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L'Ombre du Prince

L'Ombre du Prince

Titel: L'Ombre du Prince Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jocelyne Godard
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multitude
de petites perles aux couleurs vives.
    Les yeux tranquilles de Cachou observèrent un
instant ceux de Satiah larmoyants et rouges et, brusquement, ce fut l’arrêt
complet de sa colère.
    Elle cessa de frapper le sol, suspendit en l’air
un geste rageur et laissa tomber son bras de lassitude. Sans rien ajouter et,
presque comme si rien ne s’était passé, elle monta dans la litière aux côtés de
sa mère. Maâthor et Cachou lui faisaient face.
    — Dis-moi tout, dit-elle à sa mère. Tout.
    Soulagée, Séchât prit sa main dans la sienne.
    Mais, comment pouvait-elle écarter d’elle l’idée
que sa fille ne serait jamais souple et docile ? Pouvait-elle prendre en
main une éducation déjà faite ? Dans quelques années, Satiah prendrait un
époux, Thoutmosis ou un autre.
    Elle serra la main de sa fille.
    — Chaque matin, dit-elle en se tournant
vers elle, nous reviendrons ici, car je ne suis plus Intendante des Artisans.
La pharaonne Hatchepsout m’a nommée Grande Scribe de l’École du Palais. Je vais
en prendre la direction après l’avoir réorganisée, restructurée pour vous
enseigner beaucoup plus que vous ne savez.
    Cachou observait Satiah de ses grands yeux en
amande. Tout était noir chez Cachou, son regard, sa peau, ses cheveux. Mais
aussi, tout était tendre. L’éclat de ses yeux sombres vous prenait dans le
filet de sa candeur.
    — Ainsi, tu continueras à voir tes
compagnes, Mérytrê et les princesses étrangères du harem que je ne connais pas
encore et auxquelles tu es sans doute attachée, Thoutmosis et ses amis. Rien ne
changera vraiment pour toi, si ce n’est que nous vivrons ensemble, toi, moi,
Neb-Amon que je vais épouser dans quelque temps et l’enfant qu’il m’a fait.
    Comme Satiah se taisait toujours, elle reprit
d’un ton identique, calme, posé, qu’elle voulait rassurant.
    — Neb-Amon va ouvrir un hôpital situé à l’arrière
du palais. C’est Hatchepsout qui le lui a demandé. Ainsi, il pourra continuer à
soigner le peuple de Thèbes tout en restant près de la reine.
    Elle porta la main de sa fille à ses lèvres et
les y posa doucement.
    — Peux-tu comprendre tout cela ?
    Satiah vint se blottir contre elle.
    — Voudras-tu me raconter la bataille du
Mitanni où a péri mon père ? Personne n’a pu le faire jusqu’à ce jour et j’étais
trop petite quand mon grand-père est mort. Lui seul pouvait le faire [6] .
    Séchât laissa ses yeux se perdre au loin. C’était
un bien triste matin quand elle avait vu Néhésy descendre de son char pour lui
annoncer la mort glorieuse de son époux alors que dans son ventre grandissait
la vie de sa fille.
    Le Mitanni !
    — Dès ce soir, ma chérie, je te
raconterai la bataille. Je la tiens de Néhésy, le Chef des Armées de sa Majesté
Hatchepsout. Et quand tu sauras tout, tu pourras à ton tour la conter à Thoutmosis.
Aucun de ses compagnons ne pourra jamais l’entraîner dans un tel abîme de
bien-être.
    Satiah soupira. Ses yeux brillèrent d’un éclat
serein, à moins que ce ne soit une intense lumière de joie qui avivât sa
prunelle. Il est vrai que rien ne lui apportait plus de plaisir que l’idée de
satisfaire Thoutmosis.
     
    *
    * *
     
    Méryet avança vers la porte du temple. Elle sentait
une présence dans son dos. Elle fit deux pas encore et brusquement, se
retourna.
    Amenhotep leva le bras et saisit brutalement
celui de Méryet.
    — N’entre pas dans ce temple,
ordonna-t-elle d’un ton sec.
    Méryet la toisa de ses yeux clairs.
    — Pourquoi n’y entrerai-je pas ?
    — Parce que tu es devenue une impie !
s’irrita Amenhotep.
    Méryet voulut se dégager violemment, mais la
main crispée de son adversaire ne lâchait pas son bras.
    — Une impie ! En quoi suis-je une
impie ?
    — Tu profanes ce temple. Tu le salis de
tes intentions corruptrices et vicieuses.
    — Je suis danseuse sacrée. L’oublierais-tu ?
    Un rire brutal, agressif, presque dément vint casser
la suite du propos que s’apprêtait à jeter Méiyet.
    — Une danseuse sacrée ! vociféra
Amenhotep. Toi, une petite prostituée de Memphis qui dansait sur les places
publiques attendant qu’une main vînt chatouiller ta croupe pour obtenir un
oignon ou une poignée de figues.
    Méiyet ne se démonta pas et la colère n’empoigna
ni ses yeux ni son cœur. Depuis son arrivée au temple, elle avait tant entendu
ce propos malveillant qu’elle avait décidé de ne plus l’écouter.

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