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Marc-Aurèle

Marc-Aurèle

Titel: Marc-Aurèle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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bien.
    Ç’avait été la certitude de Christos. C’était l’espérance de Doma et de Sélos. Il m’arrivait de la partager. Puis j’écoutais la voix déjà lointaine de Marc Aurèle : « Tu dois, Priscus, songer continuellement à quel point tout ce qui est déjà arrivé est semblable à ce qui arrive, et songer à ce qui arrivera, qui ne sera pas différent. Il faut te placer devant les yeux, dans leur ensemble, les drames et comédies du même genre dont tu as été toi-même le témoin ou qu’une ancienne tradition t’a fait connaître, par exemple l’ensemble de la cour de Hadrien, de celle d’Antonin, de celles de Philippe, d’Alexandre ou de Crésus. Tout cela est pareil ; seuls les acteurs sont différents. »
    À ce moment-là, la fatigue m’accablait comme si cet avenir qui n’était qu’une répétition dénuée d’espérance était le pire des destins.
    Je me laissais glisser le long du tronc du cyprès. Mes jambes étaient d’heure en heure plus lourdes, de moins en moins capables de me porter.
    Je m’asseyais donc sur la terre.
    J’ouvrais les yeux. Déjà la pénombre du crépuscule recouvrait d’un voile noir la sépulture d’Eclectos.
    L’heure de mon propre départ était proche.
    J’avais tant vu se succéder de visages autour de moi, entendu de cris d’agonie ou de triomphe !
    Il me semblait que déboulait vers moi un amoncellement de corps qui allaient me recouvrir. J’avais oublié les noms de tous ces morts dont les membres raidis paraissaient s’agripper les uns aux autres.
    Parmi eux je reconnaissais néanmoins Blandine et Eclectos, Marc Aurèle et Commode.
     
    J’entendais encore les imprécations du Sénat après que Marcia et Hyacinthe eurent enfin réussi – sans moi – à faire tuer le fils de Marc Aurèle, qu’il avait fallu étrangler.
    « Qu’on le traîne avec un croc, l’assassin des innocents !, avait-on hurlé. Qu’on mette son corps en pièces comme celui d’un gladiateur tué ! »
    Commode n’était-il d’ailleurs pas l’un d’eux, lui qui avait livré sept cent trente-cinq combats et s’était fait tant de fois sodomiser dans la loge impériale sous les yeux des spectateurs rassemblés dans l’amphithéâtre ?
    « Ennemi des dieux, parricide du Sénat, oui, qu’on le traîne avec un croc, qu’on abatte ses statues, qu’on traîne le meurtrier des citoyens ! Aux lions, les délateurs ! »
    Et on avait acclamé le nouvel empereur, Pertinax, qui serait lui-même assassiné deux mois et vingt-sept jours plus tard…
    Je n’avais même plus voulu connaître le nom de son successeur. J’avais interrompu Sélos qui faisait mine de vouloir le prononcer. J’avais demandé à ce que Doma me rejoigne avec notre fils.
    Car j’avais un enfant d’elle.
    Cela comblait ma vie et la taraudait, puisqu’il allait falloir que je la quitte, que je ne puisse plus poser ma main sur la nuque de cet enfant.
    Je l’avais prénommé Marcus. Je n’avais pas souhaité savoir en toute certitude si Eclectos l’avait baptisé dans la clairière aux sept cyprès.
    Lorsque j’avais deviné que Doma voulait me prévenir de ce qu’elle avait décidé, j’avais placé ma paume sur sa bouche et l’avais forcée à quitter ma chambre en lui murmurant :
    « Fais ce que tu dois, fais ce que tu crois. »
     
    Je ne quitte donc la clairière aux sept cyprès que lorsque la nuit est tombée, que j’entends les voix des chrétiens, esclaves et affranchis de ma maison, qui s’approchent.
    Ils vont se rassembler autour de la tombe d’Eclectos. Ils vont prier. Sélos, Doma et Marcus sont parmi eux.
    Je m’éloigne.
    Je tâtonne parmi les allées, m’arrêtant souvent pour reprendre souffle, me souvenant de l’une des dernières pensées de Marc Aurèle alors que la mort avait déjà posé ses griffes sur sa tête.
    « Je vais à travers les êtres de la nature jusqu’à ce que je tombe et entre dans le repos. Je rendrai mon souffle à cet air dont chaque jour je le tire. Je tomberai sur cette terre dont mon père a extrait la semence génératrice, ma mère le sang de mon corps, et ma nourrice son lait. C’est de la terre que chaque jour depuis tant d’années me viennent nourriture et boisson, c’est elle qui porte mes pas et qui sert à tant de mes besoins. »
     
    J’entendais, en approchant de ma demeure, la voix de mon fils.
    Les chrétiens étaient donc déjà rentrés de la clairière.
    Je m’arrêtais sous les portiques de la

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