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Ma soeur la lune

Ma soeur la lune

Titel: Ma soeur la lune Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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lui avait permis de conserver pour nettoyer le poisson, mais elle savait que ce serait une piètre protection contre trois hommes.
    Tandis que Qakan s'approchait du foyer, le brouillard se leva comme si, en marchant, les pieds de Qakan repoussaient la brume. Kiin vit alors plus précisément les trois hommes dont le visage était peint de rouge et de noir. Ils dévisagèrent Qakan sans esquisser le moindre geste, ne tendant pas même la main pour le saluer. Qakan avait les bras en avant, paumes tournées vers le ciel.
    — Je suis un ami. Je n'ai pas de couteau.
    Il dit autre chose, des mots que Kiin ne comprit pas car c'était le langage des Hommes Morses.
    Qakan avait fait deux ou trois expéditions dans le camp d'été des Chasseurs de Morses avec leur père et il lui avait affirmé parler leur langue. Persuadée qu'il se vantait une fois de plus, Kiin ne l'avait pas cru. Au cours des derniers mois, pourtant, tout en pagayant, il répétait chaque jour à voix haute les mots qu'il connaissait. Il avait refusé de les enseigner à Kiin.
    Quand ils avaient quitté le second village des Premiers Hommes, Qakan avait suspendu à la proue de l'ik une peau de loutre teinte en rouge, signe des commerçants, mais quand ils aperçurent la fumée du feu des trois hommes, Kiin décela la peur derrière les fanfaronnades de son frère.
    C'était une simple étape pour les chasseurs. Qui pouvait dire de quel village ils provenaient et s'ils étaient amicaux ou non? Kiin s'aplatit au fond de l'ik et tendit avec précaution la main vers une pagaie. Et si les hommes tuaient Qakan? Était-elle capable de pousser l'ik en mer avant qu'ils ne la rattrapent? Elle ne le pensait pas. En tout cas, elle se défendrait mieux avec une rame qu'avec une petite pierre tranchante.
    Elle tirait la pagaie à elle quand un des hommes parla. Ses mots surprirent Kiin et elle s'interrompit, comme un enfant faisant une chose défendue, et regarda subrepticement par-dessus bord.
    Un des hommes désigna l'ik et dit quelque chose. Le cœur de Kiin s'accéléra. Qakan parla. Certains mots étaient dans la langue des Premiers Hommes, la plupart dans celle des Hommes Morses.
    Puis il fit signe à Kiin.
    — Viens ici.
    Voyant qu'elle ne bougeait pas, il avança vers elle à grands pas, l'air agacé. Il la saisit par le bras et l'obligea à se redresser :
    — Ils veulent te voir.
    Il la tira de force, elle trébucha et tomba sur les galets qui lui écorchèrent genoux et paume des mains.
    — Imbécile! siffla-t-il.
    Kiin se releva lentement, frotta ses mains et ses jambes et lissa son suk.
    — Combien penses-tu qu'ils me donneront pour une femme incapable de marcher? lança Qakan.
    Habituée à ses plaintes, Kiin ne répondit pas.
    C'était lui qui avait entravé ses poignets et ses chevilles, l'obligeant à ne faire que des pas minuscules. Elle avança vers le feu et s'accroupit en tirant son suk sur ses genoux.
    Les hommes la dévisagèrent. Kiin eut envie de détourner les yeux. Pourtant, elle affronta leur regard, ce qui ne se faisait pas chez les Premiers Hommes et irriterait Qakan.
    Les trois hommes se ressemblaient tant que Kiin se dit qu'ils étaient frères. Le plus grand paraissait l'aîné. Des lignes couraient du coin de ses yeux à sa mâchoire. Ses joues étaient peintes en rouge, son nez en noir. Quelques poils au menton lui descendaient jusqu'à la poitrine et ses yeux étaient de fines demi-lunes. Des trois, c'était lui qui parlait le plus souvent et le plus fort.
    L'homme qui paraissait le plus jeune avait peint le dos de ses mains d'un motif comparable aux vagues de la mer. Son visage était rond, ses cheveux enduits de graisse et coupés droit à hauteur d'épaules. Le troisième, au visage long et fin, arborait une cicatrice qui suivait une ligne courbe du coin de l'œil au milieu du menton. Lorsqu'il parlait, la peau sur la cicatrice se tendait.
    Chacun portait un parka de fourrure dont le capuchon était bordé d'épaisse fourrure argentée, d'une sorte inconnue de Kiin. Si les parkas arrivaient au-dessus des genoux, les hommes arboraient des jambières de fourrure et des bottes de peau de phoque.
    Ils continuèrent de s'adresser à Qakan. Qakan parlait peu mais riait souvent, montrant parfois Kiin du doigt.
    Au bout d'un moment, Qakan s'approcha d'elle et défit ses liens ; il la prit par le menton et lui rit au nez. Mais Kiin détourna les yeux, se frottant les poignets où la peau était à vif.
    Alors, l'homme le plus grand

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