ce matin tes premiers mots de Paris et mon cœur se réchauffe. Tu es arrivée. Tu es

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