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Marc-Aurèle

Marc-Aurèle

Titel: Marc-Aurèle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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ressusciter ! »
     
    Certains chrétiens réussissaient à fuir et à se barricader dans leurs maisons. Mais la foule les encerclait, enfonçait les portes, plaçait des fagots contre les murs puis les incendiait. Elle se taisait quand les flammes s’élevaient, quand les toits s’effondraient. Mais elle devenait folle quand elle entendait les chrétiens chanter, invoquer Christos, répéter qu’ils n’abjureraient jamais, que souffrir pour Christos était la plus grande des joies, qu’ils remerciaient leur Dieu de les éprouver ainsi.
    La foule se ruait sur la maison en flammes. Elle achevait de la détruire, la pillait, jetant ce qui restait des corps dans les eaux du Rhône.
    « Ressuscite, chrétien ! »
    Elle ne se dispersait que lorsque apparaissaient les prétoriens du légat qui la menaçaient et tentaient de rétablir l’ordre.
     
    J’ai en mémoire la voix du tribun Numisius Clemens faisant son rapport au légat.
    « Lugdunum ne recouvrera son calme, dit-il, que si les impies ne provoquent pas, par leur attitude, la foule gauloise. »
    Il y a ce noble romain, Vettius Epagathus, qui continue d’arpenter le forum, les rues, qui se rend aux thermes, que personne n’ose interpeller parce qu’on le sait riche, habitant de Fourvière, non loin de la demeure du légat. On imagine qu’il bénéficie de la protection des magistrats de Rome. Mais la colère enfle. On ne peut tolérer que la plèbe se fasse elle-même justice. Il faut arrêter les chrétiens qui sont des fauteurs de désordres. Il faut les traduire devant les tribunaux, les interroger selon les procédures légales, les libérer s’ils abjurent, les condamner à mort s’ils persistent dans leur superstition.
    J’ai remarqué le geste du légat, levant à peine la main droite puis hochant la tête et murmurant : « Fais ton devoir tribun. »
     
    J’ai vu le troupeau des chrétiens gardés par les prétoriens avancer à travers les rues de Fourvière entre la foule hurlante qui lançait des pierres.
    Je les ai vus rassemblés au centre du forum et, autour d’eux, la plèbe gauloise brandissant le poing, criant qu’il fallait qu’ils avouent, qu’ils renoncent à leur superstition, qu’à défaut on devait les jeter aux bêtes.
    J’ai assisté aux premiers interrogatoires.
    J’ai vu les bourreaux frapper, tenailler les chairs. J’ai entendu les voix limpides sourdre de ces corps suppliciés et répéter : « Christianus sum ».
    Martial Pérennis présidait le tribunal avec une irritation croissante. Les cris montaient de la foule, les bourreaux officiaient, mais les chrétiens ne renonçaient pas à leur foi.
     
    Soudain, Vettius Epagathus s’est avancé sur le forum. Il a levé la main, s’est tourné vers le légat impérial, puis a tendu le bras vers les chrétiens et a lancé :
    « Je veux les défendre. Ils ne sont ni impies, ni athées. Tu ne peux, légat, les accuser de crimes qu’ils n’ont pas commis. »
    La foule a hurlé, protesté.
    Honte à ce noble romain qui prétendait parler aux noms de ces Orientaux, de ces Syriens, de ces Phrygiens !
    Le légat a laissé passer la vague, puis s’est levé.
    « Toi aussi, es-tu chrétien ?, a-t-il demandé.
    — Je le suis », a répondu Vettius Epagathus.
     
    Il avait parlé d’une voix si forte qu’elle avait empli le forum, l’espace de quelques instants empêchant la foule de crier.
    Mais, bientôt, le forum ne fut plus qu’une mer déchaînée réclamant la mort pour les chrétiens et pour ce Romain qui avait trahi, choisi de renier ses dieux, de se reconnaître membre d’une secte qui ne comptait dans ses rangs que des Orientaux, des esclaves et des femmes.
    « Honte sur toi, Vettius Epagathus ! »
    Mais on l’a laissé quitter le forum et la foule ricanante s’était écartée, n’osant s’en prendre à celui qui n’en restait pas moins, à ses yeux, un illustre et riche citoyen de Rome.
    Mais malheur aux autres !

 
     
44
    Je les ai vus, ces chrétiens dont les corps avaient perdu toute forme humaine.
    Ils n’étaient plus que des amas de chair sanglante aux membres tordus et disloqués.
    On les avait torturés dans les cachots situés aux abords de l’amphithéâtre afin qu’ils abjurent leur foi et avouent avoir participé à des repas de chair humaine et à des orgies incestueuses.
    Puis on les avait traînés jusqu’au forum où ils avaient été poussés les uns contre les autres face au tribunal que présidait le

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