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Lionel Lincoln (Le Siège de Boston)

Titel: Lionel Lincoln (Le Siège de Boston) Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: James Fenimore Cooper
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bruit soudain succédait un morne silence, comme si l’univers sommeillait tranquille sur cette assurance de sécurité.
    Dans cet instant, où l’on entendait même le plus faible murmure de la brise de la nuit, Lionel crut distinguer quelque bruit sur les eaux, comme si une rame les fendait avec une extrême prudence ; il écouta attentivement, et dirigeant ses regards du côté d’où paraissaient venir les sons, il vit une petite barque qui glissait sur la surface de l’onde et qui s’avança bientôt sur la plage sablonneuse au pied de la colline, avec un mouvement si mesuré et si uniforme, qu’à peine une vague vint-elle effleurer la terre.
    Curieux de savoir qui pouvait se promener ainsi dans le port à une pareille heure et avec tant de mystère, Lionel se levait pour descendre, lorsqu’il vit un homme sortir de la barque et gravir la hauteur dans la direction même où il se trouvait. Retenant jusqu’à sa respiration, et se retirant sous l’ombre épaisse projetée par une pointe de la colline qui s’élevait un peu au-dessus de lui, Lionel l’observa en silence ; il le vit s’arrêter lorsqu’il fut arrivé à dix pas de l’endroit où il était, se pencher à terre, et s’efforcer comme lui d’étouffer tout autre bruit, tout autre sentiment, pour écouter avec la plus grande attention. Le jeune officier dit alors en tirant son épée du fourreau :
    – Nous avons choisi un lieu bien retiré et une heure bien secrète pour nos méditations, Monsieur ?
    L’individu auquel s’adressait cette question, qui par la manière brusque et soudaine dont elle fut faite était de nature à faire tressaillir l’homme le plus intrépide, eût-il été doué de l’impassibilité d’un être surnaturel, il n’aurait pu l’entendre avec une apathie et une indifférence plus complète. Il se tourna lentement du côté de son interlocuteur, parut le regarder fixement, et répondit ensuite d’une voix basse et menaçante :
    – Il y a un grenadier là sur la colline, avec un fusil et une baïonnette, qui se promène au milieu des canons ; et s’il entend des gens parler ici, il les fera prisonniers, quoique l’un d’eux soit le major Lincoln.
    – Ah ! Job ! dit Lionel, est-ce vous que je trouve rôdant la nuit comme un voleur ? Qui vous envoie ici à une pareille heure, et qu’y venez-vous faire ?
    – Si Job est un voleur pour venir voir les sépultures sur Copp’s-Hill, reprit l’idiot d’un air sombre, un autre l’est comme lui.
    – Bien répondu, mon garçon, dit Lionel en souriant ; mais, je vous le répète, quelle mission diabolique vous amène en ces lieux au milieu de la nuit ?
    – Job aime à se promener au milieu des sépultures avant le chant du coq ; on dit que les morts marchent lorsque les vivants dorment.
    – Et vous vouliez donc avoir commerce avec les morts ?
    – C’est un péché de leur adresser beaucoup de questions, et encore ne faut-il les faire qu’au nom du Seigneur, répondit l’idiot d’un air si solennel que, joint à l’obscurité et au lieu où ils se trouvaient, il fit tressaillir Lionel involontairement ; mais Job aime à être près d’eux, afin de s’accoutumer à l’humidité pour le temps où il sera appelé lui-même à marcher enveloppé d’un linceul à minuit.
    – Chut ! dit Lionel, quel est ce bruit ?
    Job pencha la tête, écouta aussi attentivement que son compagnon, et répondit ensuite :
    – Ce n’est autre chose que le murmure du vent dans la baie ou le bruissement des vagues qui battent les côtes des îles.
    – Ce n’est ni l’un ni l’autre, dit Lionel ; j’ai entendu les sons étouffés d’une centaine de voix, ou mes oreilles m’ont étrangement trompé.
    – Peut-être sont-ce les esprits qui se parlent l’un à l’autre, reprit l’idiot ; on dit que leurs voix ressemblent au murmure des vents.
    Lionel passa la main sur son front, cherchant à recouvrer le calme de son esprit qui avait été singulièrement troublé par le ton solennel de l’idiot, et il descendit lentement la colline, suivi de près par son compagnon silencieux. Il ne s’arrêta que lorsqu’il eut atteint l’angle intérieur du mur qui entourait l’enclos des morts ; alors il resta immobile, et avançant sa tête, il prêta de nouveau la plus grande attention.
    – Enfant, je ne sais comment il se fait que vos sots propos m’ont bouleversé la tête, dit-il, mais j’entends bien certainement ici à

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