Londres, 1200
et son cousin.
Le templier parut ébranlé en les voyant.
— Seigneur, cria l’ancien garde, tous les
hommes nous suivent !
— J’attends cinquante hommes d’armes,
Adhémar ! lui dit Guilhem, pendant que Thomas le cordonnier détachait les
cordes de la charrette.
Il laissa quand même les templiers encordés entre
eux par le cou.
— Quelles seront vos conditions si le
commandeur Preissac veut négocier ? demanda alors Peyre Adhémar.
— Il n’y a pas de conditions. Vous partirez
d’ici en chemise et pieds nus. Tout ce que vous avez apporté est à moi
désormais.
— Vous payerez ça au centuple ! menaça
le templier.
— Je suis votre seigneur… J’oubliais,
prévenez aussi Preissac que le moulin m’appartient désormais, ainsi que
l’église. Vous avez violé la charte qui vous liait au fief. Je reprends donc
l’alleu.
— Vous n’avez pas le droit ! cria
Adhémar, dans un mélange de désespoir et de rage.
Guilhem s’écarta et fit signe aux prisonniers de
partir. Les pieds déjà transis par la traversée de l’eau glaciale, ils
montèrent en titubant vers la palissade, s’écorchant à chaque pas.
— Robert, peux-tu placer tes archers de telle
sorte que quiconque voulant s’échapper soit abattu ?
— Oui, mais ils peuvent faire sortir
quelqu’un en le faisant descendre par la muraille.
— Je sais, et durant la nuit, on ne verra
rien. Viens avec moi, faisons le tour de l’enceinte. Tu auras peut-être une
idée pour éviter ça.
Robert de Locksley prit Regun Eldorman avec lui
après avoir indiqué à Godefroi, Cédric et Ranulphe où se placer.
La forteresse n’était pas construite sur le point
le plus haut de la butte. Derrière, un nouveau coteau s’élevait après un
dénivelé. Ce tertre était boisé, mais il était possible d’installer là quelques
sentinelles et un archer.
Ils repérèrent ainsi plusieurs endroits où mettre
des factionnaires avant de revenir devant le château.
Fermiers et vilains étaient presque tous arrivés.
Quelques-uns joyeux d’avoir à se battre, mais la plupart mécontents d’avoir
abandonné leur récolte, leur famille et leurs animaux.
Guilhem leur expliqua ce qu’il voulait d’eux. Il
leur distribua des armes prises aux templiers et leur désigna les endroits où
monter la garde. Ils devraient y rester trois jours, aussi allèrent-ils d’abord
au moulin chercher des sacs de farine et des récipients pour faire cuire des
bouillies.
Le château restait silencieux. On n’apercevait
même pas les gardes derrière les hourds fermés. Ce calme inquiéta Bartolomeo
qui avait un tempérament craintif.
— Pourquoi avoir laissé les prisonniers
rejoindre le château, seigneur ? demanda-t-il à son maître. Ils auraient
fait de bons otages.
Ce fut Robert de Locksley qui répondit.
— Tu as entendu Alaric, Bartolomeo ? Les
templiers sont venus demander les redevances aux fermiers, mais ceux-ci ne les
leur ont pas encore données. De plus ils ne s’attendaient pas à notre arrivée,
plutôt à une convocation devant une cour de justice, à Toulouse ou à Bordeaux.
Ils n’ont donc pas de provisions et Guilhem leur a donné dix bouches de plus à
nourrir.
— Je comprends, mais on peut rester plusieurs
jours sans nourriture, et ils peuvent manger leurs chevaux.
— C’est vrai, reconnut Guilhem. C’est pour
cela que je les ai aussi menacés de la corde. Pourtant, s’ils ne se rendent
pas, on coupera la source qui alimente le château en eau.
— Où passe-t-elle ?
— Je ne sais pas exactement. Elle est captée
derrière le château, sans doute profondément. Seulement, creuser nous mettra à
portée de leurs flèches.
— L’important est qu’il n’y ait pas
d’assaut ! fit Bartolomeo, soulagé.
— Si fait, sourit Guilhem. Je ne veux surtout
pas que le château brûle à nouveau ! J’attendrai le temps qu’il faut, mais
ils se rendront. Va maintenant au prieuré. Tu rassureras ta sœur et les autres
femmes. Passe la nuit là-bas et reviens demain.
Il n’y avait en effet pas grand-chose à faire,
sinon relever les sentinelles et organiser des tours de garde. Ils installèrent
leur quartier général au moulin et firent des rondes toute la nuit. Une bonne
heure avant le lever du soleil, on vint réveiller Guilhem.
C’était Aignan le libraire.
— Seigneur ! Seigneur ! Le seigneur
Ranulphe de Beaujame a abattu d’une flèche un homme qui tentait de fuir
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