Liquidez Paris !
l’officier d’une voix sourde, la ville va sauter à moins qu’il ne se passe quelque chose d’imprévu. Il faut absolument que vous cherchiez à voir le général von Choltitz.
Le diplomate essuya la sueur qui perlait à son front et vida coup sur coup deux verres de cognac.
– Qui est ce général d’infanterie ? Je n’en ai jamais entendu parler.
– Comment ? Vous avez entendu parler de Rotterdam et de Sébastopol ? Ce fut l’œuvre de von Choltitz. C’est un spécialiste de la destruction des villes ; il appartient à la même école que le Generalfeldmarschall Model. obéissance aveugle. Donnez-lui une hache et dites-lui de se couper la main droite, il le fera.
– Et que dit-on à la Bendlerstrasse ? demanda avec angoisse le diplomate.
Les yeux de l’officier de l’Abwehr luirent derrière ses sombres lunettes.
– On n’y dit plus grand-chose, car la plupart sont pendus aux crochets d’étal de Plötzensee, et si nous ne sommes pas extrêmement prudents, nous y serons nous-mêmes dans pas longtemps. Il vient d’arriver un régiment de chars Z. B. V. qui est cantonné à la caserne du Prince-Eugène et à Versailles. Il est commandé par un major général deux fois dégradé dont la femme est en qualité d’otage à la prison de Moabitt. Le général a le droit d’aller la voir tous les trois mois, et il hacherait menu n’importe qui à cause de cette malheureuse occupante de la cellule 412.
– Ça servirait à quelque chose d’aller le voir ?
– Oui, si vous voulez être fusillé sur l’heure. Le général Mercedes vous prendra immédiatement pour un provocateur de la Gestapo. Il y a quelques mois, il était prêt à arrêter le Pape ! C’est la division de chars la plus dure du monde : le 27 e Panzer Regiment. Notez que nous avons deux régiments de chars qui portent le même numéro ; le régulier est un régiment frère du II e Panzer Regiment de Paderborn, mais tous deux viennent de Sennelager. Si le 27 e Z. B. V. arrive à Berlin, l’amiral Canaris filera au galop sans même prévenir ses proches. Nos régiments de chars sont maintenant coupés en deux, de telle sorte qu’ils semblent avoir doublé. Le Führer aime les gros chiffres ! Le 27 e Z. B. V. est composé de six bataillons sous le commandement d’un major général ; chacun des hommes qui le composent a été gracié de plusieurs années de forteresse, et vous pouvez vous imaginer ce qu’ils donneront lâchés dans les rues de Paris !
Le diplomate se versa un autre cognac.
– Oui, un bain de sang. Si nous pouvions seulement faire élever des barricades par la police unie aux gens de la Résistance ? – Il montra le sergent de ville qui arpentait le trottoir. – Ces types-là sont les noyaux du corps des sous-officiers français ; ils constitueraient une défense pour la ville.
– Je crains que ce ne soit justement ça que cherche Hitler, objecta Bauer pensif. Un bataillon de la brigade Dirlewanger est en route pour Paris et je crois savoir qu’on va s’en servir comme provocateur. Il est composé uniquement de dangereux repris de justice. A mon avis, on ne peut sauver la capitale que de deux façons : d’une part espérer que von Choltitz ne recevra pas l’armement qu’il réclame, d’autre part hâter au maximum l’entrée des blindés américains dans la ville.
– J’aimerais mieux être à Londres qu’ici en ce moment, dit Farin.
L’officier eut un petit rire sec.
– Je le crois volontiers. En Allemagne aussi, il se passe des choses horribles. Mon chef, l’amiral Canaris, a brûlé tous ses papiers. Savez-vous qui a été nommé Oberbefehlshaber de l’Ouest ? Le General-feldmarschall Walter Model qui renifle la trahison à cent kilomètres. Je crois que Hitler lui-même le craint. Il a appris un jour que la cave de Rundstedt contenait soixante caisses de champagne : cinq minutes après, toutes les bouteilles étaient en miettes. Son oreiller, c’est Mein Kampf. Choltitz et lui ne sont plus des hommes mais de véritables robots militaires.
Le diplomate se leva, prit sa serviette et son chapeau.
– Je vais aller présenter mes respects au commandant du Grand Paris. Peut-être pourrons-nous en tout cas lui faire peur. D’une manière ou d’une autre, il faudrait nous procurer une pièce qui deviendrait dangereuse pour lui si elle tombait entre les mains de Model.
– Bonne chance ! Je reste en contact avec vous de la manière habituelle à moins que
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