L'or de Poséidon
vins à son secours :
— L’aînée n’a pas beaucoup fréquenté l’école. Les temps étaient durs.
— Mais Maia et toi n’avez pas manqué un seul trimestre ! s’écria-t-il avec enthousiasme.
Pas étonnant qu’il n’ait pas oublié, nous étions probablement les deux seuls de tout l’Aventin à venir à l’école régulièrement.
— Oui, nos frais d’inscription étaient régulièrement payés.
— Par le vieux monsieur qui logeait chez ta mère, se crut-il obligé de me rappeler.
— C’est bien ça. Il pensait qu’il serait autorisé à nous adopter. Alors s’il nous envoyait à l’école, c’était pour avoir des héritiers instruits.
— Et est-ce qu’il vous a adoptés ?
— Non. Mon père n’a pas voulu en entendre parler.
Et les souvenirs se mirent de nouveau à affluer. Pour quelqu’un qui avait montré si peu d’intérêt envers ses enfants après les avoir engendrés, mon père pouvait faire preuve d’une extrême jalousie et d’une grande méchanceté. Si Festus et moi commettions une bêtise, il brandissait tout de suite la menace de nous vendre comme gladiateurs. Et pourtant, il n’en rejeta pas moins cette offre d’adoption. Je me rappelais fort bien l’entendre clamer que les plébéiens nés libres ne faisaient pas des enfants pour le bon plaisir des autres.
Il ne supportait pas que Maia et moi fréquentions l’école aux frais du locataire, et il se disputa violemment avec ma mère à ce sujet. Peu de temps avant de disparaître définitivement de notre vie. Ma jeune sœur et moi devînmes alors la cible des autres qui tenaient à ce que nous nous sentions responsables.
Après ce jour fatal où papa partit pour une vente à l’encan et ne retrouva pas le chemin de la maison, maman garda son locataire. Mais quand il eut compris qu’une adoption ne serait jamais possible, il tomba malade et mourut. Avec le recul, je trouve cet épisode triste, mais à l’époque j’étais trop en colère contre lui.
— Je crois deviner, Marcus Didius, que tout n’allait pas pour le mieux ?
— C’est vrai. Ce vieil homme a également été source d’ennuis.
— Ça alors ! Moi qui ai toujours supposé que Maia et toi viviez au sein d’une famille heureuse.
C’est bien ce qui prouve que les professeurs ne connaissent rien à rien.
Je serrai mon gobelet de vin entre mes mains en repensant à cette période de ma vie. Je revoyais mon père en train de rager contre le vieil usurier et tous ses semblables. Ma mère rétorquait qu’elle avait besoin de l’argent de son loyer. Plus tard, Geminus en vint à clamer que si le vieux tenait tellement à acquérir des droits sur Maia et moi, c’est qu’il nous avait fabriqués lui-même. Il le disait en face de lui, comme s’il s’agissait d’une bonne plaisanterie. (Un seul coup d’œil permettait de réfuter ses sous-entendus déplacés. Ma jeune sœur et moi possédions la physionomie Didius.) Mais le vieil homme était prisonnier d’une situation stupide. Il est vrai qu’il avait tellement envie d’avoir des enfants que, par moments, il finissait par croire que nous étions à lui.
Pour qui connaissait tant soit peu ma mère, c’était complètement impossible.
Je détestais le prêteur sur gages. J’avais fini par me convaincre que sans sa présence chez nous, mon oncle Scaro m’aurait adopté. Au courant des disputes qui avaient lieu à ce sujet, il n’avait pas osé se manifester.
Je voulais être adopté. Dans le cas où mes véritables parents ne me réclameraient pas. Car je savais, comme tous les enfants, que je ne pouvais en aucun cas appartenir aux pauvres âmes qui m’élevaient temporairement. Un jour, j’en étais certain, je finirais par regagner mon palais. Ma mère était l’une des Vestales, et mon père un mystérieux prince étranger qui voyageait sur les rayons de la lune. J’avais été trouvé sur la berge du fleuve par un vieux gardien de chèvres honnête. Une prophétie avait annoncé que je serais délivré de la vie difficile et perturbée que je menais…
— Tu as toujours été le plus rêveur de toute la bande, m’assura mon ancien professeur. Mais je plaçais tout de même de l’espoir en toi. Tu étais assez bon en géométrie pour devenir professeur…
— Pour crever de faim ? répliquai-je d’un ton furieux. Remarque que je ne gagne pas plus d’argent en étant détective privé. Mais les problèmes qu’on me pose sont différents.
— Eh
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