Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
L'Ombre du Prince

L'Ombre du Prince

Titel: L'Ombre du Prince Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jocelyne Godard
Vom Netzwerk:
soixante-dix jours se décompose déjà au bout de
vingt jours.
    Cette fois, il les avait réduits tous les
trois au silence et aucun d’eux ne l’appela plus « petit médecin de rien
du tout. »
    Enfin, Neb-Amon savourait sa victoire. Depuis
deux ans qu’il était l’objet constant de calomnies et de médisances, se
heurtait en permanence à ces trois êtres incompétents et était sans arrêt
bloqué pour avancer dans la progression de son hôpital, voilà qu’il tenait sa
vengeance.
    Ce n’était pourtant guère dans les habitudes
du sage et pacifique médecin que d’étaler ainsi une fureur extrême. Mais, à
présent que Neb-Amon avait une famille à assumer honorablement, il se devait de
préserver la qualité de son travail.
    — Tu es bien présomptueux, tout à coup,
fit simplement Seddy.
    — Parce que je suis sûr de l’efficacité
de mon labeur et de mes possibilités et que jamais vous ne pourrez me prendre
en faute.
    Il les détailla tranquillement les uns après
les autres, abaissa son regard sur le corps de Moutnéfer que l’âme avait quitté
déjà depuis quelques jours, le ramena sur ses adversaires puis jeta d’une voix
ferme et pesante :
    — Par contre, je ne suis pas doué pour la
dénonciation de mes compatriotes. Je suis médecin et non juge. Aussi, je vous
demande de me laisser travailler en paix et cet entretien n’ira pas plus loin
que les murs de cet hôpital.
     
    *
    * *
     
    Le scribe Djenani semblait savoir tout faire
et, chaque jour, Séchât se félicitait de l’avoir rencontré sur le port d’Edfou
et plus encore de l’avoir fait monter à bord de leur embarcation.
    Les trois barques approchaient de Kom Ombo. L’allure
était lente et incertaine. L’assèchement du fleuve les arrêtait sans cesse et,
depuis Edfou, le voyage s’annonçait de plus en plus périlleux. Hippopotames et
crocodiles s’aventuraient sur les berges, bloquant sans cesse le passage. Les
nombreux îlots qui, d’ordinaire, abritaient les sauriens étaient à sec et les
forçaient à se mouvoir sur le territoire des hommes.
    Dans le sillage des bateaux, traînaient depuis
quelques heures deux crocodiles qui, de temps à autre, ouvraient une gueule
énorme laissant découvrir leurs dents en scies meurtrières.
    Il n’était même plus question de rester appuyé
à la proue du bateau ou sur le bord du bastingage. Cantonnés en son centre,
Séchât et ses enfants observaient l’horizon d’où venaient des nuées de mouches
bourdonnantes qu’il fallait chasser avec les grandes ombelles de papyrus.
    Rekmirê cachait sa déception de ne pouvoir
aller se promener dans les villes dont sa mère lui avait tant parlé. Mais, le
bon sens et la sagesse qu’il tenait de son père lui faisait accepter avec
discernement ce fâcheux contretemps.
    Satiah, par contre, enrageait de ne pouvoir
rafraîchir dans l’eau du fleuve son corps échauffé par le soleil. Seule, la vue
des sauriens qui suivaient l’embarcation calmait l’ardeur de ses caprices.
    Kaméni et Djenani virent l’hippopotame
ensemble. Il traversa lentement la berge et vint se planter au milieu du
fleuve, décidé à ne plus en sortir.
    Les embarcations chargées des animaux et des
denrées alimentaires avaient pris l’arrière de la file. Kaméni avait peut-être
un sens de l’observation très aiguisé – rien ne lui échappait – mais,
il n’était pas des plus habiles à manier la gaffe, le gouvernail ou la voile
et, depuis que Djenani était sur le bateau et que personne ne pouvait plus en
sortir, le jeune homme dépliait la grande voile blanche au moindre souffle du
vent apporté par la nuit et l’embarcation filait quelques heures à plus vive
allure.
    Kaméni et ses deux aides avaient attaché un
gros câble et les trois embarcations reliées entre elles se suivaient au rythme
qu’imposait le sinistre voyage.
    Depuis qu’ils avaient attaché ainsi les
bateaux, les crocodiles s’étaient rapprochés et sillonnaient les bas-côtés, si
bien que leur présence alourdissait davantage la vue qu’en avaient les
passagers.
    — L’hippopotame bouche complètement la
voie ! s’exclama Kaméni.
    — Ne pouvons-nous le contourner ?
suggéra Séchât que l’inquiétude ne quittait plus.
    — C’est impossible, rétorqua Djenani, il
n’y a pas assez d’eau sur les bas-côtés.
    Il fouetta de la main son visage où les
mouches venaient en nombre se poser.
    — Je vais essayer de détourner son
attention sur le

Weitere Kostenlose Bücher