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Marco Polo

Marco Polo

Titel: Marco Polo Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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épais. Sa moustache et sa barbe, taillées court à la
mode des charpentiers sur les chantiers navals, étaient encore plus poivre que
sel. Pour un Mongol, il avait les yeux plutôt arrondis et brillants
d’intelligence. Son visage rubicond était patiné mais pas ridé, comme sculpté
dans un noyer bien sec. Son nez court, comme celui de tous les Mongols, mais
massif et plutôt rouge, était le seul élément inesthétique de sa physionomie.
Ses vêtements, taillés dans la soie la plus fine, étaient ornés de dessins en
brocart et enveloppaient une silhouette qui, pour être imposante, n’était en
aucun cas adipeuse. Il portait aux pieds des bottes d’un cuir d’une douceur
toute particulière ; j’appris plus tard qu’elles étaient façonnées dans la
peau d’un poisson dont d’aucuns allèguent qu’il a le pouvoir de soulager la
goutte, seule affection dont j’aie entendu se plaindre le khakhan.
    — Bien, conclut-il lorsque mon oncle et mon père
eurent fini. Peut-être votre Église de Rome fait-elle preuve, après tout, d’une
astucieuse sagesse en se renfermant ainsi sur ses mystères.
    J’en étais alors resté à ma première opinion selon
laquelle le khan Kubilaï n’était, à en juger par ses verdicts calculés à notre
attention au cours du Cheng, qu’un mortel comme les autres ; or tout en
lui semblait valider à présent cette vision, car il continua de bavarder avec
la même légèreté qu’un homme ordinaire, un peu désœuvré, conversant avec des
amis.
    — Oui, votre Église fait peut-être bien de ne
pas envoyer de missionnaires ici. J’en suis venu à me convaincre que, dans
le domaine religieux, mieux vaut encore rien du tout que trop. Nous avons déjà
un certain nombre de chrétiens nestoriens qui ne cessent de nous envahir et de
vociférer, au point d’en devenir insupportables. Même ma propre mère, la
douairière kathun Sorghaktani, depuis longtemps convertie à cette foi, est déjà
si abrutie par celle-ci qu’elle me tanne d’interminables harangues, ainsi que
tout païen qu’elle rencontre. Les membres de ma cour en sont venus à tout faire
pour éviter de la croiser dans les couloirs. Un tel fanatisme, à l’évidence,
dessert ses propres convictions. C’est pourquoi, oui, je pense que votre Église
chrétienne de Rome pourrait sans doute rallier davantage de fidèles en faisant
mine de se tenir à l’écart du troupeau. C’est ce que font les Juifs, vous
savez. De sorte que les quelques païens qui réussissent à se faire accepter
comme Juifs en sont d’autant plus flattés.
    — Je vous en prie, Sire, implora mon père d’un
ton anxieux, ne comparez pas la Vraie Foi avec l’hérétique secte des
nestoriens. Et évitez de la mettre en parallèle avec la religion juive.
Blâmez-nous si vous le voulez, Matteo et moi-même, de ne pas être rentrés au
bon moment, mais je vous l’affirme en toute sincérité, en temps ordinaire,
l’Église de Rome est toute disposée à accueillir à bras ouverts ceux qui
désirent être sauvés.
    — Sauvés ? Mais de quoi, uu ? demanda
vivement le khakhan.
    Ce fut ma première expérience de ce trait particulier
du caractère de Kubilaï, que je pus relever par la suite à de nombreuses
reprises. Le khakhan pouvait être aussi agréable et loquace qu’une vieille
femme, lorsque cela convenait à son humeur et à son propos. Mais lorsqu’il
souhaitait savoir quelque chose, lorsqu’il recherchait une parcelle
d’information, il savait émerger brutalement des nuages de la conversation, de
la sienne ou de celle d’une pièce remplie d’autres personnes, pour fondre sur
le sujet de son choix, tel un faucon sur une pièce de viande.
    — De quoi ? balbutia oncle Matteo, interdit
et pris de court. Vous voulez savoir pourquoi la Chrétienté cherche à sauver
l’humanité, c’est cela ?
    — C’est que nous vous l’avons déjà expliqué il y
a quelques années, Sire..., enchaîna mon père. La foi qui prêche l’amour,
fondée sur les paroles de Jésus, notre Christ et Sauveur, est l’unique espoir
d’apporter sur la Terre paix éternelle, abondance, bien-être du corps et de
l’âme, ainsi qu’une bonne volonté universelle entre les hommes. Plus, après la
vie, une félicité perpétuelle dans les deux, au sein du paradis de Notre
Seigneur.
    J’eus l’impression que mon père avait plaidé la cause
du christianisme aussi bien qu’eût pu le faire n’importe quel ecclésiastique.
Pourtant, le

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