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Ma mère la terre - Mon père le ciel

Ma mère la terre - Mon père le ciel

Titel: Ma mère la terre - Mon père le ciel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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Noire —, une vieille femme qui vivait avec un petit-fils déjà adulte, quelqu'un qui serait peut-être parti pour la montagne, l'hiver prochain, afin de laisser davantage de nourriture à sa famille. La femme n'était pas morte depuis longtemps. Elle gisait sur le côté, son corps n'était pas enflé et les mouches commençaient seulement à voleter autour de ses yeux et de sa bouche.
    Elle portait un suk en fourrure, un vêtement qu'elle avait sans nul doute préparé pour son dernier voyage ; il était trop richement décoré pour être porté tous les jours ; les plumes et les coquillages dessinaient un motif sur les manches et différentes fourrures brunes, dorées, noires et blanches formaient un dessin autour du cou, du bas des manches et de l'ourlet.
    Aile Noire avait-elle proféré ces cris ? Peut-être était-ce celui des mouettes? Ne voulant pas rester seule, Chagak avait-elle imaginé que ces cris d'oiseau étaient humains?
    La jeune fille soupira en pensant au long et difficile retour au village. Un autre corps à porter dans un ulaq. Elle se retourna pour redescendre afin d'aller chercher la peau de lion de mer qu'elle avait utilisée pour transporter les corps.
    Mais à mi-chemin elle entendit à nouveau le même cri et elle fut certaine qu'il ne provenait pas d'un oiseau. Elle courut en haut de la colline et cette fois elle retourna le corps d'Aile Noire. Il y avait une grosseur sous le suk de la vieille femme et à nouveau un faible cri retentit.
    — Un bébé, murmura Chagak tandis que son cœur battait la chamade.
    Elle glissa la main à l'intérieur du suk et en sortit un bébé. C'était Pup.
    — J'ai cru qu'ils t'avaient enlevé ! s'écria Chagak qui sentit ses jambes défaillir.
    Elle tomba à genoux et, comme si elle avait retrouvé son frère mort, elle fut secouée de sanglots si violents qu'elle eut l'impression que son esprit allait s'envoler. Elle serra le bébé contre sa poitrine et à travers ses larmes elle s'adressa à Aile Noire :
    — Tu es une mère courageuse, toi la grand-mère de notre peuple.
    Chagak glissa Pup sous son propre suk en le berçant dans ses bras tandis qu'elle retournait vers l'ulaq de son père.
    Elle étendit l'enfant sur une peau de fourrure et nettoya son corps avec de l'huile de phoque. Il avait des graines de baies sur les lèvres et, chaque fois que les doigts de Chagak passaient sur sa bouche, il essayait de les sucer. Depuis les quatre mois de sa naissance, il était devenu gras et dodu, mais maintenant il paraissait plus petit, ses jambes et ses bras étaient devenus aussi menus qu'à sa naissance. Chagak enveloppa la partie inférieure de son corps dans de la mousse et du duvet puis le recouvrit d'une peau de phoque en mettant la fourrure à l'intérieur.
    Enfin elle mâcha un morceau de viande de phoque séchée de façon à l'amollir suffisamment, le mélangea avec de l'eau pour en faire une sorte de pâte et laissa le bébé le sucer au bout de ses doigts.
    Il mangea lentement. Ensuite Chagak lui fit boire plusieurs gorgées d'eau. Tout d'abord cela le fit tousser, mais finalement il parut satisfait et Chagak le posa dans son berceau, une sorte de hamac suspendu aux poutres dans la chambre de sa mère.
    Quand son frère se fut endormi, Chagak retourna auprès d'Aile Noire. Son corps ne portait aucune blessure et elle en conclut qu'elle était morte de chagrin, d'épuisement et de son grand âge. Elle tira le corps jusqu'à l'ulaq de son père, bien que la distance fût plus grande que jusqu'à celui d'Aile Noire, mais Chagak considérait maintenant la vieille femme comme un membre de sa famille. D'une façon ou d'une autre, Aile Noire avait trouvé Pup et l'avait caché pour le soustraire au massacre. Il était juste qu'elle eût sa place dans la famille. Tous prendraient soin d'elle comme elle avait pris soin de leur plus jeune enfant.
    4
    « Et maintenant quelle est la meilleure chose à faire? se demanda Chagak en s'étendant sur sa couche ce soir-là. Je ne peux mourir et laisser Pup seul, mais dois-je essayer de vivre sans mon peuple? »
    « Que puis-je offrir à mon frère? Qui lui apprendra à chasser ? Des hommes qui ne sont ni chasseurs ni shamans ne méritent aucun honneur dans l'autre monde. »
    Elle n'avait nul droit de mettre un terme à la vie de son frère, mais peut-être que la décision ne lui appartenait pas. Celle-ci devrait être prise par ses parents.
    Le lendemain matin, après avoir nourri Pup, Chagak le remit dans

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