Marie Leszczynska
entendre qu’il existe « des voies pour sauver l’honneur de la France ».
Nul ne sait si le cardinal songe déjà à réclamer la Lorraine. C’est le roi de Prusse qui, le premier, aurait suggéré d’en finir avec la guerre en accordant les duchés de Lorraine à Stanislas. François de Lorraine recevrait, en dédommagement, la souveraineté sur les Pays-Bas autrichiens. Boutade ou provocation de Frédéric-Guillaume
?
Ces propos parviennent jusqu’à Stanislas, toujours installé à Königsberg. Il en parle dans ses lettres à Marie : « Je conviens avec vous qu’au défaut de la Pologne, la Lorraine est la seule chose qui conviendrait de toute façon. » À l’occasion de ces échanges, il apprend qu’il est grand-père depuis le 27 juillet… d’une sixième princesse ! Sans trop y croire, Louis XV avait prévu pour saluer la naissance d’un duc d’Anjou des festivités qu’il se hâta de décommander. Un simple communiqué annonça la nouvelle. C’est ainsi que Madame Sixième, future Madame Sophie
, entra sur la pointe des pieds à la cour.
Au début de l’année 1735, Versailles annonce que la reine entame une huitième grossesse. Tout semble se passer pour le mieux lorsque, le 20 mars, une forte fièvre se déclare après le dîner. Marie est enceinte de trois mois. La température persistant après quarante-huit heures, les médecins pratiquent une première saignée ; deux jours plus tard, deuxième saignée, suivie d’une purgation et d’une prise de quinquina. Aucun résultat. Sachant la reine résistante, les praticiens optent pour une troisième et une quatrième saignée. C’est l’acte de trop qui provoque une fausse couche.
Dans ses écrits, Barbier se contente de signaler que « la reine accoucha d’un faux germe » ; mais il ignore que cet embryon était, cette fois, du sexe masculin. Encore un peu d’espoir, le duc d’Anjou n’est pas très loin ! Les médecins du roi et de la reine s’entendent pour lui conseiller de suivre une cure aux eaux de Forges, où l’on soigne la stérilité. De toute évidence, elle n’en est pas affligée, mais la Faculté semble vraiment à court d’imagination… Prête à tout pour avoir un garçon, Marie obtempère. De Königsberg, Stanislas plaisante : « Mandez-moi comment vous ont fait les eaux de Forges, et je prie Dieu que vous puissiez, après cette cure, forger un duc d’Anjou. »
Stanislas abdique et Marie respire
Pendant ce temps, la « solution lorraine » commence à mûrir dans les esprits et un long travail de coulisses s’ébauche. Il aboutira le 3 octobre 1735, avec la signature des Préliminaires de la paix de Vienne : Stanislas renonce définitivement au trône de Pologne qui revient à Auguste III, mais il garde ses titres de roi de Pologne et de grand-duc de Lituanie. La reine de France conserve ainsi sa dignité de fille de roi. Il récupérera ses biens patrimoniaux et recevra les duchés de Bar et de Lorraine en dédommagement de sa couronne perdue. La cession du duché de Bar interviendra à la signature du traité ; celle du duché de Lorraine lorsque le duc François succédera à Jean-Gaston de Médicis à la tête du duché de Toscane. À la mort de Stanislas, les duchés reviendront à la France comme dot de Marie Leszczyńska. Enfin, la France s’engage à reconnaître la Pragmatique Sanction.
Exclu des négociations, François de Lorraine tente de protester, mais sans succès. Stanislas, lui, trompe l’attente en philosophant à Königsberg. Il termine la rédaction de sa Lettre d’un habitant de Dantzig lorsqu’il reçoit la visite d’un émissaire de Louis XV pour le préparer à abdiquer. Ce qu’il fait le 27 janvier 1736, en prenant bien soin de dater son acte d’abdication de l’an III de son règne !
Soulagée, Marie attend avec impatience le retour de son « cher papa » sans parvenir à cacher une certaine déception. Au cardinal de Fleury qui lui explique que le « trône de Lorraine vaut celui de Pologne », elle réplique avec ironie : « Oui, à peu près comme un tapis de gazon vaut mieux qu’une cascade de marbre », en faisant allusion au magnifique escalier d’eau de Marly, remplacé par une banale pelouse par mesure d’économie.
Quelques jours plus tard, François de Lorraine épouse Marie-Thérèse
d’Autriche. Pendant que Vienne et Nancy fêtent l’événement, les négociations reprennent dans le plus grand secret. Et Stanislas
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