Louis XIV - Tome 1 - Le Roi soleil
décembre 1666, au terme d’une année aussi importante pour lui que celle de la mort de Mazarin, il y a cinq ans déjà, de grandes fêtes auxquelles toute la Cour sera conviée.
Il y verra Athénaïs de Montespan, et il y dansera avec toutes les femmes du « jardin », ces suivantes de la reine, le Ballet des Muses.
Et le temps sera venu de choisir parmi elles celle qui remplacera Louise de La Vallière.
34.
Louis est devant son miroir.
Il écarte, en levant à peine la main, les valets qui s’affairent autour de lui.
Il avance d’un pas. Il se cambre.
Il lisse du bout des doigts la fine moustache qui désormais ombre sa lèvre et dont il colle les extrémités avec un peu de cire.
Il veut être le plus martial des officiers de cette armée de soixante-douze mille hommes, Français et mercenaires suisses et lorrains, dont il va prendre la tête pour la conduire dans les Pays-Bas espagnols, en Brabant, et peut-être plus tard en Franche-Comté.
Il a fait adresser à tous les monarques et princes d’Europe ce Traité des droits de la reine sur divers États de la monarchie d’Espagne.
Il faut qu’on sache qu’il veut prendre sa part de l’héritage du roi d’Espagne, auquel il a droit, en vertu du traité de mariage de Marie-Thérèse avec lui, et d’un droit de dévolution qui accorde aux enfants du premier lit la propriété des biens paternels.
Il est temps qu’il cesse d’être seulement ce que les gazettes des Pays-Bas espagnols, du Brabant, des Provinces-Unies, de Franche-Comté, appellent un « roi des revues », et qu’il devienne un « roi de guerre ».
Il est prêt.
Il a vu se présenter à la Cour des gentilshommes venus de tout le royaume, le suppliant de leur permettre de lever à leurs frais des recrues, des compagnies nouvelles ou bien de ranimer les vieux corps de troupe.
À cet instant, il a mesuré combien la guerre était le cœur même de l’activité d’un roi qui veut être grand.
Tout ce qu’il avait entrepris jusqu’alors comptait peu au regard de la renommée qu’allaient lui donner la guerre, la conquête de villes et de provinces par les armes.
Il s’est pourtant soucié de la prospérité du royaume, favorisant la création de compagnies commerciales et de manufactures.
Il a voulu, en visitant celle des Gobelins, montrer l’importance qu’il attachait à leur activité.
Il a protégé le royaume en multipliant par deux les droits d’entrée des marchandises étrangères, et cela a provoqué la colère des Anglais, des Hollandais, dont il vient d’apprendre qu’ils se sont coalisés avec la Suède pour former une triple alliance contre lui.
Il a négligé leurs menaces, approuvé Colbert qui a décidé de mettre sur pied une Compagnie des Indes orientales, créant pour elle le port de Lorient, comme il a ouvert en Méditerranée celui de Sète. Et les travaux d’un grand canal, reliant les deux mers depuis le port jusqu’à Toulouse, ont commencé.
Tout cela était nécessaire pour le bien du royaume et celui des sujets.
Il a eu le souci de voir partout dans le royaume régner justice et sécurité. Il a promulgué un Code Louis rassemblant les principales lois, les règles de procédure. Et il a voulu que les villes cessent d’être des coupe-gorge fangeux.
Il a nommé à Paris un lieutenant général de police, Gabriel Nicolas de La Reynie, disposant de pouvoirs s’étendant à tous les domaines d’activité, l’ordre public, le nettoiement des rues ou l’impression des libelles, la surveillance et l’espionnage de tous les lieux. À cette fin, La Reynie utilisera des espions des rues, ces « mouches » voletant dans tous les milieux, rapportant ce qu’ils y trouvent, y entendent, et apprenant ainsi que des dames de la Cour se rendent de plus en plus fréquemment chez cette devineresse, la Voisin, et que certaines d’entre elles participent à des messes sataniques, leurs corps dénudés servant d’autel à des prêtres devenus suppôts et adorateurs du diable.
Et Louis a voulu que La Reynie le tienne chaque jour informé de ce qui se trame dans ces bas-fonds ou au parlement de Paris. Et que le lieutenant de police n’hésite pas à arrêter, à demander une lettre de cachet afin que le suspect, le coupable, soit enfermé à la Bastille.
Les criminels, voleurs, assassins, malfaiteurs doivent être roués ou pendus sans délai. Des troupes placées à chaque carrefour afin que l’on puisse circuler dans les rues,
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