Liquidez Paris !
Kalb, vous vous chargez des bazookas.
Feldwebel Blom, mettez-vous sur la route et arrêtez ces porcs. Celui qui refuse, vous le descendez.
– C’est le plus beau jour de ma vie ! s’exclama Porta. Enfin on va chasser du faison doré et de la poule.
On vit le légionnaire jeter un cadavre aux pieds du lieutenant : aucun doute à avoir, c’était un aveugle qui avait été écrasé, et son camarade amputé gisait non loin de là, le crâne ouvert.
Hurlements de pneus : une Horsch grise freine à mort devant Barcelona, et son occupant, un lieutenant-colonel, saute à terre.
– Qu’est-ce qui vous prend ? Vous osez arrêter ma voiture ? Vous ne voyez pas que j’ai un fanion d’état-major ?
Le lieutenant Löwe s’avança, sa mitraillette pointée vers la poitrine de l’officier.
– J’ai ordre de renforcer mon unité de tout le personnel possible sans égard au grade. Il faut amener ces blessés à l’ambulance, votre voiture contient dix hommes. Les bagages vont être jetés, les trois dames continueront à pied. Je prends le chauffeur comme chargeur. Vous savez conduire, j’imagine ? Sinon, vous venez avec nous et votre chauffeur conduira les blessés.
– Est-ce que vous êtes devenu fou ?
– Videz-moi tout ça ! crie Löwe à Petit-Frère et à Porta qui ne se tiennent pas de joie.
Les trois femmes descendent sur la route mais l’officier saisit son revolver et l’arme.
– Etes-vous las de vivre ? demande ironiquement Löwe. Je vous rappelle la situation : selon l’ordre du Führer, le commandant d’une section combattante est maître dans son secteur. Rentrez votre arme ou je vous fais pendre à l’arbre que voilà.
On fait monter dix aveugles dans la voiture.
– Mon colonel veut-il conduire ou préfère-t-il faire le coup de feu avec nous ?
Sans un mot, le lieutenant-colonel s’empare du volant.
– Pour la bonne règle, continue Löwe, je signale à mon colonel que j’ai noté le numéro de la voiture et que je contrôlerai si les blessés sont bien arrivés à l’ambulance.
La grosse Horsch bondit tandis qu’un concert de remerciements s’élevait du chœur des blessés.
– Dieu merci que vous êtes là, mon lieutenant ! gémit un feldwebel d’infanterie. Ces cochons nous écrasaient sans pitié si nous ne sortions pas assez vite du chemin. Un général, avec quatre poules dans sa voiture, nous a appelés fumier du front !
– Je vais leur apprendre ! gronda Löwe de plus en plus sombre.
Nouvelle colonne qui s’arrête devant Barcelona. Cette fois c’est un officier payeur, les poings serrés, et hurlant de rage.
– Videz les voitures commande le lieutenant.
C’est fait en moins de temps qu’il ne faut pour le dire. On voit sur la route autant de bouteilles que d’élégantes lingeries féminines ; le gros intendant, hors de. lui, bafouille, crie des ordres contraires, mais Löwe fait un signe à Petit-Frère qui s’approche, son gros nagan lui battant la cuisse, et à son poing, le
MPI de Kalashnikov. Le géant repousse son melon gris sur sa nuque, et sans mot dire, soulève de terre le gros intendant comme il aurait fait d’un chiot.
– Tu oses porter la main sur un officier allemand ! rugit l’officier payeur à moitié étranglé.
– Chacun son heure, ricane notre hercule. File ! Sinon c’est nous qui tenons le conseil de guerre.
L’intendant détale avec un nez cassé et quelques dents en moins, mais il a enfin compris que sa vie est en jeu, et non pas ses bagages.
– A qui le tour ? crie Petit-Frère juste au moment où deux motos se fraient un passage dans la colonne qui encombre la route.
– Circulez ! Circulez ! hurle un feldwebel de la feldgendartnerie en brandissant sa mitraillette.
Les plaques bien astiquées de ces chiens luisent, menaçantes, et lancent des éclairs. Suit une Mercédès au grand fanion d’une Kommandantur locale. Barcelona fait un bond de côté.
– Feu ! hurle Löwe.
Je tire. Les projectiles frappent la voiture qui freine brutalement. Sur le siège arrière trône un major général doré sur toutes les coutures, élégante canadienne, galons rouges en pure soie. Jamais nous n’avons vu ça ! Lentement, imposant, il descend de la Mercédès aidé par deux feldwebels obséquieux. Il ajuste avec arrogance son monocle dans son œil gauche ; ses bottes splendides, faites sur mesures, rivalisent d’éclat avec l’or des galons. Signe protecteur à Löwe.
– Venez ici
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