L'or de Poséidon
de ton copain. Il ne contient rien qui puisse nous aider dans notre enquête. Maintenant que tu nous as fait une déclaration sous serment, si tu veux quitter Rome pour rejoindre ton unité, je n’y vois aucun inconvénient. (Puis, au moment où le centurion s’apprêtait à prendre congé de nous, il ajouta inopinément :) Mais j’ai tout de même deux ou trois questions à te poser.
Laurentius se rassit et son regard se dirigea vers moi.
— Censorinus habitait avec ma mère avant de louer une chambre ici.
Laurentius fit de nouveau un petit signe de tête pour indiquer qu’il était au courant. S’il y avait une certaine appréhension dans son regard, elle pouvait paraître tout à fait naturelle dans ces circonstances.
— Est-ce que c’est là que… ?
Petro acquiesça d’un signe de tête sans cesser de le fixer. Comprenant exactement où il voulait en venir, le visage du centurion afficha une expression de colère contenue.
— C’est la première fois que je mets les pieds ici, déclara-t-il froidement.
Nous le crûmes.
Comprenant qu’il avait passé le test avec succès, il regarda une fois encore autour de lui. Ce n’était plus qu’un homme dont l’ami avait perdu la vie dans cet établissement, et qui s’intéressait tristement à son environnement.
— Quel sinistre endroit pour mourir… (Son regard tomba sur Epimandos qui sursauta et disparut rapidement à l’arrière.) C’est ce serveur qui l’a trouvé ?
— Non, c’est Flora, la propriétaire, en allant lui réclamer son loyer.
— Flora ? (C’était la première fois que j’entendais ce détail.) J’ai toujours été persuadé que Flora était un mythe.
Petronius ne fit aucun commentaire, mais je trouvai un peu bizarre le regard qu’il m’adressa.
Laurentius paraissait de plus en plus misérable.
— Notre séjour à Rome s’est transformé en cauchemar. Je regrette amèrement que nous n’ayons pas renoncé à venir.
— Tu as une permission de longue durée ? questionna fort civilement Petro.
— C’est à peu près ça. J’ai demandé une nouvelle affectation. La Quinzième a été envoyée en Pannonie. Pas question que j’aille là-bas.
— Tu penses être nommé dans une nouvelle légion ?
— Oh, oui ! J’ai besoin d’action. J’ai demandé l’île de Bretagne.
Petro et moi, qui avions servi dans cette province, échangeâmes un regard narquois.
— Tu as l’air confiant.
— Oh oui ! La possibilité d’un nouveau poste est la prime offerte à ceux qui ont tenu le fort en Judée, pendant que les autres accompagnaient Titus à Rome pour son triomphe officiel. (Laurentius me regarda avec un léger sourire.) C’était le principe de Festus, tu sais : « Ne sois volontaire pour rien, sinon pour qu’on t’oublie ! »
— Je vois que tu connaissais bien mon frère ! dis-je en riant malgré moi.
L’atmosphère s’était notablement détendue. Laurentius se retourna vers Petro et demanda sur le ton de la confidence :
— As-tu une idée de ce qui est arrivé à Censorinus ?
— Pas la moindre, répondit Petro. Je commence à me dire qu’il s’agit de l’une de ces rencontres imprévues qui tournent mal. Nous connaîtrons peut-être la réponse un jour, mais j’ai l’impression que ce sera par pur hasard.
— Dommage. C’était un type bien.
— Tu le connaissais depuis longtemps ?
— On se voyait de temps à autre. Il n’appartenait pas à ma centurie.
— Mais vous faisiez partie du même club d’investisseurs ?
Petro n’avait pas élevé la voix et semblait s’intéresser à son vin. Laurentius ne s’y méprit pas pour autant.
— Voilà donc le vrai motif de ce rendez-vous ?
Le regard du légionnaire nous enveloppa tous les deux. Mon ami le capitaine ne chercha pas à noyer le poisson.
— J’ai demandé à Falco d’être présent, parce qu’il a besoin des mêmes réponses que moi. Ton copain a eu une violente dispute avec lui, et, tous les deux, on aimerait bien comprendre pourquoi. Surtout Falco, parce que cette bagarre fait de lui un suspect idéal.
— À tort ? demanda le centurion d’un ton léger.
— À tort, affirmai-je.
— Alors dans ce cas-là, je répondrai à toutes vos questions, capitaine, assura-t-il, en posant calmement ses mains sur la table. J’aimerais pouvoir vous aider à arrêter l’assassin.
— Parfait.
Petronius leva alors la main, et Martinus, qui s’était éloigné sans le perdre
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