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Marc-Aurèle

Marc-Aurèle

Titel: Marc-Aurèle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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feu : "Ne vois-tu pas combien je suis beau et grand, moi aussi ?" Il ajoutait parfois : "Sache qu’il n’y a rien de plus ignoble que la beauté !" Puis, d’un mot, il demandait au bourreau d’enfoncer la lame plus profond et disait : "Il n’y a rien non plus de plus éphémère : la beauté est comme la vie !" »
     
    Eclectos s’est interrompu et a croisé les mains sur sa poitrine, respirant bruyamment, reprenant son souffle.
    « La crainte de perdre la vie déformait le visage de Domitien, de cette bête, la plus cruelle que Rome ait connue. Il savait par ses délateurs que plus il tuait de chrétiens, des hommes justes, plus le nombre des Romains qui croyaient en Christos, le Dieu unique, notre Souverain éternel, augmentait. Qui pouvait penser en effet que ce "Néron chauve" était un Dieu ? On s’inclinait devant sa statue, mais on méprisait, on haïssait l’homme-hyène qu’elle représentait. On s’écartait même de ces divinités auxquelles Domitien sacrifiait des milliers d’animaux, ces troupeaux qui encombraient le chemin du Capitole, ou ces centaines d’hommes qu’il faisait combattre dans l’amphithéâtre et qu’on laissait se vider de leur sang comme des moutons ou des taureaux égorgés. »
    Eclectos a brandi le poing.
    « Julius Priscus, comment ne vois-tu pas qu’il n’y a qu’un seul dieu, Christos, le Ressuscité, et que les divinités de Rome ne sont que des morceaux de pierre sculptée, l’occasion, pour le Mal qui se cache en l’homme, de frapper, de faire souffrir d’autres hommes au nom de ces dieux, de cet empereur qui se prétend divin ? »
    Il a rouvert ses mains, m’a tendu ses paumes.
    « Alors, autour de ceux qui prêchaient la foi en Christos, les Romains se sont rassemblés malgré les périls et les délateurs de Domitien. Mais comment se protéger d’un empereur qui livrait aux bêtes un homme surpris à lire l’ouvrage de Suétone parce que l’historien y avait fait figurer une vie de Caligula et que, Domitien le savait, on le comparait à cet empereur fou ?
    — Je lis Suétone, ai-je murmuré.
    — Christos seul peut sauver les hommes du Mal, a repris Eclectos. Au temps où régnait la Bête chauve, des Juifs, des citoyens de Rome l’ont compris. Ils ont écouté celui qui dirigeait notre Église, l’évêque Clément. Celui-ci ne se cachait pas ; il prêchait aux yeux de tous. Mais Domitien, averti par ses délateurs, n’a pas osé ordonner sa mort. Il a redoublé de cruauté à l’égard des plus humbles des chrétiens. Cependant, le martyre d’un chrétien faisait naître de nouveaux croyants. C’était comme si chaque décision, chaque crime de Domitien apportaient à notre foi de nouveaux adeptes. Il avait exigé de chaque juif, de chaque circoncis qu’il payât le fiscus judaicus . On a ainsi vu un agent du fisc, assisté de nombreux soldats, examiner un vieillard de quatre-vingt-dix ans pour vérifier s’il n’était pas circoncis ! La persécution s’est même abattue sur tous ceux qui menaient une "vie juive", qu’ils fussent ou non circoncis. Les chirurgiens qui pratiquaient la circoncision étaient punis de mort. Tout citoyen romain qui se faisait circoncire était exilé, ses biens confisqués… »
    Eclectos s’est à nouveau penché vers moi.
    « De nombreux Juifs sont venus à Christos parce que notre Dieu n’exige pas que l’on mutile son corps. Tout homme devient chrétien s’il donne son âme à Dieu, et Christos n’a nul besoin de la peau du prépuce pour reconnaître ses enfants. Tout homme peut choisir d’embrasser la foi chrétienne. La cruelle folie de Domitien a fait découvrir Christos à des Romains qui n’auraient jamais entendu la voix de Clément, notre évêque d’alors. Ils entendirent ses prêches, découvrirent que les chrétiens ne voulaient ni le désordre, ni la rébellion, ni la mort de l’empereur : « Les grands ne peuvent exister sans les petits, ni les petits sans les grands », disait Clément. Et je le répète à mon tour, Priscus ! »
    Mains jointes, Eclectos a pris un ton solennel :
    « Je dis : "Que chacun soit donc soumis à son prochain suivant l’ordre où il a été placé par la grâce de Christos ! Que le fort ne néglige pas le faible, que le faible respecte le fort ; que le riche soit généreux envers le pauvre, et que le pauvre remercie Dieu de lui avoir donné quelqu’un pour subvenir à ses besoins !"
    Le maître doit rester le maître,

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