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Louis Napoléon le Grand

Louis Napoléon le Grand

Titel: Louis Napoléon le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Philippe Séguin
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portées contre le style architectural du second Empire. Louis Napoléon et Haussmann auraient confondu le grand et l'énorme, le bon goût et la richesse, le respect du passé et le pastiche. Quelle meilleure réponse à apporter que cette admiration universelle pour l'incontestable beauté de Paris, le Paris d'aujourd'hui dont on ne peut écarter, car il est présent partout, l'héritage de Louis Napoléon.
    Mais le principal chef d'accusation, le seul contre lequel il est difficile de plaider, est celui de la scission qui s'opère progressivement entre un Paris riche et un Paris populaire. C'est un fait que les ouvriers n'ont pas les moyens de loger dans les nouveaux immeubles, aux loyers élevés, et se trouvent rejetés vers la périphérie, en particulier vers l'Est parisien, quand ce n'est pas vers la banlieue. Un ouvrier, Corbon, a décrit cette évolution:« La transformation de Paris ayant fait refluer forcément la population de Paris vers les extrémités, on a fait de la capitale deux villes: une riche, une pauvre. Celle-ci entourant l'autre. La classe malaisée est comme un immense cordon enserrant la classe aisée. »
    C'est là un échec. Échec dont on s'aperçoit, après coup, qu'il était d'autant plus difficile à éviter que, depuis plus d'un siècle, personne n'a trouvé la parade. En tout cas, Louis Napoléon eut conscience d'un mal dont il ne cessa de chercher le remède. Nul, après lui, n'y mit sans doute autant de moyens.
    L'Empereur souhaitait en effet parvenir à un équilibre entre l'Est et l'Ouest, autant qu'entre la rive droite et la rive gauche. S'il s'employa à faire du bois de Boulogne un nouveau Hyde Park, il prit bien soin d'en créer le pendant avec le bois de Vincennes. De même, il rêva de faire de la place du Trône le symétrique de l'Étoile. N'y édifia-t-on pas en 1862 une structure décorative provisoire, qui devait être pour le second Empire l'équivalent de ce que représente l'Arc de triomphe pour le premier? Le bilan des investissements réalisés dans les nouveaux arrondissements de l'Est parisien a de quoi impressionner : soixante-dix écoles, quinze églises, synagogues et temples, deux grands hôpitaux, sept marchés... et neuf casernes.
    Au reste, Louis Napoléon tenta d'appliquer loyalement à Paris sa stratégie du logement ouvrier: il rêvait de maisons ouvrières modernes, hygiéniques, à des prix en rapport avec les salaires.
    Ses rêves ne se sont pas tous concrétisés. Il reste que, partout dans Paris, il aura amélioré l'habitat, apportant l'air, l'eau, et la lumière. Est-ce si négligeable?
    L'oeuvre est certes inachevée. Mais à qui la faute? Il manquera deux pavillons aux Halles. Le percement du boulevard Haussmann ne sera pas conduit jusqu'à son terme... Bien des projets resteront dans les cartons. Pourtant l'empreinte laissée sur la capitale est considérable, tangible, indélébile.
    On a assez dit que le Paris de 1852 était celui du siècle précédent. Qui ne voit, en se promenant dans les rues de la capitale, que celui de Louis Napoléon est encore le nôtre?
    Sur ce plan au moins, justice ne peut-elle lui être rendue?
    ***
    Son bilan, son compte rendu de mandat, Louis Napoléon eûtcertainement souhaité pouvoir le dresser lui-même. Sans doute prévoyait-il que l'on chercherait à le dénaturer ou à en minimiser les aspects positifs. En 1868, décontenancé par l'agressivité des attaques qui l'empêchaient de gouverner, il souhaita prendre rendez-vous avec l'Histoire. Il jeta donc sur le papier le plan d'un roman qu'il n'aura pas le temps d'écrire.
    C'est l'histoire d'un Français, M. Benoît, parti en 1847 pour l'Amérique. M. Benoît a parcouru le nouveau continent depuis l'Hudson jusqu'au Mississippi. De temps en temps, il a reçu quelques informations, plutôt malintentionnées, sur la situation de la France. Voulant se rendre compte par lui-même de la réalité des choses, il décide un beau jour de revenir au pays et débarque à Brest. Que voit-il? Que ressent-il devant toutes ces transformations dont il n'avait pas entendu parler outre-Atlantique?
    Louis Napoléon ébauche ainsi lui-même la description de l'oeuvre accomplie sous son règne. Il en écrit seulement les têtes de chapitre, les événements et la mort ne lui ayant pas laissé le temps de rédiger le reste. Tel quel, ce simple plan a l'allure d'un testament politique.
    Découvrons l'énumération à laquelle il procède; on comprend bien ce dont il fut le

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