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Marco Polo

Marco Polo

Titel: Marco Polo Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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de
l’autorité que j’aurais eue n’importe où dans le khanat, il me fallut déployer
beaucoup d’énergie et presque autant d’arguments. J’eus à vaincre une bonne
dose de torpeur gouvernementale, de pusillanimité, voire parfois d’opposition,
la multiplicité de gouvernements impliqués ne faisant rien pour arranger les
choses. J’eus à concilier les intérêts des Flandres, de la Lorraine et de la
Souabe, parmi d’autres encore plus suspicieux, et maints duchés étroits
d’esprit entre Bruges et Venise. Mais j’étais déterminé et têtu : cela se
fit. Lorsque cette chaîne de cavaliers et de relais de poste fut enfin établie,
je pus envoyer à Venise les listes détaillées des cargaisons de notre flotte
dès son départ de Sluys. La poste mettait sept jours pour convoyer ces
documents sur les onze cents kilomètres à parcourir, soit quatre fois moins de
temps que n’en mettrait notre flotte. Ainsi, les marchands qui les recevaient à
Venise avaient le temps d’en vendre avec profit le contenu avant même que
celui-ci leur fut parvenu.
    Lorsqu’il fut temps pour ma famille et moi de quitter
Bruges, je fus presque tenté de nous poster nous-mêmes afin d’abréger la
durée du retour. Mais deux d’entre nous n’étaient encore que des enfants, et
Donata étant à nouveau enceinte, l’idée s’avéra impraticable. Nous rentrâmes
comme nous étions venus, par bateau, et arrivâmes juste à temps pour voir
naître à Venise notre troisième fille, Morata.
    La Ca’ Polo était toujours un lieu de pèlerinage pour
des visiteurs désireux de rencontrer et de converser avec messire Marco
Milione. Durant mon séjour en Flandres, mon père les avait reçus. Mais Dona
Lisa et lui s’étaient lassés de cette obligation, tous deux avançant en âge et
faisant face à des ennuis de santé ; aussi furent-ils bien soulagés quand
je les relevai de cette tâche.
    Si j’en excepte certains dadais à tête vide et
quelques curieux à la bouche bée, je ne reçus la visite que d’hommes
intelligents et distingués. Je me souviens d’un poète, Francesco de Barberino
qui, comme toi, Luigi, cherchait à apprendre certaines choses pour une chanson
de geste à laquelle il s’était attelé. Je me rappelle aussi fort bien le
cartographe Marino Sanudo, qui vint nous demander le droit d’incorporer nos
cartes dans une vaste carte du monde qu’il était en train de compiler. Nous
rendirent aussi visite quelques frères historiens, Jacopo d’Acqui, Francesco
Pipino ou ce Jean d’Ypres venu de France, tous absorbés dans de rigoureuses
chroniques du monde. J’eus en outre le plaisir de rencontrer l’illustre peintre
Giotto di Bondone qui, déjà connu pour son fameux « O » [50] et ses
fresques peintes dans différentes chapelles, souhaitait en savoir plus sur la
pratique des arts décoratifs par les Han et fut fort impressionné par ce que je
pus lui en dire et lui en montrer. Il s’en alla, affirmant vouloir essayer ce
qu’il pourrait de ces effets exotiques dans ses peintures.
    Il m’arriva encore, au fil des ans, de mes nombreux correspondants
d’Orient et d’Occident, des nouvelles de gens et de lieux que j’avais connus.
J’appris la mort d’Edouard, roi d’Angleterre, que j’avais vu en prince croisé à
Acre. Je sus également que le prêtre Zuàne de Montecorvino, que j’avais vu
juste assez de temps pour le détester, avait été élevé par l’Eglise au titre
prestigieux d’archevêque de Khanbalik et s’était vu adjoindre un certain nombre
d’aides pour diriger les missions qu’il était en train d’établir à Kithai et à
Manzi. J’entendis parler des multiples guerres remportées par l’insignifiant
garçon nommé Ghazan que j’avais rencontré jadis. Parmi ses triomphes, il avait
englobé tout l’Empire des Seldjoukides dans son ilkhanat de Perse. Je me
demandai ce qu’il était advenu du Brigand Chausseur kurde et de ma vieille amie
Sitarè, mais ne le sus jamais. Je fus informé des ultimes expansions du khanat
mongol – dans le sud, il annexa Java, la Grande comme la Petite, et dans
l’ouest, le Tadjikistan – et vis que, conformément au conseil que j’avais donné
à Kubilaï, aucun de ses successeurs n’avait songé à s’embarrasser de l’Inde.
    D’autres événements se produisirent plus près de chez
nous, pas tous heureux. En peu de temps se succédèrent les funérailles de mon
père, celles de mon oncle Matteo puis celles de marègna

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