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Ma soeur la lune

Ma soeur la lune

Titel: Ma soeur la lune Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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Amgigh que je lui apprendrais à chasser la baleine, expliqua Samig. Je resterai jusqu'à ce que Nombreuses Baleines me demande de partir.
    Il vit la fierté dans les yeux de son père qui commenta avec calme :
    — Si tu apprends cet art, tu peux nous l'enseigner à tous.
    — Oui, commença Samig, pour s'interrompre aussitôt en s'apercevant que les yeux d'Amgigh se rétrécissaient soudain.
    — Pas à Qakan, marmonna Amgigh.
    — Qakan doit d'abord apprendre à chasser le phoque, concéda Kayugh.
    Il leva les yeux tandis que Phoque Mourant émergeait de l'ulaq du vieux chef.
    — Nombreuses Baleines souhaite vous voir, appela Phoque Mourant.
    Samig suivit son père, mais Phoque Mourant sauta à terre.
    — Tu ne nous accompagnes pas? s'étonna Kayugh.
    — Il veut vous voir seuls, Samig et toi. Pas Amgigh, ajouta-t-il en posant la main sur son bras.
    Samig vit la colère colorer de rouge le visage de son frère.
    Kayugh et Samig descendirent dans l'obscurité de l'ulaq de Nombreuses Baleines. Lorsque les yeux de Samig se furent habitués, il constata que la demeure de son grand-père était vaste, plus longue et plus haute que les ulas des Premiers Hommes. La pièce principale était bordée de roches qui lui arrivaient presque à la taille; chacune comportait au sommet un creux dans lequel il y avait de l'huile et une touffe de mousse qui faisait office de mèche.
    — C'est bien que vous soyez là, déclara Nombreuses Baleines. Asseyez-vous.
    Le vieil homme était installé sur une natte au centre de l'ulaq. Il portait un parka en peau de loutre décoré aux coutures de fourrure et de plumes. Sur la tête, un chapeau de bois en forme de cône. Les Chasseurs de Baleines en avaient de semblables lorsqu'ils venaient faire du troc au village des Premiers Hommes, et Samig en désirait un depuis qu'il était tout petit. Sa mère lui avait dit que les Chasseurs de Baleines fabriquaient ces coiffes avec une feuille de bois si mince qu'on pouvait la chauffer à la vapeur pour lui donner la forme voulue ; les bords se rejoignaient vers l'arrière, noués par un lacet. Le bois du chapeau de Nombreuses Baleines était lisse et luisant comme si on l'avait frotté d'huile. Des moustaches de lion de mer étaient cousues dans les coutures, et des plumes et des coquillages pendaient à un côté.
    Kayugh prit place sur une natte d'herbe face au vieil homme et fit signe à Samig de s'installer près de lui. À gauche de Nombreuses Baleines, une femme, petite et grasse, dont les cheveux noirs, tirés en arrière et attachés en une queue sur la nuque avec une lanière de loutre, soulignaient un visage rond. Ils étaient en tailleur alors que Samig et Kayugh s'étaient assis sur leurs talons.
    La femme se dirigea vers deux nattes, l'une recouverte de fines tranches de viande foncée, l'autre comportant quatre bols de coquillage remplis de graisse fondue. Nombreuses Baleines choisit une tranche de viande qu'il tendit à Kayugh, puis fit signe à Samig de se servir. Samig observa Nombreuses Baleines tremper sa viande dans la graisse fondue et la replier avant de la mettre dans sa bouche. Samig l'imita.
    La viande, riche et douce lui rappela d'abord celle du morse avant qu'il ne comprenne que c'était de la baleine. Il se souvint de la raison de sa présence ici et son cœur s'emballa.
    — Il y a longtemps, tu m'as promis de me ramener mon petit-fils. Je savais que tu viendrais, dit Nombreuses Baleines.
    Sa voix était basse et forte, comme celle d'un jeune homme. On racontait qu'autrefois les Chasseurs de Baleines étaient des Premiers Hommes. II faut dire que les Chasseurs de Baleines parlaient la même langue que les Premiers Hommes, même si certains mots se prononçaient différemment, avec un rythme plus rapide, comme si, en chassant la baleine, les gens avaient appris à aller plus vite, même dans leur langage.
    — Une fois, il y a longtemps, notre peuple a sauvé ton village, déclara Kayugh.
    Samig s'étonna de tant de brusquerie. Les conversations débutaient plutôt par des généralités sur la pluie et le beau temps, la chasse et la mer, les femmes et les enfants.
    — Oui, reconnut Nombreuses Baleines. C'est pour cette raison que je t'ai donné ma petite-fille et mon petit-fils.
    Samig s'immobilisa soudain, le dos raide. Il remarqua qu'Épouse Dodue se penchait tellement en avant que ses gros seins se pressaient contre ses genoux.
    Samig ramena ses pensées aux paroles de son père. Que voulait dire

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