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L'Ombre du Prince

L'Ombre du Prince

Titel: L'Ombre du Prince Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jocelyne Godard
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malade, épongeant
son front, ramenant des linges sur son corps, la forçant à boire des potions qu’apparemment
elle refusait d’absorber. De temps à autre, elles échangeaient une parole à
voix basse et hochaient tristement la tête.
    Deux prêtres, le crâne rasé oint d’huile parfumée
et vêtus de leurs peaux de léopard, récitaient des incantations en agitant un
encensoir d’or incrusté de pierres fines. L’odeur douceâtre qui se dégageait
dans la pièce n’était pas désagréable, mais enfumait la malade qui, déjà, respirait
avec peine.
    Nakht, l’astrologue de Moutnéfer, magicien-guérisseur
à ses heures, élevait au-dessus de sa tête un talisman auquel il s’adressait à
voix haute et forte pour tenter de rétablir la vieille femme.
    Dans un angle de la pièce, les médecins impuissants
préparaient des cataplasmes d’origine excrémentielles animales, ils étaient à
base de déjections d’ânes et de chiens, de chiures de mouches additionnées de
sang de lézard, de graisse puante d’hippopotame et de cérumen d’oreilles de
cochon.
    Neb-Amon ne daigna pas s’attarder sur la composition
de ce mélange douteux car jamais, dans sa médecine, il n’avait employé de
moyens superstitieux qui appelaient la magie.
    — Laissez-moi seul avec la malade, ordonna-t-il
sèchement. Que tout le monde sorte, à l’exception de deux servantes.
    La vieille femme avait encore l’esprit lucide,
mais elle était sans forces et gisait molle comme une poupée de chiffon.
    Son visage émacié laissait apparaître de profondes
rides qui sillonnaient son front, descendaient sur les joues et couraient
jusque dans son cou long et maigre. Sa bouche édentée cherchait à s’ouvrir afin
d’aspirer l’ultime parcelle d’air qui l’aidait encore à vivre.
    Dès que Neb-Amon eut posé ses mains sur la
maigre poitrine de Moutnéfer, il diagnostiqua une forte bronchite doublée d’une
pneumonie.
    — Y a-t-il longtemps qu’elle est ainsi ?
questionna le médecin en se tournant vers les servantes.
    — Plusieurs jours, répondit la plus âgée.
    — Qui m’a fait appeler ?
    — Le jeune Prince. Il est entré dans une
violente colère quand il a su que vous n’aviez pas été informé. Il dit que vous
êtes le seul médecin capable de la guérir.
    « Ainsi, pensa aussitôt Neb-Amon, je suis
dans les bonnes grâces de ce jeune homme. » Et il tâta avec précaution
tout le corps de la vieille femme.
    — Apportez un brasero et que l’on fasse
bouillir de l’eau, réclama-t-il. Je vais poser des ventouses pour faire sortir
le flegmon.
    Malgré l’ordre de Neb-Amon pour faire sortir
tous ces impuissants, l’un des médecins de Moutnéfer se précipita vers lui.
    — C’est déjà fait, s’exclama-t-il
offusqué.
    — Alors, je vais le refaire, jeta
Neb-Amon d’un ton tranquille. Car ma méthode n’est sans doute pas la vôtre.
    Puis, il fit absorber à la patiente une potion
d’oxymel et de racine d’iris, complétée par de la ciguë pour combattre la
fièvre et attendit qu’elle en rejetât la totalité dans une toux grasse et expectorante.
Le liquide craché, les servantes nettoyèrent Moutnéfer et l’enveloppèrent de
linges propres.
    Moutnéfer respirait déjà mieux. Elle ouvrit
les yeux et fit signe à Neb-Amon qu’elle se sentait en meilleure forme.
    — Est-ce grave, Médecin ? fit une
voix derrière lui.
    Avant de se retourner, il vit que Moutnéfer tendait
la main vers le nouvel arrivant.
    Neb-Amon n’avait vu que rarement le jeune
Thoutmosis. Certes, il l’avait rencontré lors des processions d’usage, puis à
quelques assemblées où la question médicale était à l’ordre du jour. Mais,
jamais encore, il ne lui avait adressé la parole.
    — Ce médecin m’a déjà soulagé, fit la
vieille femme en serrant la main de son petit-fils qui se courbait vers elle.
    Elle avait encore de la force et de l’énergie,
la vieille Moutnéfer. Dieu ! Qu’elle avait empoisonné l’existence des
concubines du harem au temps du pharaon précédent, son fils, si friand de ces
belles filles qui attendaient chaque soir le bon vouloir du dieu-pharaon.
    Moutnéfer allait jusqu’à inscrire sur une
tablette le nombre de fois qu’il honorait la même concubine. Elle organisait
même certaines nuits où il devait se montrer vigilant, généreux avec l’une de ces
femmes prêtes à accueillir la semence divine pour engendrer un petit mâle.
    N’avait-elle pas arrangé de

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