Marie Leszczynska
rassurantes à sa fille, dont l’inquiétude s’accroît en dépit des fausses gazettes que Fleury fait rédiger à son intention. C’est qu’il faut ménager la reine, à nouveau enceinte depuis le mois de novembre. Le 27 janvier 1734, un passage d’une lettre de Stanislas à sa fille y fait référence : « Que le Bon Dieu soit béni de ce qu’il vous donne des forces pour porter votre fardeau. Si on pouvait accoucher de tout ce qui pèse sur le coeur comme d’un enfant, qu’on serait heureux ! »
La folie de Plélo
séduit Marie
La suite est aussi rocambolesque que la première partie de l’aventure polonaise. Une flotte d’opérette est lancée au secours de Stanislas, mais avec si peu d’armes et de courage qu’elle est vouée à l’échec. La couardise des Français choque le jeune comte de Plélo
, ambassadeur de France au Danemark [7] . Outrepassant ses fonctions, il décide de prendre l’affaire en main et de libérer Stanislas. À Versailles, Marie, admirative, ne se lasse pas de lire et relire la dernière lettre de ce preux chevalier à son roi : « Nous allons, Votre Majesté, secourir votre beau-père ou mourir à la peine [8] . » Fleury condamne cet excès de zèle et répond sèchement à l’enthousiasme de la reine : « Il hasarde sa vie et sa fortune. » Marie ne peut s’empêcher de rétorquer au vieux cardinal : « Pour ce qui est de sa fortune, je m’en charge, quel que soit le succès ! »
Au matin du 27 mai 1734, Plélo
prend la tête d’une petite colonne de volontaires et se lance à l’assaut des Russes qui encerclent Dantzig. Échec total… Deux jours plus tard, son corps est retrouvé transpercé de quinze coups de baïonnette et le visage affreusement sabré. Sa disparition jette un froid dans les salons de Versailles où Marie Leszczyńska, les yeux rougis, prend la défense du jeune Plélo
sans réussir à dissimuler ses craintes sur les chances de survie du roi de Pologne.
La suite est à nouveau rocambolesque. Conscient du péril, Monti parvient à faire évader Stanislas. Le 3 juillet 1734, au terme de cinq jours de folle cavale, il réussit à se placer sous la protection du roi de Prusse Frédéric-Guillaume I er , qui l’installe dans l’ancien château des Chevaliers teutoniques, à Königsberg. Il traite son hôte en souverain, ravi de défier ses alliés russes et autrichiens. Il lui donne même une garde et lui accorde une pension journalière de trois cents thalers. Cette aventure inspire à Stanislas un récit palpitant [9] destiné à Catherine Opalinska et à Marie. Il y exprime toute sa verve de roi jovial et bon vivant, heureux d’avoir berné l’ennemi et surmonté les épreuves, malgré son âge et sa mauvaise santé. On y retrouve aussi le chrétien convaincu qui confie son sort à Dieu, persuadé que celui-ci ne peut l’abandonner en aussi mauvaise posture.
À Paris, Barbier donne sa version des événements : « Par les nouvelles de la ville et d’après la Gazette de Hollande , il paraît certain que le roi Stanislas a eu l’adresse de s’évader de Dantzig, et que cette ville et tous les seigneurs polonais qui avaient suivi Stanislas, ont reconnu l’électeur de Saxe. Comme la reine est près d’accoucher, on imprime pour elle […] une Gazette de France particulière, dans laquelle on ajuste les nouvelles qui regardent la Pologne. » Toutefois, certaines nouvelles ne peuvent lui être cachées. C’est ainsi que Marie apprend la mort de l’un de ses plus fidèles amis de la cour, le maréchal de Villars. Engagé dans la guerre contre l’Autriche, comme la plupart des vieux et glorieux généraux de Louis XIV, il a conduit ses troupes avec brio mais s’est éteint le 7 juillet à Turin, vaincu par l’âge et la maladie.
Une « solution lorraine » se dessine
Le 9 juillet 1734, Dantzig se rend. En marge de l’échec de Stanislas, la guerre s’est réglée en neuf mois. Paradoxalement, elle a très peu impliqué le territoire polonais et s’est déroulée en Allemagne et en Italie, où l’empereur Charles VI a subi de cuisantes défaites. Louis XV et le cardinal de Fleury n’avaient pas envisagé un tel dénouement de l’affaire polonaise. Ces revers et le peu d’entrain des Russes et des Anglais à soutenir leur allié autrichien annoncent l’ouverture des négociations. En privé, Fleury avoue qu’il y a peu d’espoir de conserver le trône de Stanislas, même s’il laisse
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