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Ma soeur la lune

Ma soeur la lune

Titel: Ma soeur la lune Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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plage et, comme il s'approchait, Samig leva sa pagaie au-dessus de sa tête, signe que la baleine était touchée. Plusieurs hommes grimpèrent dans leur ikyak et pagayèrent en direction du flotteur. Samig, lui, se rendit dans la hutte de l'alananasika afin de s'offrir à la baleine tout comme il voulait que la baleine s'offrît aux Chasseurs de Baleines. Cadeau pour cadeau. Et, dans sa métamorphose, Samig remercia l'animal qui prêterait sa chair afin que des hommes vivent.
    C'était le troisième jour. Samig marquait le temps par les bruits du village. Il était une fois de plus devenu baleine, sentait qu'il tombait malade, avait conscience d'approcher la mort. Mais soudain, il était redevenu lui-même. Que s'était-il passé?
    Il attendit, l'oreille aux aguets. Oui, des voix parvenaient de la plage. Il entendit Roc Dur et Phoque Mourant. Ils étaient de retour. La baleine était-elle sur la plage ou était-elle perdue ?
    Soudain, le rabat de la porte de la hutte fut rejeté en arrière. Nombreuses Baleines se tenait devant l'ouverture. La lumière qui brillait autour du vieil homme dissimulait son visage ; Samig ne distinguait que le contour des membres fins de son grand-père et ses épaules courbées.
    Il ne soufflait mot et Samig finit par demander :
    — La baleine s'est échouée?
    — Oui, répondit Nombreuses Baleines posément.
    Il se tenait toujours dans l'embrasure et n'esquissait pas le moindre geste pour aider son petit-fils à se relever.
    — Est-ce le moment d'extraire le poison?
    — Oui.
    Samig se leva, avec une brusque sensation de malaise. Son grand-père manifestait une dureté qu'il ne comprenait pas.
    Samig suivit Nombreuses Baleines mais s'arrêta dès qu'il aperçut la plage : elle était vide.
    — Voilà, dit Nombreuses Baleines en désignant l'ikyak de Samig, va chercher ta baleine.
    Samig se tourna vers son grand-père, cherchant la signification de ses paroles. Plusieurs chasseurs s'étaient rassemblés, dont Roc Dur, un large sourire sur son visage.
    — Ton grand-père te dit d'aller chercher ta baleine, commença Roc Dur. Mais moi je dis « Reste ici ». Les Traqueurs de Phoques reconnaîtront ton harpon, n'est-ce pas ? Tu l'as orné de façon identique à tes harpons de phoque. Ils savent sûrement qu'il ne faut pas manger ton poison.
    Mais Phoque Mourant posa la main sur l'épaule de Samig.
    — Le choix que tu as fait est un choix de chasseur, celui de nourrir son peuple. Tu possèdes le pouvoir. Nous n'avons jamais vu un tel pouvoir.
    Roc Dur repoussa Phoque Mourant, cracha par terre aux pieds de ce dernier et plongea dans les yeux de Samig. Il s'exprima d'une voix basse où Samig reconnaissait la colère :
    — Tu ne seras jamais alananasika. Ton pouvoir n'est rien. Ne crois pas que tu puisses régner sur les hommes comme tu règnes sur les baleines !
    Roc Dur tourna les talons et les autres le suivirent, laissant Samig et Nombreuses Baleines seuls sur la plage. Samig eut l'impression qu'il était toujours dans son rêve de métamorphose, que le monde que voyaient ses yeux n'était pas réel. Il n'avait pas appelé la baleine à se rendre sur la plage des Premiers Hommes. Quel homme détenait le pouvoir de faire une chose pareille?
    — Je n'ai pas..., commença Samig.
    Mais Nombreuses Baleines l'interrompit :
    — Pars-tu ou restes-tu?
    — Ai-je encore le choix?
    — Oui.
    Samig s'autorisa à songer un moment à Kiin, à sa mère, au village des Premiers Hommes; puis il se rappela la promesse qu'il avait faite à Kayugh, à Amgigh. Il avait encore beaucoup à apprendre.
    — Je reste.
    Nombreuses Baleines approuva d'un hochement de tête.
    — Je n'ai pas envoyé la baleine..., insista Samig.
    Mais une fois encore, Nombreuses Baleines lui
    coupa la parole :
    — As-tu faim?
    Samig poussa un long soupir.
    — Oui.
    — Je vais demander à Épouse Dodue de t'appor-ter quelque chose.
    Nombreuses Baleines marcha vers son ulaq et se retourna, le regard adouci :
    — Samig, le pouvoir d'un homme n'est pas seulement ce qu'il sait qu'est ce pouvoir, mais ce que les autres croient qu'il est.
    Puis, d'une voix tranquille qui tourbillonna dans le brouillard ténu qui se posait sur la plage, il ajouta :
    — Si les Traqueurs de Phoques avaient été mon peuple, j'aurais agi de même.
    31
    Amgigh était dans son ikyak près des nids de varech quand il la vit. Une grande baleine à bosse qui décrivait des cercles ; l'écume de son sillage était noire, comme si le

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