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L'Orient à feu et à sang

L'Orient à feu et à sang

Titel: L'Orient à feu et à sang Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Harry Sidebottom
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pas au sommet de sa profession. Il tenait la flèche à deux mains ou plutôt il tendait les deux bras, paumes en l’air, la flèche reposant dessus. Toute son attitude semblait dire : « Je n’ai rien à voir là-dedans. »
    Voyant que le médecin n’allait pas s’approcher, Ballista s’avança lentement. Sans faire de mouvement brusque, comme s’il avait affaire à un cheval rétif, il se saisit de la flèche et se mit à l’examiner attentivement. Au premier abord, elle semblait tout à fait ordinaire : environ deux pieds et demi de long, avec une pointe barbelée à trois lames d’environ deux pouces. Sur cette dernière, on voyait encore du sang et des restes de chair. Comme toutes les flèches orientales, le fût était composé de deux parties ; la première, au bout de laquelle se trouvait l’empennage, était en bois et allait en s’amincissant. Elle était fixée à une tige de roseau plus longue. La jonction était renforcée par un lien de tendon animal. Le fût était décoré de trois anneaux peints, un noir et deux rouges. Ce qu’il restait des trois plumes formant l’empennage n’était pas coloré, mais d’un blanc naturel. « Probablement des plumes d’oie », pensa Ballista.
    Le fût de la flèche comportait diverses coupures et entailles, sans doute les traces laissées par les instruments crochus et hideux, quels qu’ils fussent, dont le médecin s’était servi pour l’extraire. Mais ce qui la rendait si particulière et potentiellement si intéressante, c’était la bande de papyrus qui s’en détachait. Elle avait été enroulée tout au bout de la flèche, les plumes de l’empennage collées dessus. Elle mesurait environ trois pouces de long sur un demi de large. L’envers était couvert de caractères grecs, l’écriture petite et nette. Il n’y avait pas de ponctuation, mais rien de plus normal. Ballista essaya de la lire sans parvenir à isoler un mot. Ce n’était qu’une suite apparemment aléatoire de lettres grecques. Il détacha le message codé et le tendit à Demetrius.
    — De qui as-tu extrait cette flèche ?
    Le médecin avala sa salive avec effort.
    — Un soldat du numerus d’Ogelos, Kyrios, un des conscrits.
    L’homme se tut. Il était en sueur.
    — Pourquoi est-il venu te voir ? Deux de ses collègues soldats l’ont amené, Kyrios. Ils l’avaient d’abord emmené voir le médecin du numerus, mais il était ivre.
    L’homme se redressa.
    — Je ne me soûle jamais, Kyrios.
    L’homme rayonnait, mais il suait toujours.
    — Et sais-tu où il se trouvait lorsqu’il a reçu la flèche ?
    — Oh oui ! Ses amis me l’ont dit. Ils disaient qu’il avait toujours été malchanceux. Il n’était pas sur la muraille, même pas de garde. Ils avaient bu au Cratère pendant toute la soirée. Ils retournaient dans leurs quartiers, dans la tour à l’est de la poterne. Ils traversaient l’esplanade quand, vlan, une flèche tirée par-dessus le mur sud lui est arrivée dessus, dans le noir, et lui a transpercé l’épaule.
    — Il a survécu ?
    — Oh oui ! Je suis un très bon médecin.
    Son ton semblait néanmoins suggérer que l’issue heureuse de l’incident l’avait surpris.
    — Je vois ça.
    Ballista s’approcha. Cette fois-ci, il se tenait tout près de lui, cherchant à l’intimider par sa taille.
    — Tu ne parleras de ça à personne, tu m’entends ? Si j’apprends que tu en as parlé…
    Il laissa la menace en suspens.
    — Non, à personne, Kyrios. Je ne dirai rien.
    — Bien. Donne le nom du soldat et celui de ses amis à mon secrétaire, et tu es libre de partir. Tu t’es comporté comme un bon citoyen, c’est très bien.
    — Merci, Kyrios, merci beaucoup.
    Il se hâta de rejoindre Demetrius qui avait déjà son stylet en main.
    On entendit le souffle d’un gros projectile déchirant l’air, ponctué par un énorme choc. Le médecin sursauta. Un filet de poussière de plâtre se détacha du plafond. Le duel d’artillerie durait maintenant depuis six jours. Il était clair que le médecin ne tenait absolument pas à se trouver si près des lignes, dans cette maison réquisitionnée derrière la muraille ouest. Dès qu’il eut balbutié les noms des soldats, il s’enfuit précipitamment.
    Demetrius replia sa tablette à écrire et l’accrocha à sa ceinture. Il ramassa le papyrus et se remit à l’étudier. Ballista traversa la pièce et servit à boire. Il donna une coupe à Mamurra, Castricius et

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