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L'Orient à feu et à sang

L'Orient à feu et à sang

Titel: L'Orient à feu et à sang Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Harry Sidebottom
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tenues par les Romains en amont. La descente du fleuve sur une cinquantaine de milles n’avait pas été une promenade de santé. Les cavaliers sassanides étaient présents en nombre sur les deux berges. Heureusement pour l’équipage, l’Euphrate, bien que sinueux, était assez large pour que le bateau se tînt hors de portée de flèches pendant la majeure partie du voyage. Il amarra en face de la Porta Aquaria le 9 juin. L’ironie voulût que le jour des Vestalia fût une fête pendant laquelle les boulangers étaient en congé.
    L’équipage semblait quelque peu désappointé. Ayant couru des risques considérables, il s’était attendu à un accueil plus triomphal. Pourtant, à bien des égards, l’arrivée du bateau fut vécue comme une sorte déception par la garnison assiégée d’Arété. Sa cargaison de grain était bienvenue, mais pas essentielle. Lorsqu’on avait vu le bateau s’approcher, tout le monde avait espéré qu’il amènerait des renforts. L’équipage de dix légionnaires transférés de la Legio IIII était bien loin de répondre aux attentes.
    Ballista, qui n’avait jamais vraiment cru à l’arrivée de renforts, avait cependant espéré que le bateau acheminerait des lettres. Il y en avait une. Elle émanait du gouverneur de Cœlésyrie, son supérieur tout symbolique. Elle était datée de près d’un mois auparavant et avait été écrite sur la route d’Antioche. « Aucun risque de rencontrer de vilains Perses là-bas », comme l’avait dit Demetrius d’un ton acerbe.
    La lettre se voulait porteuse de merveilleuses nouvelles. L’empereur Gallien, ayant écrasé les Barbares sur le Danube, avait élevé son fils aîné, Publius Cornélius Licinius Valerianus, à la dignité d’empereur. Le nouveau César resterait sur les bords du Danube pendant que le très vénérable Augustus Gallienus parcourrait la région du Rhin. En Asie Mineure, les dieux avaient manifesté leur amour pour l’empire, un amour engendré par la piété des empereurs, en provoquant la crue du fleuve Rhyndacos [79] et en sauvant par-là même la ville de Cyzique d’une attaque des pirates goths.
    La lettre du gouverneur ne contenait rien d’autre, à part des conseils et encouragements éculés : « Restez sur vos gardes, continuez à œuvrer pour l’empire, rien ne vaut la disciplina. » Ballista avait espéré un message des empereurs, quelque chose à l’encre pourpre orné du sceau impérial qu’il pourrait montrer pour remonter le moral des troupes, quelque chose qui annoncerait le déploiement certain d’une armée de campagne impériale, l’arrivée imminente de renforts, peut-être même la date prévue de la levée du siège. Être informé que la bonne vieille virtus romaine prévaudrait toujours n’était pas d’une grande utilité.
    Une conversation privée autour de quelques coupes de vin avec les légionnaires du bateau mit les « merveilleuses nouvelles » en contexte et peignit un tableau beaucoup plus sombre de la situation générale. Loin d’avoir écrasé les Barbares sur le Danube, Gallien avait dû acheter la paix aux Carpes, la tribu qu’il combattait, afin de se rendre dans la région du Rhin où Francs et Alamans provoquaient des ravages. Le nouveau César n’était qu’un enfant, un symbole laissé au bord du Danube où le vrai pouvoir était aux mains du général Ingenuus. La crue du Rhyndacus avait peut-être sauvé Cyzique, mais rien n’avait empêché les Goths de mettre à sac les villes de Chalcédoine, Nicomédie, Nicée, Pruse et Apamée. Toute l’Asie Mineure était menacée. Le général Félix accompagné par le grand ingénieur de siège Celsus, avaient été envoyés pour protéger Byzance. Valérien, lui-même, à la tête de la principale armée de campagne était entré en Cappadoce pour tenter de bouter les Goths hors de l’Asie Mineure.
    Aussi déplorables que fussent les nouvelles des affaires publiques, Ballista était plus déçu encore qu’il n’y eût pas de lettre de Julia. Sa femme lui manquait beaucoup. Qu’une lettre d’elle écrite à Rome ou en Sicile fût parvenue jusqu’aux confins orientaux de l’ imperium, à Circesium puis sur le bateau, relevait du domaine du possible. Julia y aurait joint comme toujours un dessin de leur fils, un gribouillage d’une telle abstraction que seul le garçonnet aurait pu dire ce qu’il représentait. Cela faisait dix mois que Ballista n’avait pas vu son fils. Il devait avoir

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