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Ma soeur la lune

Ma soeur la lune

Titel: Ma soeur la lune Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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La plus belle du village, jugea Kiin. Elle était petite, mais pas autant que Coquille Bleue. D'ailleurs, Nez Crochu affirmait qu'autrefois Coquille Bleue était belle; mais aujourd'hui ses cheveux étaient lourdement striés de gris et son nez tout tordu à la suite d'un coup porté par Oiseau Gris.
    Chagak leva les yeux sur Kayugh.
    — Amène tes fils.
    Alors, les deux femmes prirent place derrière le rondin. Au cours de ce festin, comme souvent, les hommes mangeraient d'abord tandis que les femmes leur apporteraient de l'eau et trancheraient la viande. Kayugh appela Amgigh depuis sa chambre, puis quitta l'ulaq en disant :
    — Je vais chercher Samig.
    Amgigh s'accroupit près de la nourriture sans un mot, bras croisés sur les genoux. Il portait un tablier d'herbe dont le pan était entouré d'une herbe plus foncée et tissé d'un motif à damier comme l'étaient tous les tissages de Chagak. Maintenant que Kiin était sa fille, peut-être lui enseignerait-elle ce mode de tissage.
    Les épaules et le dos d'Amgigh luisaient d'huile; ses cheveux peignés en arrière, droits et lisses, retombaient sur ses épaules comme une chute d'eau noire. Il ne regardait pas Kiin mais celle-ci remarqua que ses mains remuaient sans cesse. Elle entendit même ses jointures craquer une à une.
    Kayugh revint enfin en compagnie de Samig. Les deux hommes descendirent, Samig se débarrassa de son parka et prit place en face d'Amgigh, tournant ainsi le dos à Kiin. Ses cheveux étaient emmêlés et sa peau n'était pas huilée, mais les yeux de Kiin étaient irrésistiblement attirés vers lui, si bien qu'elle se contraignit à ne regarder ni l'un ni l'autre.
    Lorsque les hommes eurent achevé leur repas, laissant aux femmes de quoi manger, Kiin s'installa de façon à ne pas les voir. Elle se surprit pourtant à écouter la voix de Samig, admirant la sagesse de ses propos, suivant ses récits avec plus d'intérêt qu'elle n'en avait jamais éprouvé pour ceux d'Amgigh ou de Kayugh. Aussi s'adressa-t-elle à Chagak, devisant du temps et de la mer, de la couture et de la cuisine. Elle posa des questions malgré son bégaiement, s'acharnant à chasser Samig de son esprit, à être une véritable épouse pour Amgigh, en pensée autant que par le travail de ses mains.
    Après qu'elles eurent mangé, après que Chagak se fut occupée de Mésange, Kiin sut que l'heure était venue. Au-dessus du toit, le ciel s'était assombri pour la nuit. D'ordinaire, Kiin dormait à cette heure. Mais chacun semblait si affairé qu'elle tira une peau de son panier à couture et, à l'aide de son poinçon, pratiqua des trous sur un des côtés. Elle confectionnerait pour Amgigh une paire de chaussettes en peau de phoque afin qu'il ait les pieds au chaud dans l'ulaq.
    Soudain, Kayugh se dressa devant elle et elle posa bien vite son ouvrage. Il referma ses mains sur celles de la jeune femme et la releva. Le cœur de Kiin battait si fort qu'elle était persuadée que Kayugh le voyait cogner contre sa poitrine. Sans un mot, Kayugh l'amena devant Amgigh. Amgigh était assis, dos raide, et quand il leva les yeux sur Kiin, ils renvoyaient les flammes jaunes qui dansaient dans le cercle des mèches de la lampe à huile la plus proche. Samig était assis à côté de son frère et Kiin, qui avait incliné la tête, ne pouvait détacher son regard du visage de Samig.
    La lumière dansait aussi dans ses yeux, mais elle y lut de la douleur et se détourna vivement vers Amgigh. Amgigh, son mari.
    « Pas Samig, lui dit son esprit. Pas Samig. Amgigh. »
    Kiin planta son regard sur le visage d'Amgigh et s'obligea à l'y laisser.
    Amgigh se leva. Kayugh prit sa main, la plaça sur celle de Kiin puis, levant les deux mains ensemble, entrelaça leurs doigts, bras levés.
    — Elle est ta femme, dit Kayugh à Amgigh.
    Après quoi il les accompagna jusqu'à la chambre et tint le rideau tandis qu'Amgigh conduisait Kiin à l'intérieur de la pièce.
    11
    Kiin entendit le bruissement du rideau qui retombait derrière eux. Elle savait que presque toutes les nuits Amgigh la rejoindrait dans sa chambre, mais cette nuit, leur première nuit ensemble, ils occupaient celle d'Amgigh. De douces fourrures de phoque marquaient le chemin depuis le mur jusqu'à l'entrée et, quand Kiin marcha dessus, elle sentit sous ses pieds la bruyère et les nattes d'herbe entre le sol et les fourrures.
    — Assieds-toi, murmura Amgigh.
    Il s'accroupit, dos à la porte.
    Kiin entendit la voix de Chagak

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