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Marc-Aurèle

Marc-Aurèle

Titel: Marc-Aurèle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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ai-je murmuré. Et l’esclave, soumis. Soit. Mais l’empereur, fut-il cette bête cruelle, ce "Néron chauve", aurait été placé à la tête du genre humain par Dieu ? Je ne comprends plus, Eclectos… »
     
    Eclectos a rouvert les yeux et m’a longuement fixé.
    « Dieu choisit, a-t-il dit. Et l’homme doit respecter la décision de Dieu. Elle est juste, même si les raisons de Dieu demeurent obscures à l’homme. »
    Je me suis insurgé contre cette soumission qui, cependant, m’attirait. Il me semblait qu’elle me dispenserait la paix.
    J’ai dit :
    « Tu me demandes de prier un Dieu de mystère alors que je voudrais un Dieu de lumière.
    — La lumière vient de ce qu’il y a la nuit, a murmuré Eclectos. Fais confiance à Dieu pour t’éclairer quand le moment sera venu. Personne ne Lui échappe. Domitien eut beau user de tous les stratagèmes, consulter les astrologues, interpréter les présages, tenter de se concilier toutes les divinités en multipliant les sacrifices, un jour l’intendant de l’impératrice, Stéphanus, a demandé à être reçu pour révéler un complot visant à tuer l’empereur. Depuis plusieurs jours, Stéphanus s’était présenté au palais avec le bras gauche bandé par suite, prétendait-il, d’une blessure. Mais entre les bandages et la peau il avait glissé un poignard. Il s’est jeté sur Domitien, le frappant au bas-ventre. L’empereur s’est défendu en hurlant, tentant d’extraire la lame de son corps, se tailladant ainsi les doigts, cherchant cependant à agripper Stéphanus, à lui crever les yeux. Le sang de ses phalanges déchiquetées a maculé le visage de son assassin. Des gladiateurs se sont précipités et ont achevé l’empereur en le frappant à sept reprises. Il était dans sa quarante-cinquième année et dans la quinzième de son principat ».
    Eclectos a ajouté en se levant :
    « Domitien a été châtié. Dieu ne l’avait pas exigé, mais Il a laissé la liberté aux hommes de choisir. Ils ont tué le "Néron chauve". Ils ont pris le risque d’être condamnés par Dieu. Mais Celui-ci jugera. Il est juste. Il est le Dieu du pardon, Celui qui comprend les mobiles et les désirs humains. Il ne les excuse pas, mais les jauge. Il est le Dieu de compassion. »
     
    Eclectos m’a empoigné le bras et a poursuivi :
    « Après Domitien sont venus Nerva et Trajan. Je t’ai déjà parlé de ce dernier empereur : tu te souviens de Trajan le persécuteur ? Des chrétiens et des Juifs humiliés, suppliciés, ont annoncé la fin du règne des idoles de pierre. Écoute cette Apocalypse , Julius Priscus ; les hommes y font parler l’envoyé de Dieu qui s’adresse à cet Empire qui s’étend sur tout le genre humain : "Tu as gouverné le monde par la terreur et non par la vérité. Tu as écrasé les hommes doux, tu as persécuté les gens paisibles, tu as haï les justes, tu as aimé les menteurs, tu as humilié les murailles de ceux qui ne t’avaient fait aucun mal. Tes violences sont montées jusqu’au trône de l’Éternel, et ton orgueil est venu jusqu’au Tout-Puissant. Le Très Haut a consulté alors Sa table des temps et a vu que la mesure était pleine, que Son moment était venu. C’est pourquoi tu vas disparaître, toi, ô aigle, et tes ailes horribles et tes ailerons maudits et tes têtes perverses et tes ongles détestables, et tout ton corps sinistre, afin que la Terre respire, qu’elle se ranime, délivrée de la tyrannie, et qu’elle recommence à espérer en la justice et en la pitié de Celui qui l’a faite. »
    J’ai dégagé mon bras et me suis écarté d’Eclectos. Je l’ai laissé s’éloigner mais, au bout de quelques pas, il s’est arrêté, s’est retourné.
    S’il n’avait été ce vieillard si maigre qu’il en paraissait nu, décharné comme un arbre mort, je l’aurai défié.
    J’étais citoyen de Rome. J’avais parcouru plusieurs provinces de l’Empire. J’avais longé les rives du Danube et du Rhin. J’avais vu briller, sur l’île de Pharos, la tour qui éclairait la mer et le port d’Alexandrie. Rien de plus grand, de plus ordonné n’existait, de par le monde connu, que l’empire de Rome. Cruel, il l’était ! Mais quel homme était seulement vertueux et soucieux du bien des autres ?
    Domitien avait été un « Néron chauve », un monstre, et Commode l’était à son tour. Mais Rome renaissait avec chaque nouvel empereur. Qui, dans le genre humain, pouvait la

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