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Louis Napoléon le Grand

Louis Napoléon le Grand

Titel: Louis Napoléon le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Philippe Séguin
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tenace.
    « Il me fait la route », commente simplement le prince, à Londres, en apprenant les exploits de Cavaignac. Est-il ému de la boucherie? C'est probable. Ce qui est sûr, c'est qu'il n'est pour rien dans tout ce qui s'est passé. Aurait-il suivi Louis Blanc, s'il avait été à Paris? La question n'est pas dépourvue de sens. Après tout, il avait des partisans au sein de l'insurrection, au point que certains n'ont pas hésité à l'accuser de l'avoir fomentée, ce qui est absurde. De toute façon, présent, il n'aurait eu le choix qu'entre deux mauvaises solutions : se laisser entraîner et figurer parmi les vaincus, être arrêté, peut-être, sans doute; ou bien, accepter la répression et figurer parmi les bourreaux.
    Absent, il n'est compromis avec personne. Il devient un recours. A défaut de pouvoir se présenter immédiatement comme l'artisan d'une réconciliation impossible, il n'est du moins rejeté absolument ni par les uns ni par les autres.
    Mais il attend encore, et s'en explique au général Dufour: « J'ai la ferme conviction qu'avant de pouvoir établir quelque chose de solide, il faut laisser aux utopies et aux passions le temps de s'user. »
    Entre-temps, l'essentiel est d'éviter de se compromettre. Il en avertit ses partisans, comme dans cette lettre à Persigny : « Aucun de vos discours ne doit faire croire à une ambition autre de ma part que celle de servir mon pays suivant l'ordre des choses établi. »
    En septembre, enfin, les conditions lui semblent réunies pour reparaître. La préparation de la nouvelle constitution va entrer dans une phase active. Il est temps d'entamer le processus. Après, il risque d'être trop tard.
    De nouvelles vacances s'étant produites, des élections législatives sont organisées les 17 et 18 septembre. Il se porte candidat dans treize départements. Cette fois, il est élu par cinq d'entre eux: les quatre qui l'avaient déjà désigné, auxquels vient s'ajouter la Moselle. Dans le département de la Seine, il est en première position. Maintenant, il va falloir compter avec lui.
    Il a évidemment veillé à adapter son discours. Il ne s'agit pas de revenir sur ce qu'il a dit, mais de faire preuve de prudence entenant compte de l'environnement politique qui a sensiblement évolué.
    La lecture de deux affiches successives, l'une établie pour les élections du 4 juin, l'autre pour celles de septembre, donne la mesure de l'effort d'adaptation qui est consenti.
    Avant juin, on est tout feu tout flammes, on est en plein ouvriérisme, on explique que voter Louis Napoléon, « c'est protester contre les traités de 1814 et 1815, et c'est faire acte de protestation contre l'étranger qui a proscrit Napoléon et sa famille. En nommant Louis Napoléon Bonaparte, les ouvriers témoigneront de leur reconnaissance d'avoir pensé à eux alors qu'il était dans les cachots de Ham, s'occupant de l'amélioration du sort de la classe ouvrière, en faisant publier son ouvrage sur le paupérisme, ouvrage saisi par la police de Louis-Philippe ».
    En septembre, ce n'est plus le sort des ouvriers qui est mis en avant — sans pour autant qu'ils soient oubliés : c'est la nécessité d'une large réconciliation; privilégier les uns par rapport aux autres, ce serait prendre le risque d'opposer les uns et les autres : « La manière dont se préparent encore les élections de Paris, en partageant la société en deux classes hostiles peut causer de nouveaux malheurs, de nouvelles catastrophes... Citoyens, il est un nom qui vibre au coeur de trente-cinq millions d'hommes, un nom qui est tout un symbole d'ordre, de gloire, de patriotisme. Celui qui a l'honneur de le porter aujourd'hui a gagné la confiance et l'affection du peuple par toute une jeunesse d'études, de souffrance, de courage et d'adversité. Eh bien! Que l'élu du peuple soit aussi l'élu du commerce, de l'industrie, de la propriété. Que son nom, accepté par tous, soit un premier gage d'oubli, de réconciliation; car sans la réconciliation des classes, plus de paix, plus d'industrie, plus de crédit, mais la misère et l'anarchie. »
    ***
    Le 24, il est à Paris. Cette fois, il n'est plus question de repartir. Il est là pour s'installer et pour gagner.
    Afin que nul n'en doute, il loue deux étages à l'hôtel du Rhin, sur la place Vendôme, bien sûr, place qui est décidément, à ses yeux, le haut lieu du bonapartisme. Le mois n'est pas achevé que le voilà à son banc à l'Assemblée. Par sa

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