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Ma soeur la lune

Ma soeur la lune

Titel: Ma soeur la lune Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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et tu ne sais pas s'ils accordent leur faveur à toi ou à ta sœur.
    — À moi, lança Qakan.
    Une fois encore, la rage monta en lui, empourprant son visage, lui donnant l'impression d'éclater.
    — C'est la seule femme dénuée de pouvoir.
    — Elle a trouvé la faveur de quelqu'un car elle a un bon mari.
    — C'est de toi qu'elle a un don. C'est toi qui lui as conféré le peu de pouvoir qu'elle détient.
    Oiseau Gris se leva et passa devant Qakan. Puis, regardant par-dessus son épaule, il marmonna :
    — Elle m'a rapporté plus de peaux de phoque que toi. Si tu étais chasseur, je m'intéresserais de plus près à tes plans.
    Les mots s'échappèrent de la bouche de Qakan avec une telle rapidité qu'il saisit qu'un esprit avait dû les y jeter :
    — C'est toi qui me parles de chasse? Toi?
    Oiseau Gris pivota, leva sa canne d'une main tremblante. Ses lèvres se retroussèrent. Mais Qakan n'attendit pas de savoir ce que son père avait à lui dire.
    Assez ! Il prendrait Kiin avec lui, sans l'aide de son père. Et toutes les fourrures qu'il obtiendrait pour elle lui appartiendraient, il n'en laisserait aucune à son père. Sans un regard en arrière, il se dirigea vers la plage. Son ik était chargé; il s'en irait tout de suite. Du moins le penseraient-ils.
    Le premier jour du départ des hommes, Kiin et Chagak avaient beaucoup parlé, beaucoup ri. Elles sortirent Mésange de son lit, la laissant déambuler dans l'ulaq sans crainte de déranger les hommes. Coquille Bleue les rejoignit dans l'après-midi et les trois femmes tressèrent des paniers. Chagak raconta des histoires, Kiin chanta, d'abord un chant de tissage, puis un chant marin.
    Le deuxième jour s'écoula aussi paisiblement et Chagak félicita Kiin pour la morue que Nez Crochu leur avait donnée, comme si c'était Kiin qui avait attrapé le poisson alors qu'elle avait simplement aidé à le vider. Aujourd'hui, le troisième jour, l'ulaq semblait trop calme, trop vide. Lorsque Kiin vivait dans l'ulaq de son père, sa mère était heureuse chaque fois qu'Oiseau Gris partait à la chasse. Mais l'absence d'Amgigh et de Kayugh assombrissait l'ulaq, même quand les lampes brûlaient, et les longues soirées se déroulaient sans joie. Quant à Samig... il ne reviendrait pas. Pas cette année, peut-être pas la suivante. Kiin ne pouvait cependant s'autoriser à s'affliger du vide que laissait son absence. Elle était la femme d'Amgigh. Lorsque Samig reviendrait parmi les Premiers Hommes, elle aurait peut-être donné un fils à Amgigh, et peut-être Samig ramènerait-il une épouse de chez les Chasseurs de Baleines.
    Une douleur soudaine emplit la poitrine de Kiin qui entendit son esprit murmurer : « Oui, et ce sera mieux ainsi. Elle sera une sœur pour toi et pour Amgigh. Une fille pour Chagak et Kayugh. Une seconde mère pour les fils d'Amgigh. »
    Les doigts de Kiin cherchèrent la surface lisse de la dent de baleine qui pendait à son côté. Elle caressa l'ivoire jusqu'à ce que la douleur s'atténue. Kiin était demeurée trop longtemps dans cet ulaq. Ce serait bon de sortir l'ik de sa mère pour ramasser des pierres et des poissons. Ce soir, Chagak et elle pourraient organiser une petite fête, qui soulagerait un peu leur attente.
    Chagak était dans sa chambre et nourrissait Mésange. Kiin l'appela pour lui dire qu'elle ne serait pas longue, qu'elle ne comptait pas s'éloigner du rivage.
    — Attends, cria Chagak. Je veux te donner quelque chose.
    Interloquée, Kiin attendit que Chagak sorte de sa couche, Mésange dans les bras, la bouche pressée contre le sein droit de sa mère.
    — Ceci, dit Chagak en tendant la sculpture qu'elle portait autour de son cou.
    Kiin reconnut l'œuvre du grand-père Shuganan. Elle représentait une femme, un mari et un enfant, les visages de l'homme et de la femme étaient presque sûrement Kayugh et Chagak. L'ivoire de dent de baleine était jauni par l'âge, foncé par l'huile avec laquelle Chagak le frottait pour l'empêcher de sécher et de devenir friable.
    — Je-je-je ne peux-peux pas, bredouilla Kiin. C'est-c'est à toi. Ton grand, ton grand...
    Mais Chagak leva la main pour faire taire Kiin, glissa la lanière autour du cou de Kiin et ajusta le pendentif entre ses deux seins.
    — C'est à toi, maintenant, murmura Chagak. Il te donnera des bébés, et tes bébés seront une joie pour moi autant que pour toi.
    Kiin essaya de parler, mais une fois de plus un esprit s'infiltra dans sa gorge et retint

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