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L'Ombre du Prince

L'Ombre du Prince

Titel: L'Ombre du Prince Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jocelyne Godard
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médecin.
    Dans la nuit, la malade s’agita. La fièvre
avait repris et Neb-Amon dut reconnaître que l’oxymel avait aussi agi en
purgatif, ce qui n’était pas recommandable pour cette vieille femme qui n’avait
plus que les os et la peau. Le médecin essaya de lui faire absorber un peu de
jus de caroube pour atténuer les coliques, mais elle refusa d’absorber le
liquide.
    — Imprégnez une éponge propre de ce
liquide, dit-il à la plus âgée des servantes qui ne quittait pas Moutnéfer, et
pressez-la entre ses lèvres.
    Puis, il doubla la dose de ciguë qu’il mêla à
de la quintefeuille. Neb-Amon en avait toujours dans sa trousse médicale.
    D’ailleurs à présent, il ne manquait pratiquement
de rien. Sa pharmacopée de plantes était complète, car au palais, il avait
recruté un jardinier qui cultivait celles dont il avait besoin pour son
hôpital.
    Gentiane, ciguë, mélianthe, safran officinal,
pavot, mandragore, hellébore, armoise, mélilot, cardamone, quintefeuille s’alignaient
dans les pots en cuivre prêts à être écrasés, broyés, dilués dans du vin, de l’huile
ou du vinaigre selon que ces plantes devaient servir à faire des potions, des
onguents, des poudres ou des pommades.
    Pots de cuivre, matériel chirurgical,
aiguilles, cuillères, scalpels, fils à recoudre, attelles, tout était compté,
répertorié, nettoyé par l’assistant de Neb-Amon.
    La quintefeuille et le jus de caroube
soulagèrent la malade, mais la toux grasse qui la prit l’épuisa à nouveau et le
médecin dut encore lui poser des ventouses pour calmer l’irritation de son
corps qui s’agitait fortement par à-coups.
    Quand, au petit matin suivant, la toux s’arrêta,
la malade put respirer à nouveau normalement. L’état fut stationnaire toute la
journée suivante. La vieille femme avait des forces souterraines qui
resurgissaient sans que l’on s’y attende.
    Mais, la nuit suivante, son état s’aggrava,
les poumons se congestionnèrent à nouveau, les bronches se bouchèrent et
Neb-Amon comprit qu’elle était condamnée. Il lui administra, cependant, de l’oxymel
et de la racine d’iris pour la faire expectorer.
    L’effet bénéfique fut identique à celui de la
veille, mais de plus courte durée. Bientôt, les remèdes ne feraient plus aucun
effet, la maladie était trop avancée et s’il ne lui administrait pas un
puissant narcotique pour l’engourdir, la lente agonie commencerait avant l’aube
suivante.
    Il fit prévenir Séchât qu’il ne pouvait
rentrer avant que Moutnéfer ne décède. Cela pouvait encore durer un ou deux
jours, trois tout au plus.
    Puis, réfléchissant à son hôpital, il fit
porter des instructions à son assistant afin que ses malades ne soient pas
pénalisés par sa trop longue absence et, enfin, attendit la mort de Moutnéfer
en lui faisant respirer de la poudre d’opium.
    Son cœur cessa de battre deux jours plus tard
sans que la souffrance pénétrât davantage son corps. Quand les pleureuses
arrivèrent et que le momificateur se présenta au seuil de la chambre, Neb-Amon
décida que ce n’était plus là son travail.
    Il avait effectué le sien avec la compétence,
la générosité et le sérieux dont il était capable. La vieille Moutnéfer,
Seconde Épouse de feu Thoutmosis, était entrée au royaume d’Osiris sans souffrances
excessives.
    Épuisé par ces journées et ces nuits de labeur
intense, il prit le chemin de sa maison, respirant l’air d’un petit matin qui s’annonçait
de plus en plus venteux.
    Le khamsin était toujours latent et n’arrivait
pas à se déclarer. Mais, sa présence se sentait à l’horizon dans les tamaris et
les sycomores qui balançaient leurs hautes branches et sur les chemins
poussiéreux qui menaient aux champs les plus éloignés. On le sentait aussi
au-dessus de l’eau des étangs qui frisaient étrangement, attendant patiemment
des ondes plus houleuses.
    Le médecin décida d’emprunter un raccourci qui
débouchait sur l’un des murs extérieurs du temple et qui obligeait le piéton à
prendre la petite porte qui jouxtait le dernier pylône. Un char ne pouvait y
passer, ni même une litière conduite par quatre hommes. Trop étroite, dans ce
pays où tout était gigantesque, cette porte était rarement empruntée.
    Parti dans ses réflexions, Neb-Amon baissait
les yeux. Soudain, un bruit lui fit lever la tête. Une pierre venait de se
détacher du mur. Elle s’écrasa juste à ses pieds, l’obligeant à

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