Marie Leszczynska
différentes stratégies pour remettre de l’ordre dans l’esprit de Louis XV. La plus intéressante consisterait à glisser une nouvelle femme dans le lit du jeune roi. Cette favorite, bien contrôlée par le cardinal, conforterait sa position et fidéliserait le roi à sa manière, en le détachant de certaines influences néfastes. Le plan prend lentement forme dans l’esprit du vieux mentor, mais le roi va devancer ses intentions.
Prémices d’une émancipation
Dans la vie de Louis XV, un couple compte énormément : le comte et la comtesse de Toulouse. Chaque jour, à Versailles, le roi emprunte le petit escalier qui le conduit dans leur appartement du rez-de-chaussée. Il y passe des moments exquis en compagnie de ce duo d’âge mûr qui pratique avec raffinement l’art de recevoir. Dernier fils de Louis XIV et de Madame de Montespan, le comte peut être considéré comme son grand-oncle et le dernier membre de la famille à avoir connu ses parents. Leur passion pour la chasse et une grande connivence les unissent.
Le comte de Toulouse a patienté jusqu’à la mort du Régent pour rendre public son mariage, célébré secrètement quelques mois auparavant, avec la femme de sa vie : une Noailles, veuve du marquis de Gondrin, nièce du cardinal-archevêque de Paris et soeur du duc de Noailles. Malgré son âge, la comtesse est une belle femme brune au regard enjôleur qui adore prendre en main la destinée de ses proches. Pour combattre la timidité du roi, elle l’introduit dans une aimable compagnie où règnent l’esprit et la gaieté. Il y prend goût et c’est dans leur château de Rambouillet que Louis XV parvient le mieux à se dérider. Il adore cette résidence aux allures médiévales d’où rayonnent les routes empruntées par les chasses royales. Alliant ainsi chasses et soupers, il lui arrive d’y passer deux ou trois jours, d’autant que la comtesse de Toulouse met toujours beaucoup de soin à choisir ses invités. La chère y est raffinée et les conversations riches de bonnes histoires de chasseurs, enjolivées selon l’inspiration des narrateurs. Le roi ne se lasse pas non plus d’entendre les récits de son grand-oncle sur la cour de Louis XIV.
Les nouvelles amies du roi
Informé des soirées de Rambouillet, Fleury ne s’en émeut pas. En revanche, il est plus soucieux lorsqu’il apprend que le roi accepte l’hospitalité de sa cousine, Mademoiselle de Charolais. Soeur du duc de Bourbon, Louise-Anne de Bourbon-Condé réside au château de Madrid, seulement séparé de la maison royale de la Muette par le bois de Boulogne. Incarnation de la Régence libertine, célibataire pour mieux collectionner les amants, elle a pris un certain ascendant sur le roi qui vient de lui accorder le titre de « Mademoiselle », initialement réservé à la fille aînée du frère du roi. D’abord effarouché par ses attitudes cavalières frisant l’irrespect, Louis XV a vite apprécié cette belle femme, de quinze ans son aînée, pour son sens de la repartie et sa verve railleuse. Bien que fort différentes, la comtesse de Toulouse et Mademoiselle de Charolais, amies intimes pour l’heure, connaissent les inhibitions du roi et s’entendent pour le distraire. En cela, elles partagent le point de vue du duc de Luynes qui écrit dans ses Mémoires : « Le roi aime les femmes, et cependant n’a nulle galanterie dans l’esprit. »
Grâce à sa cousine, Louis XV rencontre pour la première fois l’une des dames du palais de la reine : la comtesse de Mailly
. Issue d’une vieille lignée de militaires picards, Louise-Julie de Nesle est l’aînée des cinq filles du marquis de Mailly-Nesle, condamné à vivre dans la misère depuis la saisie de ses biens. Mariée à seize ans à son cousin débauché, le comte de Mailly, elle est apparentée à de grandes familles comme les Mazarin-La Meilleraye et les Durfort. À la mort de sa mère, en 1729, la jeune femme a repris sa charge de dame du palais.
La comtesse de Mailly
a vingt-trois ans, l’âge du roi. Elle n’est pas jolie, ce qui ne déplaît pas à Louis XV, plutôt intimidé par la beauté féminine. Cette grande fille toute simple, vive et enjouée, a le visage et le nez longs, une grande bouche, des joues plates, le teint mat, de grands yeux vifs et une voix « rude ». Selon un contemporain, cité par Pierre de Nolhac, « elle passe pour avoir la jambe fine, beauté que peut-être elle doit à sa maigreur ; mais
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