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Lionel Lincoln (Le Siège de Boston)

Titel: Lionel Lincoln (Le Siège de Boston) Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: James Fenimore Cooper
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mon compliment de félicitation, mais je me suis arrêté un moment dans la cuisine, sans en demander la permission à Mrs Lechmere, pour montrer à sa cuisinière comment elle doit faire griller l’entrecôte de bœuf qu’on va vous servir. Excellente chose ! nourriture substantielle ! ce qu’on peut prendre de mieux après un long sommeil. Dieu vous bénisse, mon cher Lincoln ! la vivacité de vos yeux est un stimulant pour mon esprit, comme le poivre de Cayenne pour l’estomac.
    Polwarth prononça ces derniers mots d’une voix un peu enrouée, lâcha la main de son ami, qu’il avait pressée jusque alors dans la sienne, et, se détournant sous prétexte de prendre une chaise, passa la main sur ses yeux, toussa deux ou trois fois, et s’assit en silence. Pendant qu’il faisait ces évolutions, Lionel eut le temps de remarquer le changement qui était survenu dans l’extérieur du capitaine. Il avait encore la taille arrondie et même corpulente, mais la dimension en était pourtant considérablement réduite, et au lieu d’un de ces membres inférieurs dont la nature a doué le genre humain, il avait été obligé de substituer une jambe de bois grossièrement travaillée, et dont le dessous du pied était doublé en fer. Ce membre artificiel attira principalement les regards du major Lincoln, qui continua à y fixer les yeux avec un air de compassion affectueuse, quelque temps après que le capitaine se fut établi commodément sur un fauteuil bien rembourré.
    – Je vois que mon fructus belli excite votre attention, Lionel, dit Polwarth en levant sa jambe de bois avec un air d’indifférence affectée et en la frappant légèrement avec sa canne ; ce membre n’est peut-être pas aussi bien tourné que s’il fût sorti des mains de maître Phidias ; mais il est inappréciable dans une ville comme Boston, parce qu’il ne connaît ni la faim, ni le froid.
    – Les Américains pressent donc toujours la ville ? dit Lionel charmé de détourner la conversation ; et ils continuent le siège avec vigueur ?
    – Ils nous ont tenus dans un horrible état depuis que les eaux basses du côté de la terre se sont gelées et ont ouvert un chemin dans le cœur de la péninsule. Peu de temps après l’affaire de Charlestown, et ce fut une maudite affaire, Lionel, leur généralissime de Virginie {53} , Washington, est arrivé avec toute la pompe d’une grande armée. Depuis ce temps ils ont pris une attitude plus militaire, quoiqu’ils se soient bornés à nous fatiguer d’escarmouches et à nous tenir enfermés comme des pigeons sous une cage.
    – Et Gage ne s’échauffe pas en se voyant ainsi resserré ?
    – Gage ! oh ! il y a déjà plusieurs mois que nous l’avons renvoyé comme les soupes qu’on fait disparaître pour faire place à des mets plus substantiels. Du moment que les ministres ont appris que les rebelles agissaient sérieusement, ils ont fait choix de William {54} pour conduire l’affaire, et maintenant nous sommes en présence des révoltés, qui ont déjà appris que notre chef n’est pas un enfant dans la conduite d’une guerre.
    – Secondé par des hommes tels que Clinton et Burgoyne, et soutenu par l’élite de nos troupes, il peut aisément se maintenir dans sa position.
    – Je ne connais pas de position, major Lincoln, s’écria vivement Polwarth, où il soit facile de se maintenir en face de la famine interne et externe.
    – Quoi ! en est-on déjà là ?
    – Vous en jugerez vous-même, mon cher ami. Quand le parlement eut fermé le port de Boston, tous les colons ne faisaient que murmurer, et maintenant que nous l’avons ouvert, et que nous serions charmés d’y voir entrer des provisions, du diable si une seule s’en approche. Ah ! Meriton, voilà donc l’entrecôte. Mettez-le sur cette table, approchez-le du fauteuil de votre maître, et allez me chercher un couvert, car j’ai fait ce matin un assez pauvre déjeuner. Si bien donc que nous sommes réduits à nos propres ressources, et encore les rebelles ne nous en laissent-ils pas jouir paisiblement. Cet entrecôte est cuit fort à propos ; voyez comme le jus en sort sous le couteau. Ils ont été jusqu’à équiper des corsaires qui interceptent nos convois, et heureux celui qui peut se procurer un repas comme celui qui est devant nous.
    – Je n’aurais pas cru que les Américains eussent pu nous réduire à une pareille extrémité.
    – Ce que je viens de vous dire est d’une

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