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Lionel Lincoln (Le Siège de Boston)

Titel: Lionel Lincoln (Le Siège de Boston) Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: James Fenimore Cooper
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parût même point s’apercevoir de son approche. Quoique la lune fût alors cachée derrière un nuage, il faisait encore assez clair pour que Lincoln pût juger de l’extrême misère de l’homme qui était devant lui. Ses vêtements délabrés n’attestaient que trop le motif qui l’avait engagé à chercher dans l’angle d’un mur un abri contre la tempête ; et pour soulager la faim qui le tourmentait, il rongeait avec avidité un os qui aurait été rejeté de la table du plus pauvre citoyen, malgré la disette générale. À la vue des souffrances de cet infortuné, Lionel oublia un moment le motif qui l’avait amené près de lui, et il lui adressa la parole d’une voix compatissante.
    – Vous êtes dans un endroit bien froid pour manger un maigre souper, mon ami.
    Sans cesser de chercher à apaiser sa faim sur son misérable aliment, et même sans lever les yeux, celui qu’il interrogeait répondit d’un ton triste et morose :
    – Le roi peut fermer le port et empêcher les vaisseaux d’y entrer, mais il n’a pas le pouvoir d’empêcher le froid d’arriver à Boston, quand vient le mois de mars.
    – Sur ma parole, c’est Job Pray ! Venez avec moi, mon garçon, je vous procurerai une meilleure nourriture, et une place plus chaude pour en jouir ; mais dites-moi d’abord : votre mère pourrait-elle nous procurer une lanterne ?
    – Vous ne pouvez pas entrer ce soir dans le vieux magasin, dit Job d’un ton positif.
    – Mais n’y aurait-il point alors dans le voisinage quelque boutique où l’on pût en acheter une ?
    – Nous en trouverons là, dit Job en désignant d’un air sombre un bâtiment peu élevé de l’autre côté de la place, à travers une des croisées duquel on apercevait une faible lumière.
    – Alors prenez cet argent, et allez m’acheter une lanterne et ce qu’il faut pour l’éclairer.
    Job hésitait avec une répugnance visible.
    – Allez, mon garçon, dit Lionel, je n’ai pas un instant à perdre, et le surplus de l’argent sera pour vous.
    Le jeune homme ne balança pas plus longtemps, mais il répondit avec une vivacité qu’on n’aurait pas attendue de son cerveau malade :
    – Job ira, si vous voulez lui permettre d’acheter quelque nourriture pour Nab avec le restant de la pièce.
    – Certainement ; achetez tout ce que vous voudrez, et de plus, je vous promets que ni vous, ni votre mère, vous ne manquerez désormais ni de nourriture, ni de vêtements.
    – Job a faim, dit l’idiot ; mais on dit que la faim ne fait pas encore tant de mal à un jeune estomac qu’à un vieux. Croyez-vous que le roi sache ce que c’est que d’avoir froid et faim ?
    – Je n’en sais rien, mon ami, mais je suis sûr que s’il rencontrait un être souffrant comme vous, il s’empresserait de le soulager. Allez vite, et ne manquez pas de vous procurer quelques aliments.
    Quelques minutes après, Lionel vit Job sortant de la maison où il avait couru par son ordre, et rapportant la lanterne désirée.
    – Avez-vous trouvé à acheter quelque chose pour apaiser votre faim ? dit Lionel en faisant signe à Job de le précéder avec la lumière ; j’espère que vous ne vous êtes pas oublié, dans votre empressement à me servir ?
    – Job espère qu’il n’a pas gagné la peste, dit l’idiot en dévorant avec voracité une petite tranche de pain.
    – Gagné quoi ? Qu’espérez-vous n’avoir pas gagné ?
    – La peste ; ils ont tous la maladie contagieuse dans cette maison.
    – Vous voulez dire la petite vérole, Job ?
    – Oui ; les uns l’appellent petite vérole, et les autres la maladie contagieuse ; mais son vrai nom, c’est la peste. Le roi peut empêcher les denrées d’entrer à Boston, mais il ne saurait empêcher le froid et la peste d’y pénétrer. Que le peuple se trouve une fois maître de la ville, il saura ce qu’il aura à faire, et il aura bientôt renvoyé tout cela à la maison des pestiférés.
    – J’espère que, sans le savoir, je ne vous aurai pas exposé au danger, Job ; je regrette de n’avoir pas fait ma commission moi-même, car, dans mon enfance, j’ai été inoculé pour cette terrible maladie.
    Job ne répondit rien ; il avait épuisé tout ce que son faible esprit lui inspirait à ce sujet, et ils continuèrent à marcher jusqu’à ce qu’ils fussent parvenus au bout de la place ; alors Job se retourna et demanda à son compagnon quel chemin il fallait prendre.
    – Celui de

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