Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
L'Insoumise du Roi-Soleil

L'Insoumise du Roi-Soleil

Titel: L'Insoumise du Roi-Soleil Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Michel Riou
Vom Netzwerk:
autres esbroufeurs. Ils donnent de la gueule, mais leur lame tremble. Redressez la pointe de votre épée ! Corrigez votre ligne ! Le haut de votre corps est trop exposé ! Surveillez les borgnes et les balafrés. On les appelle des chevaliers de la petite épée et ces filous sont dangereux. Leurs lames ne tiennent pas dans leurs fourreaux. Ils sont toujours prêts à se battre ! Si vous tombez sur l’un d’eux, en rompant de la sorte, je crains qu’il vous faille renoncer à la vie. Couvrez-vous davantage ! Imitez-moi. Le moine apprend en copiant le travail des anciens.
    Il m’ordonnait d’organiser mes mouvements et mes gestes sur les siens. Nous devions ne faire qu’un ensemble. Si bien que, peu à peu, chacune de nos actions devint le résultat d’une combinaison où la silhouette de l’autre comptait pour moitié. Je me pris à ce jeu envoûtant. Je n’agissais plus en fonction de mon inspiration, mais selon le déplacement de nos ombres mouvantes, attentive à toutes, estimant leurs points faibles, sans parfois savoir s’il s’agissait de moi ou de lui. J’entrais dans la cadence intime et troublante du combat, quand les corps s’unissent, s’accouplent et semblent vouloir s’aimer jusqu’à se détruire.
    — Il faut se méfier de l’ennemi, mais jamais le craindre. Si l’on n’est pas sûr de parer l’estocade, on rompt. Il ne faut jamais entrer en mesure sans être prêt à parer. Attendez. Ne me poursuivez pas ! Je veux vous attirer... Vous faites de trop grands mouvements ! Vous exposez votre cœur aux coups de votre ennemi ! Ne me quittez pas des yeux et servez-vous de votre épée pour sentir la mienne. Restez en contact avec elle sans vous y opposer. Le moindre mouvement de la partie faible 7 de ma lame vous aidera à comprendre mon projet. Mon attaque est trop vive pour vous ? Vous ne pouvez résister ? Retirez-vous. Maintenant, votre pointe est trop haute ! Que vous pariiez ou que vous poussiez, celle-ci doit être plus basse que votre poignet. Et gardez votre lame dans la direction de mon corps. Menacez-moi. Non ! Vous êtes à découvert. Je n’ai qu’à avancer le pied droit pour vous percer l’estomac. Si vous vous sentez perdue, feignez aussitôt l’estocade pour me faire reculer... Voilà qui est déjà mieux.
    Pendant que nous croisions le fer, Faillard évoqua également sa vie. C’était une autre façon de me transmettre son héritage. À l’inverse de ce que je prévoyais, il ne parla pas de ses succès. Pas une fois, il ne cita les noms de ses victimes – et je supposais qu’il en comptait plus d’une. Pas une fois, il ne se vanta – et j’étais certaine qu’il ne manquait pas d’exploits qui auraient pu étourdir son élève.
    La meilleure école des armes étant, selon lui, celle de la modestie, il soutenait n’avoir jamais abordé un combat en se croyant supérieur à l’ennemi. L’essentiel, répétait-il, n’était pas d’attaquer, mais de savoir se défendre. Dès lors, il concentra son enseignement sur les multiples façons de ne pas donner jour à l’arme de son adversaire. Il m’obligea à répéter cent fois le demi-cercle, cette parade circulaire qui ramène la lame adverse vers le haut. Après, nous abordâmes l’effacement, partant du principe qu’en estompant son corps, en se tenant de côté ou en se retirant, on offrait le moins de solutions possibles à son rival. Quand ces manœuvres semblèrent acquises, il aborda, sans m’accorder de pause, le couvert dont le nom dit bien qu’il s’agit de se protéger d’un coup direct. Puis, le dégagement et le bond en arrière quand je rêvais d’apprendre l’offensive à bras raccourcis, en me jetant en avant alors que mon bras armé n’était pas allongé ; le corps à corps ou encore le coulé, pour l’audace de ma lame quand elle tutoyait et glissait sur celle de Faillard...
    Et surtout, le coup droit et franc. L’attaque directe tout simplement.
    — Vous n’êtes pas prête. Il faut encore battre le fer. Vous réagissez comme tous ceux que j’ai éduqués. L’impatience est votre faiblesse. Regardez votre reflet dans ces boucliers. Regardez bien. Voyez comme vous êtes exposée. Ce bras, je peux le toucher. Ce pied aussi. Épiez votre reflet. Je vous l’ai dit, il s’agit de votre pire ami.
    — Le génie des armes se trouve-t-il dans la prudence ou dans la contre-attaque ? hurlai-je pour couvrir le bruit de nos fers. Croyez-vous que je puisse sauver ma vie en parant

Weitere Kostenlose Bücher