L'or de Poséidon
personnalité que je trouvais répulsive. Le peu d’entendement qu’il possédait au départ paraissait s’être délayé quand il avait jeté son dévolu sur ma petite sœur. Heureusement, elle avait assez de pommes dans son panier pour eux deux.
— Fais un effort, Maia. Quand Festus est venu en permission pour la dernière fois, est-ce qu’il a mentionné s’être associé avec des membres de son unité pour importer des œuvres d’art ?
— Non, Marcus. De toute façon, Festus n’aurait jamais rien mentionné d’important devant moi. Il était comme toi à cette époque. Il pensait que les femmes étaient faites pour être enfilées par-derrière, pendant qu’elles se tenaient penchées sur le fourneau pour lui préparer son dîner.
— C’est dégoûtant !
J’étais horriblement vexé.
— C’est ça les hommes, rétorqua-t-elle.
Il faut dire que si Maia n’avait jamais beaucoup apprécié Festus, c’était à cause de la mauvaise influence qu’il avait eue sur moi. C’est vrai qu’il avait le don de faire ressortir mes mauvais côtés, ce qui désolait ma sœur préférée.
— Maia, ne le rabaisse pas inutilement. Festus avait un heureux caractère et un cœur d’or…
— Tu veux dire qu’il fallait toujours que tout le monde lui cède. (Elle, d’habitude si conciliante, demeurait implacable.) Il y a quand même une personne à qui tu devrais parler, Marcus.
— Tu penses à Geminus ?
Maia et moi partagions la même opinion sur notre père. Une opinion peu flatteuse.
— Je pensais à quelqu’un qui pourrait t’aider, pas à quelqu’un qui risque de t’enfoncer davantage ! Je voulais dire Marina.
Marina était la petite amie de mon frère.
— Je sais que je ne vais pas pouvoir y échapper, admis-je sombrement. Elle devrait être au courant de certains détails.
Parler à Marina de la dernière soirée que nous avions passée tous les deux avec Festus était quelque chose que je redoutais particulièrement.
Maia se méprit sur mon expression.
— Quel est le problème ? Elle est idiote, c’est un fait, mais si elle a entendu Festus parler d’une affaire quelconque, elle ne fera aucune difficulté pour te dire ce qu’elle est capable de se rappeler. Et par Junon, Marcus, elle peut se montrer reconnaissante.
Il est vrai qu’après la mort de mon frère, j’avais fait un effort pour empêcher Marina et sa petite fille de mourir de faim. Puis, Marina n’avait pas tardé à remplacer Festus dans ses affections par toute une kyrielle de jeunes hommes.
— Tu veux que je vienne avec toi ? proposa Maia. J’arrive toujours à faire entendre raison à Marina.
— Non, ne t’inquiète pas de ça.
Ma sœur paraissait bizarrement ignorer la vraie raison de mes hésitations. C’était très surprenant, parce que le scandale était loin d’être resté secret. La petite camarade de lit de mon frère avait pris un malin plaisir à mettre toute la famille au courant. Lors du dernier soir que Festus avait passé à Rome, la veille de son départ pour la Judée, il nous avait abandonnés tous les deux ensemble, et je préférais ne plus penser à ce qui en avait découlé.
La dernière chose que je souhaitais aujourd’hui, surtout pendant que j’habitais avec Helena chez ma mère, c’était exhumer cette vieille histoire. Helena Justina possédait de hautes valeurs morales. Jamais elle ne me pardonnerait d’avoir couché avec la maîtresse de mon frère.
Seulement, je connaissais bien ma famille. Je pouvais être certain qu’à l’instant même où je broyais du noir dans l’appartement de Maia, en essayant de ne plus penser à cette sordide histoire, une âme charitable était en train de la raconter à Helena.
13
Maia vivait aussi sur l’Aventin, à deux rues de chez ma mère. Et pas loin de là habitaient d’autres membres de la famille que j’avais également besoin de voir : la maisonnée de ma défunte sœur Victorina. Je ne comptais pas sur ce genre de visite pour faire avancer mon enquête, mais étant devenu chef de famille en fait sinon en titre, j’étais tenu d’accomplir mon devoir. Et, avec une condamnation pour meurtre suspendue au-dessus de ma tête, j’avais intérêt à passer chez eux dès que possible, car on pouvait m’arrêter à n’importe quel moment.
Victorina et Mico, son ennuyeux mari, avaient construit leur nid à côté du temple de Diane. Ma sœur, qui n’avait jamais dédaigné se rendre derrière le
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